Back to 2021, non que 2022 s’avère déjà décevante (mais elle va l’être, à n’en point douter), mais tout simplement pour s’intéresser à un album paru l’année dernière, complètement passé sous mes radars et ceux de mes compagnons de clavier. Et c’est suite à la parution de nos traditionnels tops de fin d’année que notre cher Buck Dancer nous a entretenus d’un album qui aurait largement mérité sa place dans ce panthéon annuel, et qui inévitablement, a attiré mon attention et attisé ma curiosité. Une fois le style évoqué, je comprenais l’oubli, n’étant pas vraiment porté sur la chose Technical Death, mais une fois l’écoute de l’objet en question digéré, je comprenais mieux son enthousiasme.
Le Death technique, comme chacun le sait, a vu ses grandes et petites lignes définies par des groupes comme MORBID ANGEL, DEATH, SADUS, GORGUTS, ATHEIST, PESTILENCE, et quelques autres désireux de s’éloigner du schéma Gore défini par les origines et des bibles diaboliques que furent Slowly We Rot ou Leprosy. Comme tout processus d’amélioration et de progression naturel, le genre s’est vite empêtré dans des considérations de plus en plus absconses, qu’on retrouvait exposées (pas) très clairement sur l’Obscura de GORGUTS, avant de sombrer dans l’ultra-sophistication dans la brutalité excusant des dérives egocentriques et pour le moins incompréhensibles. Mais lorsque le genre se recentre sur l’essentiel, à savoir la composition, il est capable de produire des œuvres riches, surprenantes, viscéralement violentes mais esthétiquement superbes.
Or ARCHSPIRE s’y connaît en esthétique et en brutalité. Le groupe de Vancouver nous a déjà largement expliqué ses théories sur l’équation au travers de trois albums initiaux, qui posaient les bases avant de développer l‘argumentaire. Et c’est une ascension croissante que le quintet a connu, au point d’exploser d’un succès critique indéniable lors de ses deux dernières démonstrations. Relentless Mutation peut même s’enorgueillir d’une réputation sans failles auprès de la fanbase, mais aussi de l’extérieur, et ce, à juste titre : ARCHSPIRE est un groupe de fous dangereux, mais des fous redoutablement intelligents et doués, disciplinés, et totalement affranchis de toute contrainte de raison autre que celles imposées par sa propre folie justement, ce qui n’est pas la moindre des dichotomies.
Avec un line-up quasiment inchangé depuis ses débuts (Spencer Prewett - batterie, Dean Lamb et Tobi Morelli - guitares, Oliver Rae Aleron - chant, tous membres d’origine, et Jared Smith - basse depuis 2016), ARCHSPIRE s’appuie donc sur un collectif solide, rodé à l’exercice, et capable d’anticiper les réactions et envies des autres. Cette unité permet donc au groupe canadien de pousser les extrêmes aux extrêmes, et quelle meilleure définition pour ce Bleed The Future, capable de réconcilier les fans de MESHUGGAH et les accros à CEPHALIC CARNAGE. La précision est donc de mise, tout comme l’ultraviolence, et entre un solfège écrit à la demi-croche près et une tension permanente évoquant une schizophrénie aggravée par la paranoïa, ARCHSPIRE signe l’album le plus dément de sa carrière, le plus concis, le plus équilibré, mais aussi le plus culotté, superposant des séquences de démence pure et des intermèdes de lucidité mélodique à tomber par terre.
La technique dans leur cas n’est pas un prétexte, mais bien un moyen. Un moyen de construire des écheveaux inextricables tout en laissant à l’auditeur la liberté d’interprétation. Evidemment, un talent individuel notable au service d’une cause commune est toujours une arme très dangereuse entre les bonnes mains. Et celles ayant donné naissance au monstre qu’est Bleed The Future sont assurées, stables, évitant tout accident de siège, pour permettre au nouveau-né de hurler d’un cri paralysant.
Je pourrais digresser des heures sur les capacités de ces instrumentistes obnubilés par la folie. Je pourrais parler des heures de ce batteur en constante frappe, qui déroule des fills surnaturels tout en maltraitant sa grosse caisse d’une paire de pieds supersoniques. Ou de ces guitaristes capables de trancher des riffs syncopés lunaires avant de nous envoyer dans les étoiles d’un solo aux harmonies célestes. De ce chanteur au phrasé incroyable, Slam/Rappeur de l’extrême à la diction parfaite et aux mots qui sifflent comme des balles près d’une oreille. De ce bassiste sosie presque parfait de Steve DiGeorgio qui délie ses graves comme un archéologue un parchemin trouvé sans une salle secrète. Et l’union de ces cinq cerveaux dérangés à la capacité de compréhension décuplée mais convaincu du bien-fondé de sa démarche unique m’a convaincu en moins de quatre minutes : celles que dure « Drone Corpse Aviator », maelstrom d’idées en forme de tempête du désert qui vous balaie comme un swiffer.
