Sympathique rencontre que celle de ce trio ukrainien qui nous offre en 2021 son premier longue-durée qui ne fait pourtant pas trainer les choses. Avec seulement sept morceaux pour moins de trente minutes, les résidents de Lviv jouent donc la concision, et présentent avec cet Aggression un plan assez clair, mais toutefois encore un peu léger pour défier les rois du champ de bataille old-school. Fondé en 2018 après avoir battu pavillon OVERBOUND pendant trois ans, les SURGICAL INVASION prônent donc des valeurs musicales classiques, et affirment immédiatement ne pas s’affilier à la politique ou à la religion. Un désir donc de politiquement correct pour une musique dans la moyenne, qui rappelle quelques sorties plus ou moins anecdotiques des années 80. Andre (chant/guitare), Alex (basse) et Misha (batterie), rappellent ainsi les seconds couteaux de la dernière vague Thrash des années 80, les KAZJUROL, HORDES OF TORMENT, FLAMES, et tous ces acteurs de l’ombre qui n’ont pas eu le temps de sortir de l’underground pour faire leurs preuves.
Le Thrash des ukrainiens, à défaut d’être fulgurant n’en reste pas moins séduisant dans son formalisme et sa souplesse, les trois jeunes musiciens usant de plans simples pour affirmer leurs positions. En totale autoproduction, ce premier album fait la part belle aux figures les plus imposées du genre, celles en vogue entre 1986 et 1989, et prône une franchise rythmique assez raisonnable. Le chant encore un peu timide d’Andre reste léger pour ce genre de performance, et ses riffs se montrent parfois assez lénifiants dans les mélodies (« Nuclear Death »), et si la rythmique turbine comme elle peut avec une basse qui claque en arrière-plan, le tout à un arrière-goût de déjà entendu sur la scène Russe d’il y a quelques décennies, lorsque les groupes de l’est commençaient à avoir des retours de leurs homologues américains les plus capés.
Ne vous y trompez pas, l’expérience est sympathique à défaut d’être inoubliable. Mais entre des breaks un peu téléphonés, des reprises un peu à la louche, et un son de cymbales qui vrille les tympans, on a du mal à rester accroché aux branches. SURGICAL INVASION présente pour le moment le visage d’un trio de collégiens du Thrash très appliqués, mais manquant désespérément d’ambition et de folie. On aime pourtant au détour d’une intro leur talent pour brosser des atmosphères plus confinées (« Never »), mais entre la répétitivité des motifs, le manque de démence pour faire décoller un tempo qui reste accroché à sa raison de croches, et cette voix qui peine à convaincre, ce premier album se classe juste sur la ligne de la moyenne sans essayer de s’en décoller.
Heureusement pour le fan éventuel, les titres sont courts et s’enchaînent rapidement. Ils bénéficient parfois de quelques arrangements malins qui cachent plus ou moins le manque de motivation (« My Religion »), mais si les trois compères avouent une fascination pour SODOM, KREATOR ou VIOLATOR, il leur manque encore le panache de ces trois références pour vraiment se faire une place sur la scène. Bien joué, proprement, bien agencé, calmement, ce premier album ne fera pas date dans l’histoire du Thrash old-school, malgré quelques bribes de rage qui ne sont pas sans rappeler le côté le plus MOTORHEAD de SODOM (« In Our Memories »).
Et alors qu’on attend désespérément une explosion finale, les SURGICAL INVASION restent collés à leur principe de gestion de la colère, et terminent leur effort comme ils l’avaient commencé (« Surgical Invasion » qui peut quand même prétendre au statut de mini hymne pour le groupe). Je ne cache pas qu’un peu plus de violence m’aurait convaincu, ou à la rigueur des mélodies plus prononcées et des cassures plus futées, mais en l’état, et malgré ses nombreux handicaps, Aggression reste une récréation amusante qui permet de patienter entre deux sorties plus conséquentes. Il va falloir ajouter du poivre les gars pour épicer tout ça, au risque de rester sur le buffet au rayon des mets « pas top, mais pas dégueulasses non plus ».
Titres de l’album:
01. Aggression
02. Red Terror
03. Nuclear Death
04. Never
05. My Religion
06. In Our Memories
07. Surgical Invasion
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