Les deux avantages à parler d’un album instrumental, c’est que d’une, on sait qu’on ne sera pas obligé de passer la brosse à reluire au chanteur, et d’autre part, qu’il s’adressera à tout le monde, sans frontières, puisque la langue de la guitare est la même dans le monde entier. Mais restreindre le premier LP sans chant de Reb BEACH à une facilité de communication serait d’une injustice crasse envers le bonhomme. Car voici un musicien qui aurait largement pu être John Petrucci à la place de John Petrucci dans DREAM THEATER, ou Steve Morse dans les DIXIE DREGS. Le CV de l’américain est tout bonnement impressionnant, et ce, dès ses premières années de pratique. Fréquentant assidument la Berkeley School of Music, comme tous ses petits copains techniciens, Reb a vite senti après quelques mois qu’il en savait assez pour voler de ses propres ailes, ce qui lui permit quelques sessions avec des noms aussi fameux qu’Eric Clapton, Bob Dylan, Roger Daltrey, Chaka Kahn, ou Howard Jones. Et de fil en aiguille et de cordes en studio, Reb rencontra un autre jeune prodige, comme lui, fraichement débauché du nouveau groupe d’Alice COOPER, un certain Kip Winger avec qui il allait faire un sacré bout de chemin…Bon, nous allons nous épargner la biographie exhaustive, tout le monde connaît le bonhomme et sait que depuis des années son parcours a toujours été constant et brillant, passant d’une implication dans des groupes aussi variés que WHITESNAKE, DOKKEN, NIGHT RANGER, TWISTED SISTER, à une insertion dans le supergroupe BLACK SWAN, en compagnie d’autres pointures comme Jeff Pilson, Robin MacAuley et Matt Starr. Mais même en réduisant la carrière de Beach à WINGER, le constat serait amplement suffisant pour s’intéresser à sa musique en solo, plus éparse, dont les premiers signes nous ont été donnés en 2002 avec Masquerade.
Sauf qu’en 2020, Reb a choisi le grand plongeon, en s’autorisant sa première incartade instrumentale sous son propre nom, exercice Ô combien difficile lorsqu’on sombre dans la complaisance ou la démonstration. En tant qu’ado des années 80, j’ai été bercé comme vous par les albums de Joe Satriani, Steve Vaï, Jason Becker, CACOPHONY, Joey Tafolla, Tony MacAlpine, Yngwie Malmsteen, l’écurie Shrapnel en général, et les délires de Mike Varney et ses poulains prolixes. De toute cette période, je n’ai retenu que quelques œuvres méritant la postérité - Surfing With The Alien et Passion and Warfare en tête de liste - le principal défaut de ce genre de réalisation restant l’appétit insatiable de l’ego des musiciens ne cherchant que la reconnaissance. Et comme je déteste la flatterie, j’ai passé à la trappe bon nombre de vinyles ne méritant que le mépris adressé aux démonstrateurs les plus boursouflés, ayant moi-même été élevé à grands coups de Clapton, Beck, guitaristes ne parlant jamais pour ne rien dire. Mais Reb, trente ou quarante ans après cette vague de six-cordistes dévalant leur manche comme Marielle Goitschel les pistes a bien compris que la mode n’était plus à la carte de visite surchargée, et a donc composé de véritables morceaux, unissant quelque part dans la qualité le verbe mélodique de Satriani, le phrasé démoniaque de Steve Morse, le déhanché jazzy de Scott Henderson, et l’agressivité rythmique de Jeff Beck. En résulte un premier album totalement instrumental et complètement euphorisant, qui ne nous prend pas pour des billes, et qui n’attend pas de nous un aval immédiat sans requête de qualité.
Entouré d’une poignée de musiciens aussi doués que lui (David Throckmorton et Robert Langley - batterie,
Michele Luppi - piano, Phillip Bynoe et John Hall - basse, Paul Brown - claviers), et tâtant des claviers, de la basse et des cordes, Reb a donc pu se lâcher et produire l’album qu’on attendait d’un guitariste de son acabit, à savoir une œuvre d’une grande classe et d’une ouverture d’esprit manifeste. Inutile donc de vous attendre à du WINGER ou a du WHITESNAKE en version instrumentale, ou à un déluge de note acides à faire fondre un parapluie en fonte, puisque A View From The Inside justifie son titre à chaque intervention, et propose donc une introspection du bonhomme, très pudique, mais assez révélatrice des obsessions et des modèles choisis durant son apprentissage. Il n’est donc guère étonnant que nombre de pistes exhalent d’un parfum très DIXIE DREGS, et auraient pu sortir de la guitare et de l’imagination de Steve Morse. Pour autant, Reb n’a pas joué l’hommage à tout prix, et se montre allusif à ces fameuses années 80, celles qui ont tout fait exploser pour lui, et l’ombre de Joe Satriani plane bas au-dessus de certains soli. Les fans connaissant le travail de l’américain au sein de ses groupes respectifs ne seront pas surpris du doigté très précis et coulant, ni des enchaînements parfois surréalistes que le guitariste se permet. Et lorsque Reb s’autorise des exactions loquaces sur fond de Jazz-Rock légèrement Funky (« The Way Home »), nul n’est choqué de ce mélange un peu étrange.
Et c’est bien de mélange dont il faut parler à propos de cet album, et de métissage, entre un Rock très énergique, un Hard Rock plus allusif, un Jazz-Rock abordé, et surtout, de la solidité dans la composition, ce qui permet à l’artiste de passer d’un Hard-Rock burné (« Black Magic »), à un Jazz-Rock à la DIXIE DREGS (« Little Robots »), sans avoir à justifier ses écarts. De cette variété ne nuisant absolument pas à la cohérence émerge un réel plaisir d’écoute, chaque piste réservant son lot de prouesses techniques (et pas seulement à la guitare, les plans de basse méritent aussi l’attention), certaines misant sur l’agressivité et le background Hard-Rock du bonhomme (« Infinito 1122 », clippé pour l’occasion), d’autres retrouvant la magie du grand Satch pour un déroulé boogie hargneux de premier choix (« Hawkdance »). Mais ce qui frappe surtout à l’écoute d’A View From The Inside, c’est le plaisir qui en émane, et spécialement celui de Reb qui s’éclate sans autre prétention que celle de nous donner du plaisir. Les accros à la technique s’amuseront évidemment à identifier telle ou telle astuce, mais les néophytes profiteront des mélodies que le guitariste ne se gêne pas pour incruster à chaque détour. Un album méchamment jouissif donc, à cent lieues des pires caprices des années 80, et surtout, une reconnaissance pour Reb BEACH, qui depuis ses années WINGER n’a cessé de nous épater, même en jouant aux côtés des plus grands.
Mais Reb n’est-il pas l’un des plus grands lui aussi ?
Titres de l’album:
01. Black Magic
02. Little Robots
03. Aurora Borealis
04. Infinito 1122
05. Attack Of The Massive
06. The Way Home
07. Whiplash
08. Hawkdance
09. Cutting Loose
10. Sea Of Tranquility
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