Nous sommes samedi aujourd’hui, et malgré les manifestations du 1er mai, les gilets jaunes sont encore de sortie. Depuis longtemps, et au moins mai 68 pour être précis, nous n’avions pas assisté à une telle défiance populaire envers le pouvoir en place, qui subit l’ire et le courroux d’un peuple qui refuse de rester à genoux. Il faut dire que si en France, la situation est très préoccupante, elle est sans doute moins alarmiste que le marasme qui peut régner en Italie, en Espagne ou en Grèce, pays qui ont tous à des degrés divers subi la dure loi de la politique ultralibéraliste menée depuis la fin des années 90. Ajoutez à cela un président américain qui plastronne de sa propre incompétence et qui veut enfermer les mexicains dans un zoo de béton, un président russe qui n’hésite pas à montrer les dents en chassant l’ours, une situation explosive en Europe de l’est, un dictateur nord-coréen qui se prend pour le docteur Folamour, un nouveau führer brésilien prêt à sonner la charge, et la montée des extrêmes un peu partout, et vous obtenez une ambiance de fin du monde qui laisse pour le moins songeur, et surtout, légèrement paranoïaque. Sans oublier la recrudescence du racisme ambiant et populiste, un sexisme qui sous-couvert de mesures d’équité prend la forme d’une haine et d’un mépris larvés encore plus insupportables, une église catholique qui croule sous le poids des scandales, des stigmatisations religieuses qui confondent terroristes et croyants pacifistes, et il ne reste que peu d’espoir à placer en une humanité qui semble avoir déjà choisi la fin de sa propre histoire. C’est un peu ce constat que dressent les allemands de NO SUN RISES sur leur premier album, eux qui justement se battent depuis des années en bon activistes qu’ils sont, luttant contre l’homophobie, la xénophobie, et toutes les phobies injustifiées au travers d’un médium musical qui ne prend pas plus de gant que le message oral…
NO SUN RISES, ce sont donc cinq musiciens de Münster / Bielefeld / Hamburg (Jonas – chant, Timo & Gerrit – guitares, Karl – basse et Justin – batterie), anciens UNREST, IRRLICHT, et SOME ARE MORE EQUAL, qui depuis quelques années se sont réunis pour formaliser leur anarchisme d’une façon plus artistique que de simples slogans bombés sur des murs blêmes. Ayant commencé leur carrière sous des auspices plus Crust et D-Beat, avant de bifurquer suite à des changements de line-up (nouveau bassiste, support d’un second guitariste), NO SUN RISES n’a pas foncièrement abandonné ses principes de départ, mais les a adaptés à de nouvelles ambitions plus musicales, mélodiques, pour se rapprocher d’une forme très personnelle de Blackened Crust progressif, d’ailleurs plus proche du Post Hardcore des années 90 qu’on aurait pu s’en douter au départ. Présentant depuis le mois d’avril son premier longue-durée, après une démo et un split LP partagé avec les DYSANIA, le groupe est donc aujourd’hui maître de son destin, et nous le prouve avec six longs morceaux, exploitant toutes les possibilités extrêmes à disposition. Difficile donc de catégoriser le quintet autrement qu’en écoutant son art, et forts de capacités indiscutables, les allemands en profitent pour nous offrir un panel assez large, susceptible d’intéresser tous les amateurs de musique ouverte et assez culottée pour ne pas lasser. Disponible en vinyle et numérique chez plusieurs labels différents (Alerta Antifascista Records, Nothing to Harvest Records, Maniyax Records et Shove Records pour ceux que ça intéresse), Ascent/Decay n’est rien de moins qu’un constat d’échec humain sur fond de réussite artistique totale, puisque ce premier LP se permet de tutoyer le NEUROSIS des années Souls at Zero/Enemy of the Sun tout en donnant l’accolade à la vague Blackgaze de ces dix dernières années, sans en adopter les tics les plus irritants.
Ici, point de contemplation gratuite, point d’errance harmonique à base de minimalisme répété à l’envi, mais des morceaux structurés, aux ambiances diverses mais partageant ce même dégoût de la société qui laisse ses miséreux s’enfoncer dans les tourments de la douleur, et sa nature mourir sous les incendies du capitalisme et du consumérisme. Avec une intro en hors d’œuvre, Ascent/Decay peut donc se reposer sur cinq véritables titres, dont aucun ne trébuche sous la barre des cinq minutes, le dernier s’autorisant même la liberté d’un quart d’heure bien tassé. Mais très intelligents, les musiciens ont évité la redondance, et s’appuient sur des guitares volubiles et versatiles, qui manient et distillent tout aussi bien les riffs Raw Black que les arpèges Shoegaze, tout en admettant des accointances sévères avec les tapis de son du Post Hardcore le plus puissant. D’ailleurs, les plus distraits ou dissipés ne manqueront pas de s’arrêter sur l’entame « Reproduktionismus », qui après une longue introduction à la NEUROSIS s’affole d’un Black très sec et nerveux, pas si éloigné que ça des premiers hivers rudes scandinaves et norvégiens. Un beau mélange de tendances, pour une musique brutale et froide, qui hurle son désespoir dans l’écho du vide mondial, espérant que les boucles harmoniques finiront par retenir l’attention. Celle-ci est pourtant assurée par le chant très Scott Kelly de Jonas, qui s’époumone comme un beau diable tout en acceptant le silence, histoire de permettre à des breaks très nuancés de diluer le propos sans l’édulcorer. Cette méthode allemande est un peu la jonction entre l’Europe du nord et l’Europe centrale, avec cette façon très franche d’insérer la mélodie épurée dans un contexte de brutalité crue, et le résultat est en tout point probant, et largement à la hauteur de la philosophie humaniste.
Une lecture linéaire et chronologique n’ayant aucun intérêt, je vous renvoie à l’album pour en comprendre les méandres. Sachez simplement que le groupe n’hésite jamais à provoquer les ténèbres les plus insondables pour soudainement les illuminer d’une rage non contenue (« Circles », un des riffs les plus glauques que j’ai pu entendre, des blasts apocalyptiques, et une soudaine cassure de rythme pour assurer la transition entre les tons), et que chaque titre s’imbrique logiquement au précédent sans en reprendre à la lettre les recettes. Le final homérique et évolutif permet de rester sur une note ambitieuse, citant OPETH, la scène Post-Core nationale, mais aussi la vague Néo-Death des nineties, pour un ultime ballet qui met le paquet sur les guitares à l’unisson, créant un mur du son que le grand Spector n’aurait pas renié. Toujours à cheval entre BM, Hardcore et Post, NO SUN RISES accepte la chaleur du soleil pour lui confronter le froid d’une nuit sans fin, et nous oblige à faire face aux réalités d’un monde en perdition, sans se contenter de gimmicks et autres ficelles trop tirées. Un album inclassable, ou à caser dans plusieurs catégories, pour un voyage lucide aux confins de la compréhension humaine, aussi empathique que rageur, et aussi raisonnable que plein de fureur. Un bel hommage à la scène allemande de cette dernière décennie, qui n’en peut plus de devoir assumer son passé pour éviter un même avenir funeste.
Titres de l'album:
1.Intro
2.Reproduktionismus
3.Circles
4.Towards Sundown
5.Thralldom
6.Maschinist
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