Nous devisions récemment avec un collègue de la presse écrite et néanmoins ami sur le statut un peu particulier des allemands d’ACCUSER. Apprenant que je m’attelais à la chronique de leur dernier album, l’ami en question se fendit d’une formule assez cocasse résumant à merveille son opinion sur l’œuvre du groupe, « ACCUSER, les éternels 21èmes des classements de 20 ». Au-delà de l’hilarité provoquée par son sens de l’à-propos, je fus illuminé par la pertinence de sa saillie verbale. Car il est certain qu’en presque trente-cinq ans de carrière au service du Thrash allemand, le combo de Siegen n’a jamais réussi à toucher du doigt la quintessence du style, devant souvent se contenter du titre peu enviable de second couteau aux moyens indéniables, mais aux possibilités limitées. Et en revenant dans les temps de ma prime jeunesse, je me souviens avoir loué les qualités de l’incontournable Who Dominates Who?, qui selon moi représentera toujours le pic de leur longue carrière, mais un pic datant de 1989…Et depuis cette date, ACCUSER a publié pas moins de neuf longue-durée, qui n’ont jamais réussi à leur faire monter les marches de la respectabilité, acquise plus ou moins avec le temps, le respect étant plus induit par la longévité du gang que par la qualité de ses prestations. Pourtant, j’étais encore là en 2016 pour parler de The Forlorn Divine, et il y a deux ans pour vous entretenir de The Mastery, arguant à chaque fois de la solidité de l’instrumentation et de la pauvreté de l’inspiration. Et en 2020, alors que le quatuor se permet enfin de baptiser un album de son propre nom, je suis encore là, et le constat risque d’être le même, une fois de plus.
Un simple coup d’œil à la bible The Metal Archives suffit à comprendre que mon avis est partagé par une large frange des fans de Thrash, et de Metal plus généralement. La moyenne de satisfaction des allemands frôle une note de 65/70 pour cent, ce qui est quand même assez faible pour un groupe de ce calibre. Mais il n’y a aucune réelle surprise à constater ce jugement un peu sévère, puisque la musique d’ACCUSER n’a jamais évolué d’un iota, si l’on met de côté des débuts hésitants et encore moins inspirés (la doublette The Conviction et Experimental Errors, médiocres), et des années 90 qui les ont vu expérimenter un peu dans le vide (l’intéressant The Repent, et le totalement foiré Reflections). Depuis la reformation officielle en 2008, Frank Thoms leader et seul membre originel depuis 1986 a resserré les rangs, et la formation du groupe n’a que peu bougé, avec une section rythmique inamovible depuis 2008 (Olli Fechner - batterie et Frank Kimpel - basse), mais Accuser célèbre le retour du soliste historique du groupe, René Schütz, dont la présence ici formalise le quatrième aller/retour, avec trois passages dans le groupe depuis 1987. Accuser est donc le premier album proposé par la paire Thoms/Schütz depuis le redémarrage Agitation en 2010, et cette nouvelle va sans doute réjouir les fans d’ACCUSER, heureux de voir revenir le soliste à la maison. Mais en dehors de cette anecdote somme toute importante, rien n’a changé chez les allemands, et leur Thrash est toujours aussi franc du collier, inspiré par l’Allemagne de la fin des années 80, et assez proche des derniers efforts de DESTRUCTION, mâtinés d’une fluidité typique de TESTAMENT.
