Je me dois de le reconnaître, je ne suis pas coutumier de la chose DBM. J’aime le BM pour sa crudité, sa violence, mais dès lors qu’il module et mélodise, je trouve son impact amoindri. Pourtant, les plus grands groupes du cru ont toujours trouvé le moyen d’injecter des harmonies dans leur agressivité fatale, et des albums comme Storm Of The Lights Bane restent pour moi des acmés de métissage entre noirceur de ténèbres et lumières blafardes.
Alors pourquoi ne pas se laisser séduire par les envolées vénéneuses d’un genre qui a érigé la beauté comme contrepoint parfait de la laideur, et s’obstine à trouver de la mélancolie dans le nihilisme et le refus de l’autre ?
Il me fallait donc prendre un exemple pour essayer d’entamer une thérapie de réconciliation, sans vraiment savoir si cet exemple allait être le bon.
Après tout, mes connaissances sur le sujet étant fort limitées, autant me laisser guider par le hasard et traiter du cas du projet AFRAID OF DESTINY, qui avec Agony nous offre donc son second longue-durée, quatre ans après Tears Of Solitude, qui comme vous vous en doutez, portait très bien son nom. L’agonie donc, celle proposée pendant près de cinquante minutes par R.F. (chant) et Adimere (instruments, composition, paroles), multi-instrumentiste qui depuis sa Démo 2013 a composé bon nombre d’œuvres, dont plusieurs splits, EP, et singles, disséminés sur quatre années.
Quelle est donc cette souffrance que le groupe/duo italien nous étale sur les huit morceaux de son second LP ? Une souffrance tangible, palpable, s’exprimant au travers de longues plages de solitude musicale romantico-morbide ? Une sècheresse de son se nourrissant de l’absence de larmes ? Des envolées synthétiques soutenues par une rythmique purement BM, mais plombées par des riffs noirs comme la nuit, avec en renfort quelques arrangements vénéneux et venteux, comme l’exige le style ?
Un peu tout ça à la fois, et surtout, une image d’Epinal qui correspond tout à fait à celle que l’on imagine dès lors qu’on raisonne en termes de Depressive Black Metal. Une douleur intérieure qui cogne sur les tempes, et qui ressurgit nuit après nuit, au point de former une lente et longue litanie de torture morale. Toutefois, les AFRAID OF DESTINY ne sont pas les plus extrêmes dans leur créneau, même si leur obstination à développer des plans qui s’étirent en longueur ne leur permet pas une liberté de mouvement et d’esprit totale. Lenteur de tempo, guitare qui se fixe en hypnotisme sur un mantra qui tourne en boucle pendant de longues secondes, voire minutes, et chant qui s’égosille du plus profond de son âme qui saigne, telle est l’explication de la peine personnelle selon Adimere, qui depuis le début de sa carrière n’a pas vraiment dévié de sa trajectoire initiale.
Personnaliser la souffrance en musique, mutiler la nostalgie de hurlements perçants, et donner au destin un tempo résigné, pour en exprimer toute l’inéluctabilité.
Dès lors, quel est l’intérêt majeur d’Agony, en tant qu’album de musique tout d’abord, et d’album de DBM à forte connotation mélodique ensuite ?
Son intérêt se cache surtout en cet équilibre qu’il a su nous offrir entre plainte cathartique et violence en écho. Equilibre qui se manifeste dans une opposition de couplets et breaks, qui manipulent les aspects les plus symptomatiques du BM, tout en les adaptant à un cadre bien précis.
On ne va pas se la jouer, la plupart du temps – lorsqu’on est hermétique au genre – tous les morceaux se ressemblent, et ont des airs de crise existentielle d’ado qui découvre que ses parents ne lui offriront pas le scooter de ses rêves pour son anniversaire. Les AFRAID OF DESTINY, sans non plus se montrer trop hétéroclites parviennent à varier les approches, sans pour autant dénaturer leur propos.
Le parangon de cette affirmation se cachant d’ailleurs dans les presque neuf minutes du majestueux et ample « Autumn Equinox », qui se rapproche d’un BM traditionnel et écorché, sans pour autant se départir des prétentions harmoniques dépressives inévitables.
D’un autre côté, l’extensible et épique « Rain, Scars, and the Climb » prouve que le créneau a bien plus à offrir que de longues complaintes stériles et contemplatives, ce que démontre à merveille son intro d’arpèges cristallins comme des gouttes de pluie sur la vitre d’une maison triste. Onze longues minutes de crescendo progressif, qui nous rappelle les plus grandes références du genre, et qui osent proposer quelque chose d’un peu différent, presque accrocheur dans ses motifs, et éminemment séduisant dans son interprétation.
Le talent d’Adimere pour composer des thèmes mémorisables est indéniable, et l’écho funèbre offert par les parties de chant de R.F. en contrepoint apportent cette touche de tristesse et de souffrance que des mélodies pourtant généreuses n’arrivent pas à apaiser.
Et lorsque la rythmique se veut plus appuyée et processionnelle, nous nous heurtons à un mur de résignation, construit des briques agencées de « Hatred Towards Myself », qui contredit tous les clichés de son appellation pour se frotter à un Doom introspectif et mélancolique, quoique proche d’une agonie létale.
Le diptyque « A Journey Into Nothingness » a largement de quoi contenter les fans de ses reflets positifs/négatifs, tandis que le voyage conclusif « Into The Darkness » nous baigne de ténèbres pourtant presque accueillantes, avec une fois encore de petits licks qui pénètrent l’âme pour la convaincre de la futilité de l’existence. Nuancier très intelligent qui de sa palette opposée nous fait plonger dans les abysses de l’auto-analyse et des scarifications émotionnelles, c’est surtout un titre qui rebondit sur des passages assez terrifiants de puissance, proche de l’Ambient le plus opaque, sans tomber dans le piège de l’errance instrumentale.
En conclusion, AFRAID OF DESTINY nous livre sur un plateau une excellente reprise du « Sweet Illness Of Mine » des LIFELOVER, pour un ultime écho Post-Wave adapté BM, nous laissant sur une impression douce-amère, qui finalement, aura été le fil conducteur d’un album décidément très pertinent.
Difficile de savoir si Agony attirera dans ses filets les réfractaires les plus assumés à la cause DBM, mais il a les armes pour prendre dans ses filets quelques cœurs perdus en quête d’absolution harmonique. En ne réfutant pas les principes les plus élémentaires du BM, mais en les transfigurant de mélodies inhérentes à son crédo, il parvient à faire avancer les choses, et surtout, à proposer des titres qui ne se contentent pas de rabâcher le sempiternel message de complaisance.
Ce qui en soi, est déjà une sacrée réussite.
Souffrir oui, mourir inévitablement, mais vivre aussi. Au moins un peu.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09