L'Amérique et ses grands espaces, mais aussi l'Amérique et sa culture musicale, qui n'en peut plus de puiser dans ses origines de quoi aller de l'avant. Il est d'usage de constater que les groupes estampillés « vintage » font loi depuis quelques années, certains se rattachant au créneau avec bonheur, d'autres tentant sans gloire de reproduire les sons d'origine sans vraiment y parvenir, autrement que par mimétisme. Mais l'art de la nostalgie n'est pas donné à tout le monde, et les options se resserrent au moment de faire le bon choix. Opter pour une approche humble et réaliste, ou au contraire foncer tête baissée et s'approprier l'exercice au point de donner l'illusion d'avoir été cryogénisé depuis 1986/1987, genre Hibernatus Hard-Rock avec une bonne coupe de cheveux à la place d'une fière moustache. La question et la problématique étant toujours les mêmes, il convient de ne pas se laisser aveugler par l'enthousiasme et faire preuve d'objectivité au moment de juger les groupes...Ainsi, dans quelle catégorie ranger les héros flamboyants de JESSIKILL, qui depuis 2012 s'évertuent à retrouver l'attitude digne des scènes Californienne et New-yorkaise d'il y a trois décennies et plus...Face à la débauche d'énergie et la morgue affichée par ce premier véritable album, le doute n'est pas permis, et il devient évident que ce quatuor d'enragés fait assurément partie de la seconde catégorie, mais est-ce pour autant que leur musique se veut digne d'intérêt, et voit un peu plus loin que le bout de ses guitares, certainement cramoisies d'être maniées avec autant de rage et de dextérité ? Et après avoir encaissé le choc de Metal Knights, EP publié il y a maintenant deux ans à compte d'auteur, on durcit à nouveaux nos abdos auditifs pour pouvoir supporter le choc asséné par ce premier longue durée, Another World, qui nous entraîne en effet dans les arcanes d'un passé que les musiciens nationaux ont du mal à occulter... à condition que là soit leur intention évidemment...
Haut en couleurs, ce quartet (Jessica Marie Espinoza – chant, Arturo « Knight » Alvarado – basse/chant, Jyro Alejo – guitares et Alan Cisneros – batterie) ne donne pas vraiment dans la demi-mesure, et semble complètement conscient de ses moyens et qualités. Moyens et qualités déjà fort remarqués par certains webzines à l'objectivité substituée par un enthousiasme débridé, n'hésitant pas à parler d'un « Yngwie Malmsteen coincé dans un combo obsédé par IRON MAIDEN et DIO, et dominé de la voix puissante et lyrique de la « meilleure vocaliste actuelle » », sans chercher à vérifier la pertinence de tels dires, qui font attendre le combo au tournant au moment même où il ose enfin se lâcher sur un LP, prenant l'épreuve tant redoutée à bras le corps sans se poser trop de question. S'il est certain que le niveau instrumental des originaires de San Antonio, Texas, est notable et redoutable, si leurs compositions sont marquées au fer rouge d'eighties ayant découlé sur des nineties n'hésitant pas à appuyer sur la grandiloquence pour s'imposer, il faut quand même admettre que tout ça a un léger air de déjà entendu, et que le tout rappelle une adaptation d'un RAINBOW grandiloquent s'incrustant sur la scène US qui suivit sa séparation, le tout agrémenté des shreds et autres figures de style de l'écurie Mike Varney. Alors, bien sûr, le tout se déguste avec un appétit féroce, et fait preuve d'une implication totale, s'inscrivant très logiquement dans la continuité d'un esprit de fascination des grandes figures du passé, ne cherchant pas vraiment à transcender ses influences d'une touche personnelle histoire de ne pas sombrer dans l'exercice de style admirable, mais pas forcément indispensable à moyen terme. Si l'on sent des références inévitables dès les premières mesures, il est certain que les JESSIKILL avec Another World frappent un grand coup, et se permettent dans un même élan de suggérer des accointances avec le JUDAS PRIEST le plus puissant, le MAIDEN le plus imposant, le DIO le plus métallisant, mais révèle aussi des traces de passions cachées avec certaines formations nationales moins exposées, comme les PHANTOM BLUE, les RACER X, et autres chantres d'une technique poussée appliquée à un principe Heavy Metal à tendance Thrash tout à fait déchaîné.
