Premier jour d’une année qui s’annonce déjà bien moisie, avec pour seule innovation, un éventuel changement de président. Parlez de perspectives…La seule chose à faire, est de ne rien en attendre, et de continuer à faire ce que nous aimons faire, à savoir écouter de la bonne musique, attendre patiemment l’apocalypse pour ressortir nos vieux vinyles de VENOM et BATHORY, et boire une bière ou un soda frais, l’air détaché et l’humeur plus ou moins badine. Et comme je n’aime rien de plus que parcourir le monde virtuellement, je suis allé ce matin en Russie, sans bouger de mon fauteuil, pour y découvrir un nouveau venu Thrash au rayonnement pour le moins confidentiel.
Premier album aux proportions de EP pour les russes de СМЕРШ, sortis de nulle part et soutenus par une structure pour le moins confidentielle, un chant en langue natale, et un parti-pris pour le moins passéiste, voilà le menu de ce Капитал, très formel dans le fond et la forme, mais qui justement, rappellera aux spécialistes l’émergence de la première vague de groupes Thrash d’URSS.
Je ne sais absolument rien d’eux, les ayant remarqué d’un clin d’œil sur un Vk bien connu, mais tant pis, puisque leur musique délicieusement rétrograde se suffit à elle-même. Une musique certes basique, qui ne tient même pas la compassion avec les débuts de SHAH, mais qui dégage un parfum suffisamment nostalgique pour nous enivrer en cette première journée de nouvelle année. Enregistré avec les moyens du bord, avec une basse proéminente et un chant sous-mixé, ce premier effort ne ménage pas les siens pour nous convaincre de son allégeance à un style né dans les années 80, et entre ces riffs aigus et sournois et ces chœurs à l’allemande transposés en vociférations russes, l’ambiance est chaude, la plupart du temps en mid tempo, mais cette naïveté et cette authenticité font de ce premier jet un brouillon intéressant, sinon primordial.
L’aspect live de l’entreprise, cette grosse caisse captée sans effet ni compression qui sonne son écho dans une vieille salle de répétition, ce grésillement permanent vous rappellera les démos découvertes à l’époque sous le manteau, vestige du tape-trading si cher au cœur des thrasheurs de tous pays. Des effluves d’un autre temps, de l’amateurisme, mais aussi une mise en place suffisamment carrée qui permet quelques variations Thrashcore et autres ralentissements Crossover, et trente petites minutes de spontanéité Thrash qui font du bien aux baskets.
Inutile donc de comparer cette sortie aux gros morceaux du moment, ni même à l’underground le plus respectable. Les СМЕРШ ont composé avec leurs moyens, et nous offrent sept petits morceaux nerveux, hargneux, parfois légèrement Core sur les bords, mais assez épais pour s’affilier à une sorte de proto-Bay Area délocalisée en ex-URSS.
A vous de voir si le son est assez confortable pour vous, si les intonations nasillardes du chant sont supportables, si les riffs convenus ne le sont pas trop, et si cette rythmique un peu bancale calera vos oreilles comme la table basse. De mon côté, j’apprécie ce genre de retour aux sources et cette immersion intégrale dans les premières années d’une violence russe qui cherchait désespérément à copier les stars américaines et européennes, ces quelques inserts mélodiques simples, et surtout, cette hargne qui transpire par tous les pores mais qui ne souille pas les modestes ambitions.
Un produit tout sauf manufacturé pour plaire au plus grand nombre, quelques moments vraiment délicieux (« Братишка » et son lick très SLAYER), pour un premier jet en mode brouillon accrocheur et sympathique. Alors, bonne année mon cul, mais 2022 aura encore le mérite de nous faire découvrir des groupes qui valent la peine d’être mis sous la lumière.
Titres de l’album:
01. СМЕРШ - Бей!
02. СМЕРШ - Суицид
03. СМЕРШ - Девочка, танцуй
04. СМЕРШ - Каннибализм
05. СМЕРШ - Братишка
06. СМЕРШ - Настоящий враг
07. СМЕРШ - Бисер (MC Malohaval)
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