BEHIND THE DEVIL #3 Interview avec Alex de DOLOREM RECORDS

Dolorem Records

Et oui, c'est déjà la fin de la semaine et c'est le jour de votre série BEHIND THE DEVIL, comme chaque vendredi Metalnews vous propose de découvrir un Label metal à travers une interview avec son ou ses gérant(s). Cette semaine nous avons été interroger Alex qui tient le label Dolorem Records. Un label qui nous propose chaque année de belles sorties ! 


Alors, pour commencer Alex peux-tu te présenter toi et ton label Dolorem Records ?

Dolorem Records est un label basé sur Tours, avec pour orientation principale le death metal, du plus moderne au plus old school, managé par mes soins depuis les débuts.


Le milieu de la scène underground vit notamment grâce à des petits labels comme le tiens, fait de passionnés (merci à vous) pourrais-tu expliquer ton parcours, comment tu en es venu à créer ce Label ? 

Le label part avant tout pour moi d’une envie de participer à un mouvement et d’apporter à mon niveau ma pierre à l’édifice. N’ayant jamais été musicien, ni jamais souhaité l’être, l’envie de créer un label a toujours été présente. Nous regorgeons aujourd’hui de centaines/milliers de groupes qui méritent d’être soutenus et mis en lumière.

Je pense que cette envie vient également de mon goût d’entreprendre que j’ai depuis longtemps, et grâce auquel mes études ont été pas mal orientées, me permettant d’obtenir un master de management des entreprises. Ce qui a été un plus pour me mettre le pied à l’étrier.

Concernant ma passion pour le metal, je ne suis pas du tout issu d’une famille qui écoute ce style de musique, donc on va dire que je me suis construit au travers mon cercle d’amis et surtout ma curiosité. Etant né en 91, j’ai démarré comme pas mal de gens de ma génération je pense, par toute la scène Neo Metal avec des groupes tels que SLIPKNOT ou encore DEFTONES pour au fur et à mesure, aider par l’avènement d’internet et la lecture de magazines, me mener vers des choses de plus en plus extrêmes comme le death metal et black metal, styles que je n’ai donc toujours pas quitté.


Si je me trompe pas Dolorem Records est né en 2013, comment se porte le label après 6 ans déjà ? Qu'est ce qui a changé depuis sa création, comment a t'il évolué ?

Le label a en effet été créé en septembre 2013 mais on a réellement commencé nos activités en septembre 2014 afin de se structurer un minimum et de démarcher les groupes avec qui nous souhaitions travailler.

Je dirais donc que 4 ans (bientôt 5) pour un label, ça reste assez jeune mais je reste toutefois fier d’être encore présent dans la scène underground.

Et donc si je devais prendre du recul malgré le peu d’années d’existence, je dirais que ce qui a le plus changé depuis sa création, c’est ma relation avec les groupes du label. Là où au départ je leur laissais une totale liberté sans vouloir m’immiscer dans leur processus créatif, ni même donner un avis, aujourd’hui je suis beaucoup plus à l’aise avec le fait d’échanger avec eux, et de leur apporter un regard extérieur et une critique objective quelle soit négative ou positive. Cela doit avant tout rester constructif et doit faire avancer le projet pour qu’il soit le meilleur possible.

Est-ce que les résultats sont à la hauteur de tes espérances ?

Les résultats correspondent à mes attentes, mais bien évidemment je travaille toujours dans le but de m’améliorer encore et encore afin d’apporter plus aux groupes avec qui je travaille. Difficile de se contenter de ce que l’on a de manière générale.

Quand on regarde ta discographie, on voit que tu sors finalement peu d'album (2 ou 3 par an) comparé à certains de tes confrères.  Est-ce que c'est parce que tu n'as pas le temps ou l'argent ? Ou parce que tu sélectionnes avec minutie les groupes avec qui tu travailles et qu'au final peu de projet attire ton attention ?

A vrai dire c’est pour les deux raisons. Il y a bien évidemment une logique économique dans un premier temps. Le label reste une structure de petite taille dont je suis seul maître à bord pour le moment, donc avec des moyens encore limités.

