MOONREICH, qui nous avait habitués à une livraison tous les deux ou trois ans a cette fois pris son temps pour continuer son chemin sans trébucher sur sa propre réputation. Pas moins de cinq longues années de silence depuis la Fugue orchestrée en 2018, et qui nous avait une fois de plus laissés sur le bord de la route, hagards, les yeux vitreux et l’espoir en berne. Pourtant, le BM des français reste traditionnel, peaufiné, léché, mais suffisamment rugueux et âpre pour gâter le palais. Alors, pourquoi cette dépendance, et pourquoi cette souffrance à chaque retour du messie de l’ombre ? Tout simplement parce qu’il est l’un des plus précis et dangereux de sa génération.
Dans le fond et la forme, Amer respecte donc le cahier des charges inhérent à tout album qui se veut imperfectible. Loin du film homonyme d’Hélène Cattet et Bruno Forzani, et plus proche du goût d’un breuvage un peu agressif pour la gorge, ce cinquième du nom boucle douze années depuis la promulgation de la Loi Martiale, ce premier jet qui avait placé les parisiens sur la carte de la violence européenne.
Toujours épaulés par les Acteurs de l’Ombre, nos guides nous proposent donc une visite des nouveaux combles, destinés à terme à être transformés en labyrinthe de l’horreur et de la violence à grands coups de pelleteuse et autres engins d’excavation gigantesques. Avec cinq morceaux pour un cinquième album, MOONREICH joue la symbolique, mais aussi la parcimonie. Et si l’on retrouve ces longues évolutions que le groupe aime tant, le métrage resserré pourra frustrer quelques fans pointilleux sur les détails, qui auraient bien aimé quelques minutes de rallonge.
Mais la quantité importe peu face à la qualité.
Et en termes de qualité, Amer ne craint aucune concurrence, même si son propos est traditionnel. Du MOONREICH pour fan de MOONREICH, ce qui est déjà énorme, et cinq compositions fouillées, impeccablement produites pour sentir le charbon et le souffre. Riffs lancinants, voix écorchée à la brosse à métaux, basse ronde qui fait rebondir la grosse caisse, et structures globales ambitieuses. Amer continue donc sur la route empruntée il y a plus d’une dizaine d’années, à grands pas, mais sans perdre ses suiveurs. A l’image d’un pied piper de l’extrême qui guide les rats sur le chemin de l’outrance, Amer donne des indications, des grandes lignes, mais laisse aussi le libre arbitre indispensable pour les interpréter à notre manière. Un livre ouvert donc, aux nombreux passages vides, pour que l’auditeur puisse y écrire sa propre expérience de la douleur et du mal.
J’aurais beau jeu - et partie facile - de désigner l’homérique et désespéré « The Cave of Superstition » comme emblème de ce nouveau témoignage, et ce, pour différentes raisons. Sa durée d’abord, plus de treize minutes, mais aussi sa majesté, sa précision, son emphase, ses arrangements, ses quelques percussions tribales qui nous entraînent loin dans un monde fictif, ou plus simplement parce que ce titre final est l’archétype de chanson absolument inattaquable que seul le groupe peut signer. On se laisse déborder de tous les côtés par la grandiloquence du sujet, qui nous étouffe de ses proportions, comme on accepte d’avoir le vertige dans une gigantesque pièce haute de plafond et presque vide de décorations.
Glorifier ce titre est donc une évidence, et presque une obligation, mais occulter les quatre le précédent serait nier sa propre essence qui doit justement à l’évolution de l’album et l’empilage des chapitres. Ainsi, « Of Swine and Ecstasy » est l’ouverture parfaite, avec ses cordes synthétiques, son intro passée et jaunie qui évoque les réminiscences horrifiques des réalisateurs espagnols traumatisés par la période de dictature de Franco. Et si l’ambiance se durcit aussi rapidement qu’un regard après une interjection déplacée, le rythme n’en est pas moins martial et auto-piqué, avant de frôler l’hystérie et les blasts de folie. Parfaite reprise de contact, « Of Swine and Ecstasy » convoque les porcs à l’extase des sens, et trempe son groin dans la soue d’une existence qui n’en est plus que de nom.
« Amer », title-track offerte en cadeau à tous les impatients, est le prolongement idéal de cette orgie des sens, via son thème simple, redondant, mais explosif. Les années n’ont donc pas érodé la puissance du groupe, qui reste ce monolithe de savoir que les pays étrangers nous envient. Une saine colère, une attitude belliqueuse pour une fanfare de sons tournoyant dans la plus grande tradition d‘un Black Metal joué à la MARDUK, mais francisé pour épouser le velours des sièges de théâtre.
Loin des gimmicks faciles ou d’une réputation sulfureuse, MOONREICH se base sur ses acquis et son intelligence de jeu pour continuer de fédérer des âmes perdues. La multiplication des voix, l’empilement des pistes, les chœurs fournis et les cassures brutales font de ce cinquième album un nouveau piège pour les tympans, qui se remettront avec beaucoup de difficulté de « Where We Sink », morceau central qui nous plombe dans les eaux troubles du BM le plus cruel et véhément.
En définitive, il est sans doute possible de voir en cet album une transition entre avant-hier et demain. Sans le considérer comme le Best-Of idéal ou l’emblème d’une carrière, il est tout à fait possible de l’envisager comme le trait d’union entre l’expérience actuelle et l’impulsion de jeunesse, comme un souvenir qui relie le présent au passé.
Mais MOONREICH ne vit pas dans le passé, et s’oblige à avancer coûte que coûte, pour continuer à nous bercer de brutalité sourde et clinique, les poings en avant et le visage caché derrière un écran de fumée.
Titres de l’album:
01. Of Swine and Ecstasy
02. Amer
03. Where We Sink
04. Astral Jaws
05. The Cave of Superstition
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