L’art d’ARCHSPIRE est de jouer avec tous les codes et poncifs du genre, pour offrir la musique la plus bouillonnante du circuit. Une musique alternant les humeurs, toutes extrêmes pourtant, jouant avec la mélancolie pour provoquer le chaos, comme en témoigne le massacre apocalyptique de « A.U.M. (Apeiron Universal Migration) », final qui vous laisse les neurones en feu et la conscience altérée à jamais.
Le point fort de cette quatrième réalisation, outre sa justesse dans la démesure, est justement la mesure dans les plans qui ne débordent jamais de la marmite, et cette conscience que toute fièvre doit être légèrement atténuée d’une dose d’ibuprofène mélodique. Sans renoncer à son parti-pris d’excès, Bleed The Future empile mais en équilibre, accumule mais range soigneusement, provoque, mais avec du fond, et enivre sans laisser la gueule de bois. La quintessence du Death technique poussé à son extrême, mais qui se lit avec passion.
Ce comeback vers 2021 était donc indispensable, et je remercie d’autant plus Buck Dancer d’avoir attiré mon attention sur cet album qui méritait largement une chronique. Souhaitons que 2022 nous réserve d’autres surprises comme celle-là, que je remarquerai peut-être sur le tard grâce à l’attention de ceux à qui rien n’échappe.
Titres de l’album:
01. Drone Corpse Aviator
02. Golden Mouth of Ruin
03. Abandon the Linear
04. Bleed the Future
05. Drain of Incarnation
06. Acrid Canon
07. Reverie on the Onyx
08. A.U.M. (Apeiron Universal Migration)
Ah, bah la voilà la chronique et, comme souvent, très réussie!! Elle résume parfaitement les qualités de cet album, qui ne méritait pas de passer inaperçu, dans une année déjà très riche ( et je suis loin d'avoir écouté tous ce qui m'intéressait, genre le Mastodon)
Content de voir que cet album t'a plu autant qu'à moi, cher Mortne2001, surtout que comme toi, je ne suis habituellement pas amateur d'ultra technique. Mais que c'est génial quand le metal arrive encore à nous surprendre comme ça !!
Ah… je vais apporter un peu de contradiction, que personne ne s'agace.
Je suis friand de Death Metal technico-brutal depuis longtemps maintenant, et particulièrement attentif à la scène Canadienne vu l'énorme apport du Québec à ce courant, et subséquemment à ma discothèque. Mais j'ai mes convictions. J'attends qu'il y ait quand même un minimum de testostérone et d'émotion dans tout ça, voire de créativité pertinente si l'on est joueur. Et franchement, cet étalage de dextérité me laisse froid une fois de plus. Ils sont capables de jouer très très très vite, y compris au growl. Mais je m'ennuie, au fond. C'est la même chose, dans une moindre mesure peut-être, avec Gorod ou Necrophagist. C'est pourquoi je préfère clairement le travail de groupes comme Deviant Process, pour rester en 2021, qui restent dans un registre un peu plus traditionnel mais tellement plus intéressant à mon goût.
Après, je remarque qu'Archspire séduit surtout des gens qui ne sont pas passionnés par le Death technique habituellement – j'ai un ami dans la vraie vie de l'autre côté de l'écran qui est aussi dans ce cas. Pourquoi pas ? On en a bien le droit. Mais à l'époque, on disait la même chose du "Cosmogenesis" d'Obscura qui me semble largement plus intéressant. Le public a changé, sans doute. Le succès de l'inspiration néobaroque ces dernières années va un peu dans le même sens (First Fragment, Equipoise…).
Curieusement, Archspire a passé toute sa carrière sur des labels Provençaux (Trendkill puis Season of Mist). Au fond, ils sont comme de chez nous.
Modern metal de haute médiocrité.
Ce n'est pas moi qui vais m'agacer RBD, au contraire, toujours intéressant d'échanger et de partager nos avis. Bon, J'ai quand même aiguisé les couteaux au ça où....
Là où je te rejoins c'est sur le manque de testostérone. J'aurais aimé un peu plus de brutalité aussi. Seul petit défaut que je vois à cet album. La vitesse ne fait pas tout.
Mais pour moi, rien de démonstratif et stérile dans cet album. Au contraire, la technique est au service de la musique, qui reste toujours accrocheuse et jamais prétentieuse. Les parties mélodiques apportent de la sensibilité, voire mélancolie, au contraire d'un First fragment justement, simplement doué à faire dans la surenchère technique, sans une once d'émotion, et c'est ce que je reproche le plus souvent à cette scène. Peut-être pas pour rien que le seul album d'Obscura que j'aime est justement "Cosmogenesis" ( j'ai pas encore écouté le dernier)
Par contre je retiens Deviant process que je vais écouter avec curiosité.
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"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
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