Et ensuite, il y a le fait que je fonctionne essentiellement au coup de cœur et à l’envie du moment. Le meilleur exemple est ma dernière sortie  KÅABALH, qui est arrivée après STORM UPON THE MASSES et NEPHREN-KA, deux groupes tendant tous deux vers quelque chose de plus brutal et moderne. Alors qu’avec KÅABALH, on est à l’inverse tourné vers l’ancienne époque, plus old school et plus sale. Tout cela est venu d’une envie de sortir quelque chose de plus old school. Je me suis donc mis à la recherche d’un groupe répondant à mes attentes. Après il faut en effet noter que ça demande du temps et de la patience (voir aussi de la chance) avant de tomber sur LE groupe qui correspond à ses envies. Surtout qu’aujourd’hui, même si oui il existe pléthore de projets, beaucoup se ressemblent et manquent d’identité réelle.

Quand on regarde les groupes qui composent ton label on voit NEPHREN-KA, CREAPING FEAR ou encore SLAVE ONE... des groupes avec déjà une petite renommée sur le territoire Français, comment en êtes vous rendu à travailler assez vite avec ces groupes ? Est-ce eux qui vous ont sollicités ?

C’est avant tout du cas par cas. Par exemple, pour le premier cité, NEPHREN-KA, c’est un total concours de circonstances. Le groupe était à la recherche d’un label, du fait de la fermeture de leur label à l’époque Kaotoxin (qui aujourd’hui renaît de ses cendres sous la bannière de XenoKorp). Ils ont alors démarché différents labels et une connaissance commune leur a susurré le nom du label. Pour être honnête, Je ne pensais pas vraiment pouvoir les intéresser mais après plusieurs échanges, ils m’ont fait confiance, et ont accepté de collaborer avec Dolorem Records.

Tandis que pour SLAVE ONE, je suivais le groupe depuis leur début. Ce groupe m’a toujours intrigué, de part son identité et sa musiqué alambiquée plus que reconnaissable. C’est donc à la suite de la création du label que j’ai appris qu’ils composaient leur premier album, suite à quoi je me suis empressé de leur proposer une collaboration qu’ils ont à leur tour accepté.


J'ai l'impression que depuis leur passage par votre label ces groupes ont connu un bond de notoriété, comment l'expliques tu ? Quelle est ta stratégie de promotion pour tes sorties ?

Le « bond de notoriété », c’est quelque chose de difficile à expliquer à partir du moment où je crois à 100% dans les projets que je sors sur le label et que j’en suis moi-même le 1er défenseur.

Après c’est sûr que le plus compliqué dans un label est de créer l’engouement autour d’une sortie, ce qui est encore plus vrai ces dernières années du fait de la forte croissance du nombre d’albums produits.

Le meilleur moyen pour cela est forcément d’avoir un groupe avec une forte identité qui puisse interpeller les gens. La musique reste et restera toujours le premier facteur de réussite. La promotion est juste un gros coup de pouce donné par le label et ses partenaires qui va permettre de partager cette musique au plus grand nombre. Cela passe par la constitution d’un réseau efficace, d’un bon bouche à oreille, d’être présent sur scène, sur les réseaux sociaux, etc., c’est donc un tout. En gros, il est nécessaire de faire vivre le projet.


Quels objectifs te fixes-tu pour cette année ? Combien de sorties, quelles ambitions ? Et quelles sont tes projets pour les années à venir ?

Pour la mi-année, il est prévu la sortie du 1er album de ma dernière signature, TOWERING, groupe parisien très prometteur pas mal influencé par TEMPLE OF BAAL ou encore SVART CROWN. Un jeune groupe qui en veut et qui se donne les moyens de réussir, et qui sont surtout dévoués à leur musique et passionnés.

Devrait ensuite suivre vers la fin de l’année, le second album de SLAVE ONE qui est toujours en préparation et avec lequel de mon point de vue, le groupe devrait franchir un énorme palier en comparaison à tout ce qu’ils ont pu produire auparavant.

