Les fans de Heavy Metal de luxe et de concept-albums de légende n’ont pas pu oublier Pamela MOORE, tout du moins sa voix, puisque c’est elle qui incarnait la fameuse Sister Mary dans l’opéra-Metal de QUEENSRYCHE, Operation Mindcrime, volume I, mais aussi le moins notable volume II. Cette chanteuse lyrique à la voix puissante les a même accompagnés sur scène en plusieurs occasions, dans les années 80 et 2000, s’intégrant entre-temps au projet RADAR, le temps d’un album, avant de jeter l’éponge. Mais c’est sous son seul nom et sa seule image qu’elle revint en 2006 pour un disque solo, très remarqué, Stories From A Blue Room. L’album démontrait que la blonde vocaliste s’en sortait très bien sans l’appui de ses mentors, et c’est donc avec un certain plaisir que nous la retrouvons aujourd’hui, pour un nouvel effort plus sombre, et beaucoup plus personnel, Behind the Veil. Que se cache donc derrière ce voile dont nous parle la chanteuse, et qui semble dissimuler son âme derrière un paravent de pudeur et de tristesse ? D’abord, un album, un excellent album de Heavy Metal à tendance dure, mais aux mélodies prononcées, mais aussi une tragédie, la perte de sa mère, dont le souvenir encore difficile teinte quelques compositions qui se veulent témoignage d’un amour filial perdurant bien au-delà de la mort…Pour autant, Behind the Veil n’est pas un album triste ou déprimant, loin de là, même si ses tonalités agressives sont toujours plus ou moins assombries de ténèbres et de nostalgie, spécialement dans les parties de chant. Pamela a donc insufflé à ce nouvel effort ce fameux supplément personnel qui rend certaines œuvres encore plus uniques, et autant dire que le voyage qu’elle nous propose à des airs mystiques assez fascinants, et se situe en marge des productions tape-à-l’œil actuelles, aux systématismes encore un peu trop superficiels.
Nous connaissons la voix de Pamela, évidemment, celle qui nous faisait vibrer sur le sublime « Suite Sister Mary », et nous avons la chance de pouvoir l’écouter encore aujourd’hui, pleine de ce grain un peu rauque mais toujours aussi envoutante, et ici mise en valeur par des compositions qui sont autant d’écrins au talent naturel de l’américaine. Si pour l’occasion, elle a su s’entourer de pointures (Rudy Sarzo (QUIET RIOT, OZZY OSBOURNE) à la basse, Casey Grillo (KAMELOT, QUEENSRŸCHE) à la batterie, Michael Posch à la guitare et l’orchestration, et Craig Church aux mêmes postes), c’est sans conteste elle qui reste la vedette de ces dix chansons qui sont autant de déclarations d’allégeance au Heavy Metal. Croisant le chemin de quelques guests au passage (Ralf Scheepers de PRIMAL FEAR ou Randy Piper de W.A.S.P./ANIMAL), Pamela vocalise donc en terrain connu, et prend des chemins convergents, qui nous ramènent au cœur de son parcours et de son histoire, mais qui valident aussi la longue marche entreprise aux côtés de ses anciens amis de QUEENSRYCHE. Certes, Behind The Veil n’a pas la flamboyance d’Operation Mindcrime, mais il enterre le moribond Operation Mindcrime II, et surpasse même en qualité le premier effort de Pamela, en se fixant sur des ambiances très noires, et en faisant la part belle à des guitares presque Thrash, qui de temps à autres rappellent même le METAL CHURCH le plus obscur. Et si l’ensemble n’est pas exempt de quelques défauts, dont une certaine linéarité de ton sur les accords et atmosphères choisis, une très grosse poignée de titres s’extrait du lot pour hisser le disque hors de l’eau, et le transformer en réussite indéniable évitant l’écueil de la paraphrase et le naufrage de l’uniformité.
« Behind The Veil est de loin mon travail le plus personnel. La perte soudaine de ma mère m’a frappé de plein fouet, et m’a laissée avec énormément de problèmes à résoudre. Il me fallait prendre conscience de la réalité et c’est pour cela que Behind The Veil est devenu…une réalité ! »
Et concrètement, le voile que lève cet album sur la personnalité de Pamela Moore est double. Il nous la présente humaine, en proie aux affres de la perte, et aussi à ses propres désirs artistiques, mais nous offre aussi le spectacle du deuil mis en musique, partiellement, qui permet à l’artiste d’aller puiser au fond de sa douleur de quoi alimenter son imaginaire musical. Et une piste aussi concrète qu’onirique telle « My Eternal » est là pour nous montrer cette double réalité de face, en développant des arguments et contre-arguments, mélodiques et puissants, en forme de power-ballad amère et noire que la voix de MOORE sublime de ses accents fragiles et tremblants. Et si l’homogénéité de l’album ne saurait être remise en doute (une simple écoute globale de surface suffit à le comprendre), on peut quand même percevoir quelques errances qui nous permettent d’emprunter des voies un peu excentrées, quoi que toujours baignées d’un halo de pénombre. Ainsi, le synthétique et pourtant métallique « Slow Burn », ressuscite à merveille l’ambivalence du QUEENSRYCHE de Rage For Order et celui plus récent de la post-déformation, tandis que le tonitruant « Wi-Fi Zombies » s’amuse avec la dépendance aux appareillages connectés pour nous offrir une belle démonstration de Heavy Metal moderne qui ne crache pas sur un brin de Metalcore au passage. Accrocheurs, tout en profondeur, les dix chapitres de Behind The Veil sont autant de regards lancés par l’artiste sur le monde qui l’entoure, interne et externe, et nous laisse observer par le trou de la serrure pour assouvir notre voyeurisme, très innocent, concerné et absolument pas pervers. On découvre l’âme de la chanteuse à nu, mais son corps recouvert d’une étoffe noire, sur « Rise », « Sickness », et surtout sur le très beau et évolutif « Beneath The Voodoo March », qui sonne comme une communion sous la pleine lune de deux esprits en totale connexion.
Longue intro truffée de bruitages, pour une soudaine entrée en matière instrumentale, lourde, Heavy en diable mais toujours allégée de mélodies en porte-à-faux, pour sept minutes que le QUEENSRYCHE sans Geoff Tate aurait pu nous proposer sur son dernier album. Et entre un mid tempo vraiment efficace (« These Scars »), une injonction acoustique épurée reposant sur une guitare embrumée et un clavier éthéré (« Just Breathe », superbe parenthèse aux harmonies troubles), et une attaque aussi frontale qu’efficace (« Undertow »), Behind The Veil s’amuse avec les détails, sans dévier de sa ligne de conduite principale. Agrémenté de chœurs bien placés, de soli efficients et toujours maîtrisés, et d’une rythmique mouvante qui sait faire la différence entre martèlement et pilonnage, ce nouvel album solo de Pamela MOORE prouve que la chanteuse n’a en rien perdu son don, et qu’elle a su se servir de sa propre expérience, de sa tristesse pour tisser une œuvre unique dans le paysage musical actuel, sans avoir recours à toute une batterie d’artifices. Seul reproche à formuler, cette pochette qui ne traduit en rien la beauté et la dureté de ce qu’elle cache, et qui se pose comme un voile grossier sur un visage magnifique. Dommage que ce petit détail perturbe l’attention, mais pour l’oublier, il suffit de se concentrer sur la musique. Une musique qui accepte la mort comme finalité, mais qui enjoint de célébrer la vie tant qu’on le peut.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
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