Apostasie (nf, du latin apostasia, abandon) :
Le tout est donc affaire de renoncement, qu’il soit philosophique, éthique ou religieux. C’est donc ainsi que les MEMORIAL ont choisi d’intituler ce qui semble être leur premier longue durée, et qui en dit long sur leur philosophie et leurs intentions.
Ce qui est certain par contre, c’est qu’ils n’ont pas renoncé à pratiquer une forme très crue de Hardcore, à la lisière du Blackened Core, et qui empiète d’ailleurs en plus d’une occasion sur ses plates-bandes carbonisées.
Mais glissons donc sur le continent Américain pour nous rendre au Chili, à Santiago plus précisément pour y faire la rencontre d’un groupe vraiment noir et véhément, qui expose ses vues brutales au travers d’un médium impitoyable.
Les MEMORIAL évoluent donc sous la forme d’un quintette (Nicolas Arcos, Jorsh Vasquez, Diego Romero, Francisco Millan G et Guillermo Belmar), avouent pratiquer une forme très extrême de Punk Hardcore qui en effet ne se contente pas de rythmiques lapidaires sur fond de riffs éclairs, mais qui le teintent d’inflexions sombres pour se rapprocher d’une version très personnelle et subtilement allégée de RAMLORD, YOUNG AND THE WAY et autres HEXIS, tout en gardant une approche décalée leur permettant quelques incartades en terrain Doom, Sludge ou même Hardcore pur sans craindre la comparaison.
De fait, Apostasia, s’il renonce de son titre à toute appartenance et se veut agnostique de style et de ligne de conduite, se pose quand même sur plusieurs branches de l’arbre du Metal extrême, puisque le Hardcore sait s’y transformer en Post Metal vraiment noir et désespéré (« Teoría de la Memoria », lourd, glauque, impénétrable, et lancinant comme une litanie funèbre, avant d’exploser d’une rage à la NEUROSIS/WORLD NARCOSIS).
De la variété de ton donc, mais aussi une belle cohésion tout sauf nihiliste, puisque le quintette y prête allégeance à une forme très poussée d’agression sonore à laquelle il s’accroche comme un condamné à sa corde.
Pas vraiment gai, ni dans le fond, ni dans la forme, hautement abrasif, ce LP est une sorte de longue procession qui oblige l’homme à faire face à ses démons, et à affronter son individualité pour la confronter à un concept de globalité humaniste qui part à la dérive.
Pour ce faire, le groupe peut s’appuyer sur un instrumental très travaillé, mouvant de concert les arpèges acides et les riffs solides, le tout cimenté par une rythmique évolutive et à l’écho caverneux, et par un chant vraiment troublant de rugosité. Pesanteurs, dissonances, accélérations subites, toutes les formes de déstabilisation sont éprouvées pour vous rendre la situation encore plus inconfortable, sans céder un pouce de terrain à une trop grande liberté de composition.
Certains morceaux osent quand même l’évolution dans la logique, à l’instar de ce terrifiant « Bastardos Bajo un Cielo en Llamas » qui tente même la syncope de guitare qu’il prend un malin plaisir à exploser d’un Crust/D-beat vraiment terrassant, tout en lâchant quelques pirouettes de guitares concentriques qui donnent le vertige, avant de tomber dans un crevasse de percussions tribales lourdes et à la diffusion caverneuse.
Morceaux longs, qui prennent leur temps pour instaurer une ambiance en chape de plomb, et qui parfois se veulent jeu de question/réponse à quelques minutes d’intervalle (« Antagonistas I » et « Antagonistas II », le premier se la jouant Post Black hardcorisé aux blasts tétanisés, le second jouant le jeu d’un Loudcore vraiment exhorté d’une voix écorchée qui semble expirer d’un dernier soupir ensanglanté).
Rester accrocheur tout en suggérant la terreur d’une musique poisseuse et souffreteuse, tel est l’art consommé des Chiliens qui ne reculent devant rien pour choquer, provoquer, avec une intelligence nuancée.
Nous nous voyons même gratifiés d’une bordée de cordes acoustiques à l’empreinte fantomatique (« Espejismos », sorte d’apaisement en trompe l’œil reposant sur une mélodie hantée, comme émanant d’une vieille église condamnée), avant que le Néo Crust ne reprenne ses droits sur l’uppercut « Desatar, Derribar, Contemplar », digne des meilleures estocades scandinaves du style.
En tant que conclusion tout sauf définitive, « Cautivos » se propose de reprendre tous les arguments déjà énoncés pour les pousser à une sorte de paroxysme, accélérant le tempo pour mieux le briser tout de go, laissant même une basse au dos rond nous faire glisser sur des riffs catchy et propulsés.
Une forme très aboutie de Crossover multiple, qui ose mélanger la rudesse du Hardcore/D-beat à la fronde d’un Post Black tout sauf expérimental, en associant des guitares recentrées et empaquetées à des mélodies amères et tétanisées.
Un cocktail pas vraiment rafraichissant, mais totalement adapté au besoin d’enivrement que ce monde en perdition impose.
De la brutalité, du désespoir mais aussi du rationalisme étudié pour un album qui propose beaucoup de choses, et qui les agence d’une façon très futée, sans perdre de sa puissance ou de sa spontanéité.
MEMORIAL propose donc via Apostasia un condensé de ce le Hardcore moderne peut proposer de plus opacifié, sans sacrifier la puissance à la nuance trop poussée.
Une façon d’admettre l’adversité tout en continuant de s’y opposer. Finalement, ils n’ont rien abandonné, sauf les solutions faciles et éculées.
Mais leur Hardcore assombri est sans doute la meilleure preuve que leur philosophie est encore active et s’apparente même à une doctrine à laquelle on adhère d’une voix vive.
Une dichotomie en somme…
Titres de l'album:
Un report ? Je crois que j’y reviendrai l’an prochain mais deux jours afin de mieux profiter. J’en connais qui ont du moins apprécier le camping avec l’orage du dernier soir
16/05/2025, 06:52
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11