Minute éducative.
Saviez-vous qu’il avait fallu attendre le treizième siècle pour qu’un Pape décrète qu’un baptême à la bière était invalide ? Tout ça vous semble improbable ? Pourtant le baptême à la bière était très répandu en Norvège, mais le Pape Gregory IX écrivit alors à l’archevêque de Trondheim « qu’en vertu de l’enseignement des sacrements, une homme renait de l’eau et du Saint Esprit, ce qui ne peut pas être considéré comme valide lorsqu’il a été baptisé avec de la bière ».
Etonnant non, comme dirait le regretté Desproges ?
Anecdote qui semble improbable et surtout, complètement gratuite dans le cadre d’un webzine Metal, et pourtant, un simple coup d’œil au titre de cet album et à sa pochette vous suffira à comprendre sa mention dans cette chronique…
Qui sont donc ces affolés du houblon qui souhaitent inonder les nourrissons de mousse en lieu et guise de bise divine ?
Des américains, et même des Texans tiens, qui pérennisent un héritage très respecté dans le créneau du Thrash/Crossover fatal, celui du mélange des genres, et du cumul de la vitesse et des bulles dans le gosier.
Nous avions déjà les TANKARD, qui n’étaient pas les derniers à lécher les fonds de fût, nous avions bien sûr les GANG GREEN qui en avaient toujours une sans faux-col pour vous, nos amis d’ALCOHOLIZER qui ne tardaient jamais à vous resservir, ou bien les WEHRMACHT, qui vantaient leur marque moussue préférée. A cette liste, il convient d’ajouter aujourd’hui le nom des BEER BREAK, assez connoté en soi, et qui lui aussi désigne une bande de pochtrons assumés qui savent tout aussi bien thrasher que roter après une bonne bière.
Après tout, on les comprend. Le Thrash, le Fastcore, le Thrashcore et le Crossover, ça donne soif à force. Alors, en guise de mise en bouche et après un apéro chargé, les trublions de l’alcoolémie texane ont décidé d’enregistrer un premier EP/LP qui nous expose leur vision légèrement troublée de la violence contemporaine, qu’ils envisagent plutôt d’une haleine chargée, et bien empesée de malt avalé.
Néanmoins, et aussi alcoolisés furent-ils durant l’enregistrement de ce premier jet, ils étaient quand même encore assez lucides pour jouer juste et frapper fort. Pour ceux n’ayant pas la mémoire courte et n’ayant pas oublié des albums aussi essentiels que Older…Budweiser, Crossover, Beermacht ou même les quelques méfaits de CRYPTIC SLAUGHTER, l’ambiance risque d’être fort conviviale, genre party donnée en plein cœur de Dallas, Texas, avec quelques potes bien choisis qui finiront sur le carreau, avec de la bave plein le paletot.
Thrash, et donc Hardcore, Fast et donc Thrashcore, tel est le menu proposé par cette bande d’illuminés, qui jouent sec et nerveux et laissent légèrement enivré de leurs rythmiques martelées, qui savent se montrer beaucoup plus intelligentes qu’un simple coup de masse dans le ventre. La boisson est certes assez costaud, mais ne vous brise pas les os dès la première goulée.
Chez les BEER BREAK on sait doser, et louvoyer entre grosses poussées de violence et moments de calme chaloupé, pour ne pas que la tête se mettre trop vite à tourner. Baptized in Beer est plutôt du genre intronisation entre connaisseurs que grosse ramasse à la première heure, et pas question de gerber avant d’avoir festoyé, puisqu’il faut d’abord apprécier toutes les saveurs avant de s’écrouler.
Ainsi, les treize titres proposés jouent la variété et les degrés, passant sans vergogne d’une bonne brune à douze unités à une blonde légère qui coule dans le gosier sans trop l’enflammer.
Et de « Get Drunk » et ses onze secondes à la D.R.I à « Toilet Destroyer » à la CRYPTIC SLAUGHTER, le chemin est court, mais s’arpente en toute lucidité, sans pour autant oublier l’essentiel, prendre son pied.
Et de ce côté-là, nos hôtes savent organiser. Leur fête bat son plein dès l’ouverture, et ne relâche jamais la pression (quel gâchis ce serait !), se permettant même quelques allusions à d’antiques soirées mythiques via une reprise très bien sentie de MINOR THREAT (« Bottled Violence », pas mal la référence au mouvement straight-edge…)
La paternité Hardcore est patente en bien des éléments (« Intoxicated Manslaughter », qui justement rappelle autant la folie des IMPULSE MANSLAUGHTER que l’éducation prodiguée par les GANG GREEN), et si la gerbe finit par franchir la commissure des lèvres (« Premeditated Puke », solo primitif offert par la maison), on laisse toujours traîner un bavoir pour ne pas trop s’en mettre sur le t-shirt.
Et si la plupart des commandements jouent la brièveté et la festivité (« Baptized In Beer », « Liver Failure »), on se laisse parfois aller à divaguer sans trop gloser ou devenir barbant (« Beer Sluts », riff pur Thrash et mid tempo qui crache avant de partir en vrille sans relâche).
Et lorsqu’on leur laisse la parole trop longtemps, les joyeux drilles à la cirrhose aigue ne se sentent plus (« Kneel To The Steel », trois minutes qui passent en revue toutes les variations possibles sur un même thème Thrash/Core/Fast, et on en veut encore), mais restent loquaces et gardent le verbe pointu.
La nuit se termine même sur un dernier dératé, lorsqu’on regarde enfin l’heure et qu’on réalise que moumoune vous attend avec le reproche aiguisé (« Going On Break », départ Fastcore pour plantade Thrashcore, en treize secondes, un record), et finalement, le bilan dressé a de quoi laisser médusé.
Une nuit entière à picoler, et on s’en revient le cœur et l’estomac léger, sans gueule de bois à peine réveillé, évidemment à une heure de l’après-midi très avancée.
Accueillons-donc dans la confrérie Metal ces nouveaux taste-bière faisant preuve d’un très bon goût, et que les fans de Thrash à tendance Fastcore des années 80 vont acclamer en faisant tinter leur chope de concert. Et puis, après avoir entendu ça, et malgré l’avis papal réprobateur, rien ne vous empêche d’en verser une petite goulée au petit dernier à l’église, histoire de le baptiser houblonné à votre guise.
Le Thrashcore se déguste en bulles, qu’on se le dise !
Titres de l'album:
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