Lorsqu’on parle de Metal finlandais depuis quelques années, on fait plus volontiers allusion à une fascination pour le passé qu’à une recherche de sonorités nouvelles. Les pays du nord de l’Europe se sont donc fait une spécialité de la nostalgie très en vogue dans un monde avide de recyclage, ce qui ne veut pourtant pas dire que tous les musiciens du froid ont pris le train en marche, abandonnant leur valise d’ambitions sur le quai de la gare. Prenons un exemple concret, en l’occurrence celui d’ANTIPOPE, qui de son nom fait presque référence à un LP de PRIMUS, sans que la corrélation soit totalement anecdotique. Bien sûr, la musique des deux groupes n’a rien en commun, mais ils partagent pourtant cet esprit d’innovation, cette envie d’aller plus loin qu’une simple relecture efficace et polie. Et si les trois tarés américains se sont fait un nom en provocant la fusion la moins consensuelle, les instrumentistes finnois eux, se permettent de mélanger les époques et les styles, au point d’avoir créé le leur propre. Fondé en 2004 du côté d’Oulu, ANTIPOPE est en quelque sorte l’archétype de groupe totalement inclassable, extrême mais pas forcément brutal, Progressif, mais humble dans sa démarche, Heavy, mais pas totalement formel, et finalement, unique en son genre. Un genre que le groupe a affiné au cours des années, au travers de quatre albums tout aussi surprenants qu’efficaces, avec en signal de départ un Desert publié en 2010 qui à l’époque, naviguait dans des eaux un peu différentes. Certes, ce premier longue-durée intervenait six ans après le premier EP, Scorched Heavens, EP qui semblait indiquer que les finlandais n’avaient pas complètement renoncé à des inclinaisons BM typiques de leur situation géographique. Mais à l’image d’un PARADISE LOST ou d’un SAMAEL, ANTIPOPE a dompté ses instincts les plus belliqueux pour proposer à son public autre chose qu’une déflagration misanthrope, pour aujourd’hui se retrouver bien seul dans sa catégorie, et pour cause : il en est le seul représentant.
Apostle of Infinite Joy est donc le cinquième album du groupe (Mikko Myllykangas - guitare/chant, et seul membre d’origine, Tuska E. - batterie, Antti J. Karjalainen - guitare et Joni Tauriainen - basse, depuis l’année dernière), rompant ainsi les trois années de silence consécutives à la publication de Denial / Survival en 2017. Les réminiscences de ce quatrième album sont donc encore bien présentes sur ce cinquième chapitre, qui sans dévier de sa trajectoire, se permet l’adjonction de nouveaux éléments. La musique des finnois est ainsi de plus en plus difficile à cerner, mais de plus en plus facile à apprécier. Pour optimiser son potentiel de séduction, il convient de la voir comme un Metal extrême très progressif et évolutif, ce que la durée des morceaux aide à comprendre assez vite. Plus prosaïquement, et pour les néophytes, l’art d’ANTIPOPE réside dans une combinaison de plusieurs facteurs/époques, pour s’extirper d’une condition un peu trop figée, et s’ouvrir des possibilités infinies. Ainsi, en se référant au Heavy Metal allemand des années 80, au Metal extrême nordique des années 90 (spécialement le Néo-Death et le BM suédois), mais aussi au progressif un peu Dark des SAMAEL et autres PARADISE LOST, les finlandais parviennent à tisser une toile étrange, sombre mais éclairée par des interventions lumineuses, des refrains harmonieux, sans perdre une once de puissance dans le rendu final. Nous en avons une démonstration emphatique sur le processionnel « Apostle of Infinite Joy », qui parvient dans un même élan à réconcilier l’emphase du PARADISE LOST de la grande époque d’Icon et le MAIDEN le plus évolutif, sans copier l’un ou l’autre, mais en mettant en application leurs enseignements. Le tout est corsé d’arrangements légèrement Folk sur les bords, fondus dans des nappes de claviers et de chœurs nimbant le tout d’un mystère assez épais.
Pour faire plus simple et synthétique, les sites référentiels préfèrent cacher la réelle identité du groupe derrière le paravent d’une dénomination générique « Progressive/Gothic/Industrial Metal ». Pas forcément fausse, cette généralité laisse pourtant passer de petits mensonges, puisque la musique d’Apostle of Infinite Joy n’a pas grand-chose à voir avec l’Industriel, si ce ne sont quelques petites répétitions/itérations qui rappellent l’aspect cyclique du genre. En allant au but en sans chercher à forcément cataloguer les finlandais, autant reconnaître immédiatement leur propension à rendre l’extrême plus évolutif et intuitif. Ainsi, l’entame « Harbringer of Dawn » n’est pas sans rappeler parfois les finesses d’un TOOL du début des années 2000, avec des accès de fureur énormes. Ne se reposant que très rarement sur des riffs bateau et évidents, les finnois nous proposent ainsi une dualité fascinante entre extrême ample et souvenirs seventies assez prononcés, sans vraiment citer leurs sources, mais s’abreuvant à celle d’une musique affranchie, complexe, et pourtant, d’une beauté simple et abordable. On apprécie particulièrement le travail des guitares qui s’imprègnent de l’esprit Art/Post-Rock sans en embrasser la prétention, et le seul écueil pour les réfractaires restera ce chant un peu atypique, rauque et limite, qui peut parfois dérouter. Mais en utilisant leurs instruments au maximum de leurs possibilités sonores - et non techniques bien que les musiciens aient un niveau assez époustouflant - en travaillant leurs intros et transitions, en développant des idées sinon novatrices, mais au moins plus osées que la moyenne (le BM spatial et ésotérique de « Natural Born Heretic » qui trahit des origines noires et poisseuses), le groupe parvient à dessiner les contours d’un univers très personnel, que des références clairement mentionnées ne permettraient pas de préciser.
En quarante-quatre minutes, ANTIPOPE résume son passé, assume son présent et anticipe son avenir, variant les options tout en resserrant l’étau de la violence (« Red Goddess », du Thrash, du Death, du Progressif, du Black, le tout arrangé à une sauce mélodique enivrante), s’autorisant parfois des incartades étranges en mélodies biaisées et rythmique tordues (« Venereal Ritual for Dispersion and Reintegration of the Soul » qui rappelle de loin les miraculeux VIRUS), et terminent même leur effort sur une dernière preuve d’illogisme flagrante (« 0=2 », intro Post-Rock pour développé/couché surpuissant), faisant de ce cinquième album un manifeste libertaire refusant les contraintes et autres règles imposées. Parfait d’équilibre entre mélodie, chaos et culot, Apostle of Infinite Joy est une curiosité dans le paysage musical actuel, et l’assertion définitive de la naissance d’un style qui en appelle autant à la mélancolie de JOY DIVISION qu’à la cruauté du BM scandinave. Un ailleurs, autre chose, et une façon d’éviter les poncifs actuels trop envahissants de leur conformisme prévisible et pénible.
Titres de l’album :
01. Harbringer of Dawn
02. Natural Born Heretic
03. Intoxicating Darkness
04. Apostle of Infinite Joy
05. Red Goddess
06. Venereal Ritual for Dispersion and Reintegration of the Soul
07. Serpent of Old
08. 0=2
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