J’ai toujours fait ce qu’Arno Strobl me demandait ou attendait de moi. J’ai toujours dit du bien de ses projets même lorsque j’avais des céphalées, j’ai toujours soutenu ses gouts douteux (surtout en matière d’hygiène), j’ai joué les rabatteurs convaincants dans les bars lorsque ses odeurs corporelles faisaient fuir la plus décatie des groupies, alors lorsque l’homme et l’artiste se rejoignent pour m’obliger à parler d’un groupe, je m’exécute sans discutailler. En l’occurrence, en le lisant me parler des américains d’OBSOLETE, j’ai immédiatement senti qu’il y avait anguille sous France Roche. « Tiens, écoute ça, ça devrait te plaire ». L’homme me sait violent par intermittence, mais surtout porté sur une hybridation pas du tout contre nature unissant la débauche sonore du Death et la violence chaude du Thrash. Et l’écoute d’Animate-Isolate m’a permis de me replonger dans ma jeunesse perdue, et de retrouver les sensations éprouvées en découvrant des légendes comme INCUBUS, SADUS, ou DEMOLITION HAMMER. Alors, comment ne pas être gré au bonhomme de m’avoir aiguillé une fois de plus sur la bonne piste, celle de la bestialité intelligente, mais vraiment assommante ?
Formé on-ne-sait-quand à Minneapolis, OBSOLETE est un quatuor d’esthètes qui jusqu’à présent s’était montré assez discret. Un simple EP il y a trois ans comme carte de visite bruyante (The Rumored Death of Atlas, pire qu’un pin’s parlant TF1 de l’époque Lagaf’), mais un longue-durée complet en 2021 pour affirmer les positions et faire exploser le potentiel. Les musiciens affichent pour certain un CV complet, avec des implications dans AUSTRALIS, GRAND DEMISE OF CIVILIZATION, THE BODY BENEATH, CLIMACTIC, AMBASSADOR GUN, DYING EUFORIA, FOR BLOOD, INVIDIOSUS, BURY THE HATCHET, GROUNDED, HELLEN KILLER, KWYJIBO, PHYLLIS CAMPBELL, SEPHUS, SI6KS, SICK PUPPET, SOLACE IN ASHES, et SONS OF MIDWESTERN DARKNESS (pour le batteur Pat Ruhland) ou AUSTRALIS, PESTIFERE, SUNLESS, DREAD, ENSHRINED, THE BODY BENEATH, DRONA, et FALSE (pour le chanteur/guitariste Lucas Scott). Le bassiste Dan Lee et le guitariste Scott Fryxell restent plus discrets sur leur passif, mais les quatre ensembles dégagent une énergie de tous les diables, osant même taquiner un Techno-Thrash Death de premier ordre, challenge difficile à relever depuis les premiers cris de SADUS.
La sauvagerie c’est bien, évidemment, surtout quand on pratique ce genre de musique. Mais la sauvagerie brute, c’est trop facile. N’importe qui est capable de lâcher des riffs maousses sur fond de décontraction rythmique sans happer l’attention de l’auditeur. Pour devenir une référence dans le genre, il faut composer, construire, accrocher les tympans et écorcher la peau, pour laisser un souvenir durable dans la mémoire. De ce point de vue-là, les américains sont les rois de Zanzibar. Leurs licks sont précis, incroyablement saccadés, sonnent parfois accélérés au mixage, mais leurs agencement sont roublards, et leurs écrasements vraiment suffocants. A titre d’exemple, le bref et lapidaire « Old Horizon » contient plus d’idées pertinentes en trois minutes que la discographie complète de la majorité des thrasheurs nostalgiques de ces dix dernières années. Cassures, breaks improbables, équilibrisme rythmique stupéfiant, pour une sonate en roue arrière majeure, et une basse qui s’impose au premier plan comme celle de Steve DiGiorgio.
« Still » en ouverture, joue le tempo supersonique que les frangins Howard nous claquaient sur Serpent Temptation. Sauf que Moyses et Howard n’ont jamais sonné aussi roublard que les OBSOLETE, ni aussi créatifs et dissonants. « The Atrophy of Will » appuie moins là où ça fait mal, mais continue l’entreprise de démolition insidieuse à grands coups de soli inspirés et d’à-coups rythmiques imprévisibles. « The Slough » se la joue dissonant et rapproche encore plus le truc d’un techno à la CORONER devenu complètement barge après avoir écouté le premier album de DSK. « Silent Freeway » impose définitivement les riffs joués à la vitesse de la lumière, au risque de friser le grotesque, mais en s’appuyant sur un batteur qui ne connaît pas le sens des mots « mesure » et « retenue ». « Stumbling and Listless » opte pour le contretemps sadique, et répand ses effluves au moins jusqu’en Louisiane. Alors, les informations s’accumulent, les rondes de basse parviennent à réparer plus ou moins les neurones, les passages faussement mélodiques nous entraînent dans le piège préparé de longue-date, et on finit par se rendre compte que ces mini-pièces de bœuf sont beaucoup plus denses qu’il n’y paraît.
On peut écouter les neuf morceaux d’un trait, et y revenir pour tenter d’en appréhender toute la richesse dans la débauche. Car loin d’un massacre sommaire ou d’une boucherie clinique, Animate-Isolate est une œuvre intelligente, élaborée, sournoise qui accumule les prouesses comme d’autres les blagues Death de potache. Je le concède, la somme d’informations délivrée en un temps record a de quoi donner le tournis, mais le génie de plaquer un lick purement Hard-Rock sur l’entame de « The Fog » tient du sublime, et rapproche CONTROL DENIED d’un Black Metal pas assumé du tout.
Tout ça ressemble à une hagiographie, mais le groupe la mérite amplement. Dans un océan de non-créativité lénifiant, les américains nagent à contre-courant, et transforment la nostalgie passive en passion active. Certes, on morfle méchamment, certes quelques dents tombent au passage, mais cette bagarre à ce pouvoir fascinant de la curiosité morbide qui nous pousse à regarder un accident alors même que l’idée nous révulse. Entre SADUS, CORONER, ATHEIST, DSK et une poignée d’autres aussi malins et cultivés, les OBSOLETE semblent en effet d’une autre époque, mais font la nique aux petits jeunes qui font montre de bien moins d’enthousiasme dans la luxure brutale.
Merci monsieur Strobl, et à bientôt pour de nouvelles découvertes essentielles. Et bonjour à Regina, qui n’a pas oublié de me préciser que tu devrais couper tes ongles de pieds quand tu la ratisses.
Titres de l’album:
01. Still
02. The Atrophy of Will
03. The Slough
04. Old Horizon
05. Silent Freeway
06. Stumbling and Listless
07. The Fog
08. Callousness of Soul
09. Intercostal
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