Ce mélange des approches est sans doute la seule particularité d’ACCUSER, qui se complait depuis trop longtemps dans une philosophie générique, et qui refuse l’ouverture. Certes, le Thrash des cousins germains est agréable en oreilles, classique juste ce qu’il faut, méchamment bien rodé, mais il tourne parfois à vide, et se permet des atrocités dont Tom Angelripper était coutumier à une époque. C’est ainsi que pour un franc et massif « Misled Obedience », il nous faut nous farcir un ignoble « Be None the Wiser », qui rappelle les pires heures de « Remember The Fallen » de SODOM. A savoir que lorsque Frank et les siens jouent le jeu de la délicatesse, ils sont aussi fins qu’une choucroute proposée après une entrée de charcuterie, le tout accompagné d’une caisse de bière bon marché pour faire passer le tout. Cette pseudo ballade a tout d’une dick pic balancée sur Messenger à une pauvre femme pas forcément consentante, et sent le romantisme de chantier à plein nez. Heureusement, ACCUSER ne se répand que peu en effusions dramatiques, et consacre l’essentiel de ce métrage à du bourrage de pif en bonne et due forme, ce qui nous permet de ne pas sombrer dans les affres du baiser qui empeste le schnaps. Mais en parlant de métrage, le quatuor est une fois de plus tombé dans le piège de l’excès, à l’image de ses contemporains les plus célèbres, et n’a pu se contenter d’un album carré et concis, lâchant cinquante minutes de musique pour pas moins de douze morceaux. Ce qui est beaucoup trop au vu du peu d’ingéniosité insufflé à l’œuvre, et au bout d’une grosse demi-heure, l’organisme entame son processus de rejet, malgré un excellent mastering de l’artiste Dan Swanö.
Produit par Martin Buchwalter, Accuser est donc une galette honnête, et qui ramone parfois salement les naseaux. Ainsi, le lapidaire « Phantom Graves » ne fait pas de cadeau, et suggère un duo improbable entre DEATH ANGEL et KREATOR, tandis que le long et évolutif « Psychocision » égrène quelques accords en son clair de bon aloi. La voix de Frank n’a pas vieilli d’un mois, reste aussi linéaire et agressive que par le passé, et peut lasser au bout de quelques morceaux. Mais le guitariste/chanteur insuffle assez d’énergie à ses lignes de chant pour qu’on se sente concerné par son propos, et autant admettre que le groupe a trouvé quelques gimmicks accrocheurs pour maintenir notre attention. Ainsi, la guitare ludique en intro de « Temple of All » ne nous prépare pas au riff incroyablement redondant qui nous écrase les neurones, tandis que la rythmique martiale de « Lux in Tenebris » accentue encore plus l’oppression ambiante. ACCUSER a même le bon goût de nous proposer une reprise des magiques AGNOSTIC FRONT, via leur terrifiant « The Eliminator », qui entre les mains des allemands devient un classique instantané du Thrash des années 80. Certes, le côté Hardcore est gommé, et le chant pugnace de Roger Miret nous manque, mais la version est honnête, et a le mérite de relancer les débats. La fin de l’album n’apporte pas de modification majeure, restant dans des balises de logique dans la continuité, et si un ou deux morceaux auraient pu être laissés de côté pour ramener l’œuvre à une durée plus raisonnable, Accuser n’en reste pas moins une solide entrée dans la discographie des allemands. Pas de quoi terminer dans le Top 20 une fois encore, mais de quoi rester dans le peloton de 2020.
Titres de l’album:
01. Misled Obedience
02. Phantom Graves
03. Temple of All
04. Lux in Tenebris
05. Be None the Wiser
06. Rethink
07. Psychocision
08. Contamination
09. The Eliminator
10. Seven Lives
11. A Cycle's End
12. Urgent
Ils avaient collaboré avec les Krupps, aussi. À défaut d'être parmi les meilleurs dans un pays où la concurrence était relevée, ils étaient assez passionnés pour se reformer quand le revival Thrash est arrivé.
Chez Accuser, en période récente, c'est Demoniac qu'il faut écouter. Plus violent, sorte de Testament sous amphétamines, il est à mon humble avis le meilleur de ce que Thoms a produite depuis Who Dominates Who. Ah, si, le premeir album est aussi très bien, pas du tout techno-thrash, mais un bon disque de thrash allemand made in 80's.
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21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
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