En parallèle, je suis actuellement en train de préparer une mini tournée en France avec STORM UPON THE MASSES afin qu’ils puissent venir défendre leur album sur nos terres.

Sur le long terme, le but ne serait pas forcément d’augmenter le nombre de productions par an mais surtout de proposer différents formats et de proposer des objets plus sophistiquer.

Est-ce compliqué au quotidien de s’occuper de la gestion de ce Label ? Combien de temps par jour/semaines ?

La gestion d’un label demande du temps, de l’énergie, et ce de manière quotidienne mais je ne pense pas que cela soit propre uniquement à la gestion d’un label. C’est applicable à tout ce que tu peux entreprendre dans la vie. A partir du moment où tu fais quelque chose que tu aimes (sport, musique, dessin ou autres), tu vas vouloir t’investir à fond sans compter, t’améliorer et faire les choses bien. Et je ne vois pas cela comme une contrainte ou comme un sacrifice tant que cela reste un plaisir et une passion. J’estime cet investissement normal surtout que je pars du principe que le travail paie forcément un jour.


Le but de cette interview, est de voir un peu l’envers du décors, ce qui se cache derrière la musique. Pourrais-tu nous expliquer un peu le processus de production, comment vous vous fonctionnez avec les groupes ?

Comme je le disais plus haut, les artistes du label sont libres sur toute la partie création. Je peux intervenir toutefois pour leur donner mon avis et échanger, mais ils restent seul maître de leur musique. Du coup, on commence vraiment à discuter, les groupes et moi dès lors qu’un nouveau projet est terminé d’être composé. Nous commençons premièrement à parler planning et d’une éventuelle période de sortie afin de se donner un objectif.

Lors de l’établissement du planning, on prend des hypothèses sur le temps d’enregistrement, du mixage et mastering ainsi que de l’élaboration de l’artwork, auquel on rajoute ensuite toute la préparation en amont de la promotion qui précédera la sortie de l’album. Et donc une fois ces éléments posés, on établit la période la plus réalisable et raisonnable tout en gardant en tête qu’un retard n’est pas à exclure.

Le groupe démarre ensuite l’enregistrement du projet tout en ayant démarrer le processus de création auprès de l’artiste qui réalisera l’artwork. Selon l’artiste et l’exigence des détails demandés par le groupe, cela peut demander pas mal de temps à produire.

En parallèle, de mon côté, je commence à préparer la partie administrative et promotionnelle de la sortie de l’album en attendant la réception du projet complet et final. Ensuite, je n’ai plus qu’à suivre l’avancement des différentes étapes de production de l’album (enregistrement, mixage et mastering) et de l’artwork et de m’assurer qu’on ne prend pas de retard. A noter toutefois, que je préfère que le projet prenne du retard et que les choses soient faites correctement que l’inverse.

Une fois tous les éléments en main, je lance le tout en production et je commence toute la partie promotionnelle jusqu’à la sortie de l’album et même après.


Peut-être que dans nos lecteurs, certains rêvent de monter leur label afin de produire les groupes qu’ils aiment. Qu’aurais-tu comme conseils à leur donner toi qui en a monter un, et qui tient depuis déjà depuis 5 ans ? Est-ce réalisable aujourd’hui ?

Le seul est unique conseil à donner, c’est de s’investir avant tout par passion et ne jamais rien lâcher quoiqu'il arrive.


Ce qui fait peur souvent c’est la paperasse, les déclarations et compagnies, en réalité qu'en est-il ? Est-ce surmontable ? Votre activité est déclarée ? Signez-vous des contrats avec tous les groupes ? Quels sont les risques là-dessus pour vous ?

Tout est bien évidemment surmontable, pour peu qu’on soit curieux et bosseur. Il suffit de s’intéresser aux choses et de se renseigner, sachant qu’aujourd’hui on trouve facilement réponses à nos questions sur internet et ce qui permet en plus de gagner du temps.

Sinon concernant le statut du label, il est en effet déclaré, et vit sous forme associatif. Le but n’a jamais été d’en vivre, mais surtout de promouvoir des groupes que j’apprécie, et de leur apporter mon aide et de faire en sorte qu’ils ne se focussent que sur leur art.

