Vous souvenez-vous d’un jeune groupe américain, ayant publié sa seconde démo alors même que leur batteur n’avait que…treize ans ? Le cogneur en question s’appelait Andy Galeon, et deux ans plus tard, lui et son groupe allait sortir l’un des premiers albums les plus importants de l’histoire du Thrash, The Ultra Violence, dont peu d’entre nous se sont remis…Vous aurez bien évidemment reconnu les DEATH ANGEL, l’un des combos les plus surprenants venant de Californie, dont le talent ne s’est jamais démenti. Mais difficile de croire en tendant les oreilles sur cette technique sans pareille que ce fameux frappeur n’était âgé que de dix ans lorsque son destin l’unit à une horde thrashant…Pourquoi cette allusion ? Simple, analogie d’état civil ou presque, puisque les membres de BLACK REAPER ne sont pas non plus sortis de leur adolescence et se permettent même de sortir un album purement Thrash d’une incroyable décence, qui se souvient des enseignements des années 80, sans pour autant tourner le dos à la scène locale. Cette fameuse scène Thrash slovène, qui a ramené à la surface des combos comme INSANITY, PANIKK, GAME OVER, ERUPTION, et tant d’autres amateurs de décibels en ébullition, et qui vient donc de se trouver un nouveau représentant, le visage encore marqué par l’acné, mais le geste précis et l’attitude affirmée. Ce quatuor sortant presque de nulle part (Rok Jerončič – chant/basse, Jure Kovač – guitare, Patrik Bajič Kralj – batterie et Luka Bajič – guitare), mais plutôt de Morsko a donc à peine eu le temps de faire ses dents, mais a pris celui de publier une première démo, éponyme, l’année dernière, qui avait mis le feu aux poudres. Cette étincelle se transforme aujourd’hui en gigantesque explosion, via la publication d’un LP de fonction, Blood Moon Rising, qui ne fait que confirmer l’énorme potentiel d’un groupe à l’air aussi poupin que son approche est bourrin.
Certes, convenons-en, l’âge du groupe reste un gimmick difficile à occulter. Mais à l’écoute des douze morceaux de ce premier pamphlet, il devient assez aisé de l’oublier, tant le professionnalisme affiché donne le sentiment de longues années passées à peaufiner un répertoire enragé, directement inspiré des vagues californiennes et allemandes d’il y a une trentaine d’années. Tout ça laisse admiratif et donne le tournis, mais comme on le dit, la valeur n’attend pas le nombre des années, et l’avaleur n’attend pas que le sabre soit rouillé, alors sachons apprécier cette bonne tranche de Thrash finement coupée, qui s’incruste dans la production contemporaine avec une aisance remarquée. Thrash, mais pas que. Les quatre slovènes n’ont pas oublié que de nos jours, pour durcir le ton, de légères accointances Death sont recommandées, tout en gardant l’emprise sur un instinct mélodique développé. Mais dans l’urgence, et par essence, ce Blood Moon Rising fait bien saigner les oreilles d’un Metal convaincant et tonitruant, qui rappelle tout autant KREATOR que le bestial made in South-America, sans pour autant se départir d’une finesse technique que les DEATH ANGEL et les CORONER prônaient sur leurs albums les plus précieux. Le meilleur des deux mondes donc, pour quelques défauts de redondance à souligner, erreur de jeunesse impossible à éviter, qui fait que nombre d’interventions semblent similaires, et reposant sur des riffs qui tentent de nous la faire à l’envers. Certes, le style est propice à ce genre de répétitions, mais avec un tel engagement, et une telle production, aux graves bien ronds, difficile de résister à une telle pression, qui vous saute à la gorge une fois l’intro passée pour ne plus jamais vous relâcher…ou presque.
Difficile de ne pas songer aux DESTRUCTION les plus récents lorsque les riffs circulaires flottent dans l’air, ou même à une version très améliorée de PANZER, le jouet annexe de Schmier, mais les propos individuels et personnels des BLACK REAPER restent largement assez pertinents pour ne pas souffrir de trop de comparaisons. L’album est un peu long, et certaines pistes auraient pu gagner en concision, mais globalement, ce premier LP fait montre d’une maîtrise damnée, et les guitaristes se montrent aussi complémentaires que Kerry et Jeff à la grande époque, même si l’analogie avec SLAYER est parfaitement hors sujet. Brutalité, harmonies, vélocité, assise Heavy, toutes les figures imposées sont passées en revue, et sur les instants les plus alambiqués et techniquement alimentés, on pense aussi au premier LP des oubliés TURBO, qui avec Last Warrior nous entraînaient sur la piste d’un Techno-Thrash pas entièrement assumé. Tout ceci est parfaitement entraînant, et parfois même salement moshant, comme cet irrésistible « Enlightened By Fire », réconciliant les esprits flottant des EXUMER et la science rythmique des EXODUS dans un ballet d’enfer, qui laisse nos petits cœurs de thrasheurs fondus à l’uranium. Certes, et j’en conviens sans avoir besoin d’être torturé, les thèmes ont tendance à se répéter, et on sent que les jeunes agressifs ont encore besoin d’un peu de temps pour oser des choses plus variées, mais lorsque la machine tourne à un rythme optimisé, tout se met en place avec une précision diabolique, à l’instar de cet écrasant « Lost Souls », qui nous évoque une version surpuissante de CREMATORY, celui-là-même qui dans les années 90 gothisait son Metal envenimé d’une grosse touche Dark un peu poisseuse et licencieuse.
S’il est certain qu’entre « Blood Moon Rising », la tuerie éponyme qui met les choses au point et le final « Reclamation Of Prophecy » et son emphase dramatique à la double grosse caisse soutenue de mélodies assassines, les nuances ne vont pas forcément bon train, on se laisse quand même amadouer par ce Thrash à vitesse modérée mais à puissance décuplée, qui laisse entrevoir un potentiel qui va s’affiner avec les années. Les petits jeunes en ont sous le coude, mais aussi dans le poignet, et dans le gosier, puisque celui de Rok Jerončič, bien rauque et grave domine de ses intonations violentes un instrumental en latence, qui alterne poussées de brutalité et agrémentations en ornements ciselés. L’ombre de METALLICA plane parfois au-dessus des débats, mais l’engagement dont fait preuve le quatuor ne saurait être mis en défaut, même si ceux-ci sont encore un peu trop nombreux pour qu’on puisse taxer l’œuvre de première importance. Mais avec un tel couple de guitaristes affutés, et une rythmique aussi carrée, les BLACK REAPER ont tous les atouts en main pour nous surprendre et nous bousculer, et gageons que lorsque leur répertoire se sera étoffé, le choc ressenti sera dur à encaisser. En attendant cette sortie d’une adolescence déjà bien affirmée, savourons donc ce Blood Moon Rising qui fait saigner la lune les nuits mal éclairées, et qui célèbre le Metal le moins dilué en une fête d’outrance jouissive de qualité. Nul n’est prophète en son pays, mais la Slovénie a de quoi être fière de ses jeunes héros qui n’ont pas attendu l’âge de raison pour thrasher à fond.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
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Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
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