Certes, le pedigree impressionnant des musiciens leur permet de nous proposer une œuvre en tous points « exagérée », dans le sens le plus littéral du terme, même dans les instants les plus modulés, leur autorisant quelques incartades sur le terrain de la power-ballad enflammée. Et si nous noterons pour la bonne bouche que la vocaliste Jessica Marie Espinoza participa en son temps au télé-crochet The Voice, et qu'elle fut membre des HESSLER de Chicago (pour les connaisseurs), ou que Jyro Alejo, couronné meilleur guitariste d'Alamo City tomba dans les bonnes grâces de figures emblématiques de la guitare comme Michael Angelo Batio, et obtint un deal avec Jackson lui permettant de figurer en bonne place au NAMM, et de traîner en compagnie de Mike Portnoy des WINERY DOGS, mais aussi de Dave Ellefson, tout ceci ne doit pas faire oublier qu'un album se juge selon son contenu, et non sur consultation du CV de ses membres. Et si cette technique imparable est utilisée souvent à bon escient, elle ne doit pas faire oublier que lorsqu'on combo évoque à longueur de sillons des références déjà largement célébrés, c'est que l'air d'avant leur sied mieux que celui du temps. En évoquant en plus d'une occasion des leaders de saison, Another World ne permet pas totalement de se faire une raison, et nous suggère en de multiples occurrences des souvenirs d'enfance, ceux des STRATOVARIUS et autres chantres d'un Metal progressif et hautement mélodique (« Midnight Rush »), ou d'autres, plus anciens, révélateurs d'une passe d'armes entre Heavy un peu fatigué et Thrash survolté (« Dead Of Night », impeccable, mais fortement connoté). Sans vraiment choisir d'autre camp que celui d'un Metal mordant et constamment agressif, les JESSIKILL foncent bille en tête en accumulant les prouesses d'exécution, tâtant parfois d'une fausse subtilité à la MAIDEN pour mieux s'imposer, renforçant les tics de Steve Harris d'une méchanceté héritée d'un JUDAS PRIEST toujours remonté (« Save Me », même les cris suraigus empruntés à Rob sont prévus).
Manipulant l'ambivalence avec beaucoup de prudence, les texans osent parfois sortir de leur champ d'action pour accentuer l'émotion, mais reviennent vite sur le terrain de la puissance pour ne pas manquer d'aisance (« Run And Hide », envoûtant et évolutif, à défaut d'être original ou transgressif), mais c'est souvent sur le terrain Heavy qu'ils ont les nerfs qui lâchent, bien qu'ils parviennent toujours à se ressaisir pour imposer des passages furieusement Thrash en chausse-pied (« Another World », archétype de morceau viril qui dramatise le tout-venant pour faire passer un message trop classique, mais qui heureusement se voit renforcé de parties musclées et dégoulinantes de démonstration guitaristique coulée). Sans jamais relâcher la pression, le quatuor oscille entre Heavy puissant et Thrash fracassant, tout en empruntant parfois des voies moins faciles pour trouver une sortie plus gracile (« The Beast », entonné en duo avec Arturo « Knight » Alvarado à la voix grave et imposante qui sied admirablement bien à ce genre de figure évolutive et opératique), mais la plupart du temps la route est bien tracée et le chemin un peu difficile à arpenter d'autant plus que Jessica Marie Espinoza n'hésite jamais à en rajouter dans le vibrato emphatique et les injonctions en hurlements typiques mais un poil hystériques. L'équilibre n'est donc pas à l'ordre du jour, et il faut frapper fort et vite, et de ce côté-là, le cahier des charges est bien rempli, même si les morceaux souffrent d'un remplissage les obligeant à rallonger le message (« Give It All »).
Il est néanmoins difficile de ne pas prendre en affection ces trublions, qui ont endossé un costume taillé sur mesure, et qui assument leurs déviances et leurs penchants à l'obligeance, sans tenir compte d'une quelconque sobriété de ton. Tout ceci est à peu près aussi subtil qu'un clinic d'Yngwie Malmsteen reprenant du Paganini en compagnie de Ronnie James Dio, sous l'oeil subjugué de Timo Tolkki, arrangeant le tout à la sauce Thrash d'il y a trente ans histoire de pimenter un peu l'enseignement. Mais de cette démesure totale naît une fascination fatale, et si tous les clichés sont recensés, tous les clins d’œil annotés, Another World de sa naïveté doublée d'une confiance aveuglée est un album qui marque et impressionne de son refus de l'économie, même si les projecteurs se braquent souvent sur les individualités au détriment de la cohésion d'ensemble.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09