La seule chose que j’inflige au groupe en dehors de leur art est en effet un contrat. Même si je fonctionne en avant toute chose sur la confiance, la parole d’homme, il est toujours préférable d’établir les choses sur papier et de les cadrer. Cela permet d’éviter toute (mauvaise) surprise et d’être sûr que tout le monde soit bien sur la même longueur d’onde.


Est-ce que tu as eu peur au moment de lancer le label, ou à certaines périodes difficiles ? Des paris risqués par exemple ?

Ce n’est pas vraiment quelque chose auquel je pense en réalité. Je ne me suis jamais vraiment posé la question. J’en ressentais le besoin, je pouvais me le permettre personnellement et financièrement donc je l'ai fait.

Le but pour toi est-il d’en vivre à un moment ?

Comme dit un peu plus haut, je ne cherche pas à en vivre pour le moment. Si un jour je peux me le permettre, je ne vais bien évidement pas me priver. Mais ce n’est clairement pas mon but premier. Je souhaite avant tout que le label se stabilise financièrement et qu’il puisse s’autofinancer. Avoir une machine stable tout en continuant à faire des découvertes et de les partager au maximum, et ce de manière intègre, je dirais que c’est ça mon but premier.


Pourquoi avoir choisi la forme associative et pas une entreprise pour monter ce label ? Penses-tu changer ?

Ce qu’il ne faut pas oublier que c’est qu’une association est par principe non lucrative. Et c’est en accord avec la vision que j’ai aujourd’hui de mon label. L’objet y est désintéressé. De plus, la forme associative permet plus de facilité administrative jusqu’à une taille limite. Donc dès que j’aurais atteint cette taille limite, oui, je songerais à changer de statut.


A l’heure du numérique, on est tenté de se demander si les labels ont encore un rôle à jouer notamment pour les petits groupes. Pour toi qu’est-ce qu’un bon Label ? Quelles missions doit-il pouvoir réaliser ?

Je vais dire que chacun va avoir sa propre vision d’un label. Pour ma part, je pense qu’un label est là pour enlever une bonne épine du pied aux groupes en leur permettant de se préoccuper uniquement de leur art.


Je ne crois pas avoir vu de vinyls dans tes sorties ni dans ta distro. Pourquoi ce choix, à l'heure ou le vinyl renaît et fait le plaisir de beaucoup de personnes dans le metal, parfois même plus que le Cd ?  

C’est en effet quelque chose que je n’ai pas encore eu la chance de proposer, mais j’y travaille. Comme je disais, c’est un vrai souhait de proposer différents formats. Et en parlant de la hype des vinyles, c’est d’ailleurs assez paradoxal de voir que dans l’air de plus en plus numérique dans laquelle nous vivons aujourd’hui, l’attrait des gens vis-à-vis des objets physiques tels que les vinyles ou les tapes n’a jamais été aussi fort.

Est ce que tu joues aussi dans un groupe ou une autre activité en lien avec le metal ?

Non, aussi bizarrement soit-il, l’idée de jouer dans un groupe ne m’a jamais attiré. Je préfère ma place de spectateur.


Et bien c’était tout pour moi, je te laisse le mot de la fin !

Merci à toi et Metalnews pour l’interview, et pour cette belle initiative de mettre en lumière les labels.

Et un merci à tout ceux qui nous suivent et soutiennent, et aux groupes pour leur confiance.

Doloremrecords.com
Bandcamp
Discogs
Facebook


par L'Apache le 01/03/2019 à 08:21
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Commentaires (2) | Ajouter un commentaire


Krucyator
membre enregistré
01/03/2019, 16:46:16
Un label excellent!

Jus de cadavre
membre enregistré
05/03/2019, 07:45:31
Une fois de plus interview très intéressante La Rude ! ;)

"Je pars du principe que le travail paie forcément un jour."

Du bon sens, mais il n'est pas inutile de le rappeler en effet, quand beaucoup de gens attendent que tout leur tombe tout cuit dans le bec (tout lien avec l'actualité serait fortuit...).

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