De mon temps, dans ma prime jeunesse, les duos que je voyais tous les samedis soir chez les Carpentier étaient bien coiffés, bien habillés, et chantaient des chansons gaies aux paroles pleines d’espoir et d’amour. Par pitié, rendez-moi mes Sheila & Ringo, mes Stone & Charden, que je retrouve un peu de cette insouciance dans cette époque gangrénée par les troubles sociaux et autres abjections. Mais non, décidément les labels sont sans pitié, et me demandent de chroniquer des choses infâmes, des brouets sonores immondes, composés par des esprits dérangés et sans doute très à l’aise dans leur époque cauchemardesque. Dernière requête en date, le premier full-lenght des abominables DEATHEPOCH, venus de Pologne, et qui proposent un cauchemar sonore dont on ne ressort pas indemne, tant au niveau du moral que de l’audition. Fondé par deux acteurs majeurs de l’underground, Lord K. (NEKKROFUKK, SACRIFICULUS, GOATHRONE, ex-HATE), manipulant avec grâce le chant, la batterie et les samples, et Morgul (responsable du label Putrid Cult) à la guitare et à la basse, DEATHEPOCH s’ingénie donc à trouver les bonnes sonorités infernales pour illustrer cette ambiance d’apocalypse qui nous pousse à la dépression. Et comme les deux musiciens ne sont pas pingres et n’économisent pas leur temps, ce premier long l’est dans les faits, et frise les cinquante minutes de traumatisme absolu. Toutefois, ne vous attendez pas à une digression sur les turpitudes mentales d’ABRUPTUM, ou à une variation sur les thèmes sadiques des psychopathes de l’écurie Satan Records, mais bien à une œuvre pensée, certes horrible dans le rendu, mais structurée, et « colorée » de quelques surprises assez agréables.
D’ailleurs, Morgul est le mieux placé pour faire sa propre pub, et n’hésite pas à aligner les références pour situer le travail accompli en commun avec son acolyte. C’est ainsi qu’il réserve Abysmal Invocation aux fans de MZ 412, BRIGHTER DEATH NOW, PRURIENT, mais aussi aux accros à la boucherie de BEHERIT, REVENGE et ARCHGOAT, et autant dire que le CEO a pioché les bonnes cartes au moment de vous aiguiller. Car l’œuvre complexe et bruyante de ces deux malfaisants se rapproche en effet d’un brouet mixant tous les ingrédients/références précités, et donne dans le crossover global mélangeant les saveurs d’un Black cryptique, d’un Death abyssal et d’un Indus/EBM franchement sale. Accueillant une myriade d’invités, dont les principaux sont Mark of the Devil (CULTES DES GHOULES), Vincent Crowley (ACHERON), et Kris Stanley (SINISTROUS DIABOLUS, ex- DIOCLETIAN), tous venus pousser la chansonnette pour rester frais, Abysmal Invocation est un concept à réserver aux âmes les plus averties, et prend un malin plaisir à ne retenir de ses styles de base que leurs concepts les plus rances et infernaux. Difficile d’écouter cet album si on n’est pas rompu à l’exercice de l’extrême de l’extrême, et cette redondance est clairement voulue au moment de décrire les dix pistes de ce premier crachat.
Doté d’un son ample et assez clair malgré le parti-pris bruitiste, Abysmal Invocation offre donc une visite guidée des enfers de Dante, et nous fait passer par le purgatoire avant de nos entraîner dans les bas-fonds les plus chaleureux. En mixant l’Ambient, le Black très sombre et bruyant, sans ménager les effets sonores les plus dignes de l’horreur imparable, DEATHEPOCH nous a peaufinée une nuit des plus agitées, de celles dont on se souvient en sueur au petit matin. Sauf que dans le cas des deux polonais, inutile d’attendre le petit matin ensoleillé, puisqu’il n’existe pas. Tout n’est que noirceur et bruit, un peu comme si les mauvaises intentions de REVENGE et MZ 412 avaient trouvé un terrain d’entente pour nous traumatiser en toute impunité. Les segments sont parfois clairement classés selon leur style, mais n’hésitent pas non plus à mélanger les approches pour causer encore plus de dommages sur notre pauvre cerveau. Et lorsque le duo s’abandonne aux joies du bruit le plus mat et aux effets les plus terrorisants, ça nous donne une longue et infâme litanie, « Abysmal Invocation II », renvoyant les IN SLAUGHTER NATIVES à leurs chères études Dark Ambient et Indus. Avec sa voix d’outre-tombe trafiquée pour sonner encore plus sentencieuse, Lord K domine les débats, et se prend pour un diable sorti de sa boîte, vociférant comme la pauvre Regan sous emprise de Satan, et vomissant ses psaumes sans prendre la peine de s’essuyer la bouche. Avec un tel laïus, je sens que la plupart d’entre vous a déjà pris ses jambes à son cou, et pourtant, ce premier album mérite clairement qu’on s’y attarde, car sa démarche artistique est fascinante, et son rendu assez troublant. En jouant le jeu de la pluralité, DEATHEPOCH parvient à synthétiser l’air du temps, et à nous imposer ses vues avec brio, marchant d’un pas assuré sur le fil du chaos, sans sombrer dans l’abime du Noise pur et dur.
J’en conviens sans hésitation, tout ça n’est ni mosh ni groovy, mais n’est pas non plus du BM tout-venant, avec automatismes faciles et ficelles grossières. Mais le tout ressemble à s’y méprendre à un documentaire très réaliste sur une époque trouble et généreuse en fléaux et autres catastrophes et massacres. Pour alléger la charge, le duo nous offre quand même sur un vieux plateau rouillé deux reprises assez bien senties, avec le classique « Bombenhagel » de SODOM, revu et corrigé à la sauce EBM/Thrash maladif, et le « Ave Sathanas » d’ACHERON, encore plus crade et glauque que l‘original. Tout ceci contient beaucoup de génocides (cinq en tout), ne cherche pas à séduire le plus grand dénominateur commun, mais ne se vautre pas non plus dans la fange du n’importe quoi sous prétexte de faire plus de bruit et d’être plus evil que les petits copains. Vous n’entendrez jamais les DEATHEPOCH couiner « Les Gondoles à Venise » ou « Made in Normandie », ils ne seraient jamais passé faire coucou aux Carpentier, mais au moins, ils ont la décence de proposer un album qui tient debout, malgré un handicap certain au départ. More noise !
Titres de l’album:
01. Abysmal Invocation I
02. Genocide I
03. Genocide II
04. Abysmal Invocation II
05. Genocide III
06. Genocide IV
07. Genocide V
08. Bombenhagel (SODOM cover)
09. Abysmal Invocation III
10. Ave Sathanas (ACHERON cover)
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