Des funérailles pour le monde ? L’idée semble de circonstance, eut égard au comportement humain de plus en plus violent, et une succession de catastrophes naturelles ensevelissant le maigre espoir qui nous reste sous des torrents de boues ou des décombres encore fumantes. Mais le monde aura sa revanche, et nous mettra en terre bien avant que nous tentions de le faire disparaître définitivement. Alors autant accepter cet état de fait, sous peine de vivre une vie de questions en désolation, et de dépression en actes gratuits dérisoires. Et avant de devoir se rappeler de « l’avant » avec nostalgie, autant profiter du moment présent tout en anticipant un avenir qu’on aimerait un peu meilleur que celui que les sociologues et autres scientifiques nous prévoient. En parlant de nostalgie, nous avons affaire aujourd’hui à un trio qui ne la garde pas dans son flight-case. Sans verser dans la mode vintage qui consiste à reprendre à son compte les principes de liberté et de création des 70’s, les SANHEDRIN en empruntent pourtant quelques astuces, tout en se concentrant aussi volontiers sur des 80’s qu’ils sont loin d’avoir oubliées. Il faut dire que le groupe n’est pas vraiment constitué de nouveaux venus, mais plutôt de musiciens qui traînent leur bosse dans le vécu depuis longtemps.
Leur vécu à eux, c’est celui de la crudité de Brooklyn, d’ordinaire plus habitué à abriter des déflagrations Hardcore que des échos métalliques. Pourtant, le trio (Erica Stoltz – chant/basse, Jeremy Sosville – guitare et chœurs, Nathan Honor – batterie) est bien obsédé par des valeurs plus épaisses et épiques, et semblent vouloir synthétiser dans le même effort l’oppression de ST VITUS, les mélodies acérées de MAIDEN, et la puissance virile et tranchante de JUDAS PRIEST, tout en gardant du coin de l’œil sa propre identité.
SANHEDRIN, groupe du passé ? En considérant l’appartenance de ses musiciens à d’anciens combos US comme BLACK ANVIL, VERMEFÜG, LOST GOAT et beaucoup d’autres, l’allusion n’est pas si déplacée que ça, et leur musique semble même confirmer que leurs gouts se situent en amont de quelques années de notre époque. Impossible de ne pas penser au Doom de l’orée des 80’s, ni à la NWOBHM de la même période, tout autant qu’au Speed/Power de 81/82, et même à quelques réminiscences du SAXON le plus solide et racé, surtout lorsque la rythmique commence à s’emballer (« Demoness »). Mais c’est plutôt à un subtil équilibre entre la bande à Rob Halford et celle de Dave Chandler que la musique d’A Funeral For The World fait penser, même si les trois musiciens font ce qu’ils peuvent pour s’en démarquer. Ils tentent alors dans ce cas précis de s’envoler librement dans de longs breaks évolutifs, qui avouons-le tout de go sont salement performants, à tel point qu’on a souvent le sentiment d’avoir affaire à un groupe évoluant dans cette configuration depuis un bon moment. La cohésion est frappante, tout comme l’est ce désir de rester créatif en employant des recettes anciennes, ce qui correspond très bien à la définition que les SANHEDRIN donnent d’eux-mêmes, en se qualifiant de « groupe au son familier, mais pas dérivé ». Ce qui sous-entend évidemment qu’ils assument leurs influences, mais qu’ils ne capitalisent pas dessus au point de friser le plagiat, ce qui n’est évidemment pas le cas. Et en substance, ce trio surprenant parvient même à synthétiser en un seul élan plusieurs courants, au point de pratiquer un art fragile de la combinaison, se situant en convergence de décades qui finalement se retrouvent reformulées. Il est ainsi très difficile de situer dans le temps les dérives, au point parfois de ne plus pouvoir établir de frontière entre le Rock à tendance occulte des 70’s, et le Hard’n’Heavy naissant des regrettées 80’s.
Mais la sensation de perdition, loin d’être déplaisante, est complètement euphorisante. En plus d’être de redoutables musiciens, Erica, Jeremy et Nathan sont d’excellents compositeurs, alliant la férocité d’un impact de guitare puissant à la progression délicate de mélodies grandissantes. En tant que maîtresse de cérémonie, Erica impose une basse ronde ou grondante, qu’elle nappe de vocalises nuancées qui ne négligent ni les accès de rage, ni les déliés veloutés. Cette dualité s’incarne parfaitement autour de « Collateral Damage », qui laisse quelques arpèges s’évader au son d’une voix vraiment séduisante, avant que les guitares ne sonnent le rappel d’un Heavy Metal vraiment dur, mais réellement ambitieux et pur. Il est aussi possible de penser à une version sophistiquée des MANILLA ROAD pour cette façon de tailler sa propre route sans tenir compte des indications, ou même parfois d’un CANDLEMASS plus guilleret que d’ordinaire. Comparaisons globales qui ne valent pas postulat, puisque les atmosphères développées ici sont trop personnelles pour être précisément jaugées.
Inutile donc de vous baser sur l’explosif et initial « Riding On The Dawn » pour deviner les contours d’un premier album aussi versatile qu’il n’est cohérent, puisqu’il vous faudra l’apprivoiser in extenso pour en comprendre tous les rouages.
Autoproduit, A Funeral For The World est une petite merveille sonore au mixage parfait, qui ménage des instants de calme au milieu de la tempête. On sent que le background des individualités a été mis au service d’un collectif sans faille, qui parfois unit l’énergie et le lyrisme dans un même ballet (« Faith Healers »). De quoi retrouver la foi en un Heavy Metal sans concessions, mais pas borné ni passéiste pour autant. En laissant leurs idées s’exprimer sur de longues minutes, les originaires de Brooklyn ont pourtant pris un risque de base assez culoté, mais ont transcendé leur passé pour le tourner vers un présent illuminé. En prenant pour exemple le fulgurant « No Religion », au texte assez inspiré et d’actualité, il est aisé de deviner le potentiel d’un groupe décidément très attachant, qui a parfaitement su combiner évolution et tradition, et harmonies et amplification. La sensibilité est au rendez-vous, pour une digression que Steve Harris himself aurait pu composer en duo avec les BARONESS, sans paraître vieux-jeu ou trop opportuniste. Grosse dose de groove imprévue mais goulue (« Massive Deceiver », je ne vois pas qui peut être déçu par ça), pour une conclusion en crescendo, résumant des décennies de Heavy Metal uni, citant pêle-mêle QUEENSRYCHE, JUDAS, HELLOWEEN, IRON MAIDEN, BLACKLACE, pour un pot-pourri temporel et stylistique qui a l’art, mais aussi la manière.
La réalité, le réalisme, telles sont des valeurs auxquelles Brooklyn est très attaché. Et le coin a de quoi être fier de ses enfants, qui nous proposent un LP bourré de références, assimilées, et restituées avec un brio enflammé. Un disque profond, sincère, joué par des instrumentistes de fer, à la technique éprouvée et à l’unisson en acier forgé. Une sacrée surprise que l’on n’attendait pas forcément, mais qui pourrait nous redonner un peu d’espoir, nous qui avons les poings et le cœur qui flanchent régulièrement. Une symphonie en Metal majeur pour un trio qui risque de le devenir. Souhaitons-leur de belles années, et une distribution à grand échelle amplement méritée.
Titres de l'album:
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