Ah les roublards. Ah les finauds. Ah les sagouins. Oser une pochette pareille, un tel nom et un titre d’album aussi évocateurs et nous emmener dans la direction opposée, il fallait être un peu sadique - ou tout du moins joueur - pour oser. Mais saluons l’humour des allemands de NECK CEMETERY, qui jusqu’au bout nous ont fait croire à une énième exaction Thrash old-school, avant de nous consoler d’un Heavy Metal typiquement germain, de celui qu’on pratiquait dans les années 80. Il faut dire que selon la bio du groupe en question, sa genèse aurait pu remonter à 1984 lorsque des rumeurs de formation commençaient à planer en Germanie. Mais il aura fallu attendre l’année 2018 pour que le concept se concrétise autour de musiciens devenus avec le temps des références dans leur créneau. Alors non, les NECK CEMETERY n’ont pas pioché dans les caves à vin de SODOM, TANKARD ou DESTRUCTION pour mettre au point leur breuvage mortel, mais plutôt dans les coffres d’ACCEPT, GRAVE DIGGER, ou MANIAC. Pourtant avec ce graphisme superbe signé de la main de Besil Wrathbone, artiste ayant travaillé pour SODOM, et cette production signée Martin Buchwalter qui a collaboré avec DESTRUCTION, TANKARD, ou Tom Angelripper, tout laissait à penser que ce quintet diabolique nous préparait une attaque sonique en bonne et due forme. Mais c’est bien dans un Heavy Metal chantonnant et mélodique que les musiciens s’accomplissent, et la surprise n’en est pas mauvaise pour autant : et pour cause, les marsouins impliqués sont depuis longtemps des acteurs de la scène, et connaissent très bien leur boulot.
C’est ainsi que nous retrouvons au casting de NECK CEMETERY des figures bien connues du mouvement Metal allemand. Jens (chant / ex-ALEATORY, ex-SEASON OF FLAMES), Boris (guitares / ex-BLACK SHERIFF), Yorck (guitares / SODOM, ex-BEYONDITION), Matt (basse / HORNADO) et Lukas (batterie / BLACK SHERIFF) sont donc des habitués du riff pur et massif, et leur union sous cette nouvelle bannière en 2018 a permis la parution d’un premier EP, mais surtout, de cet album enthousiaste et euphorisant qui replace le Heavy de tonton sur la carte de la nostalgie. Pourtant, en écoutant ces chansons, on ne peut s’empêcher de penser à une musique ancienne remise au goût d’un jour nouveau, et le répertoire développé par Born in a Coffin n’a rien d’une redite maladroite sur fond de citation un peu forcée. Et on s’en rend rapidement compte à l’écoute de l’introduction mélodique de « L.F.I.R.S. », qui pendant une minute et neuf secondes nous fait le coup de la mise en jambes joyeuse et entraînante. Et on commence à se dire que le projet va se rapprocher d’un Power Metal heureux et fleuri, mais une fois encore, les cinq participants ont bien joué leur coup en enchaînant immédiatement sur le formel et solide « King of the Dead », qui démontre qu’ils ne sont pas là pour jouer avec un tempo véloce, mais bien solidifier les bases d’un Heavy à l’allemande, moins stérile que son pendant d’époque. Riffs classiques, chœurs prononcés, refrain marqué, mélodies proéminentes, tous les ingrédients sont là pour éviter l’écueil du gras à la RUNNING WILD, et il n’est pas interdit de penser que les NECK CEMETERY ont souhaité alléger leur choucroute de quelques saucisses américaines, plus light à digérer.
D’ailleurs, la voix assez soft de Jens permet de ne pas sombrer dans le rauque qui lasse au bout de quelques minutes, et le chanteur n’enfonce en rien le clou en gardant son timbre clair et son phrasé ferme, permettant à l’instrumental traditionnel de décoller. De la simplicité, de la concision, un brin d’imagination, tels sont les ingrédients de ce premier album qui s’écoute en dodelinant de la tête, et qui donne le sourire assez rapidement. Certes, l’approche est sans heurts, le Metal médium et la puissance allégée, mais les chansons en sont vraiment, et pas de simples prétextes à se servir une autre bière en admirant les clous de son bracelet. « Castle of Fear » a tout de l’hymne à la PRIMAL FEAR/SCANNER, les ambitions Power et Speed remisées à la cave, et les guitares s’en donnent à cœur joie dans l’harmonique saccadé, pour conférer à leurs licks des accroches de gimmicks qui restent incrustés dans la mémoire musicale. Simple, mais non dénué d’ambitions pour autant, Born in a Coffin propose quand même des pistes plus développées et épiques, et lorsque les premières notes de « The Fall of a Realm » résonnent, on se croirait vraiment revenu à l’âge d’or de la NWOBHM, lorsque MAIDEN développait ses longues suites progressives. D’ailleurs, les ficelles sont les mêmes, mélodie un peu tragique sur les bords, agencement des instruments intelligent, et explosion soudaine d’un Metal non édulcoré, mais adapté aux gouts d’un public qui n’a pas forcément envie de se replonger dans la sidérurgie allemande trop datée.
NECK CEMETERY s’est même permis d’inviter quelques guests pour rendre la fête plus folle, et c’est ainsi qu’on retrouve Chris Boltendahl (GRAVE DIGGER) sur l’ultra efficace et catchy « Banging in the Grave » qui n’est pas sans rappeler une union entre GRAVE DIGGER et SINNER, mais aussi Michael Koch (ex-ALTANTEAN KODEX), venu gratter ses cordes sur le final « Sisters of Battle », l’autre gros morceau de l’album. Morceau qui représente une conclusion rêvée pour un album moins anecdotique qu’il n’y paraissait au prime abord, et qui offre une vraie bouffée d’air frais dans la claustrophobie old-school ambiante. En prenant le parti de s’amuser avant tout, les cinq allemands nous offrent un travail impeccable, certes parfois légèrement tâché de convenances évidentes, mais globalement souriant, heureux, et concrétisation d’années de pratique dans des groupes plus établis et sérieux. Et finalement, Born in a Coffin nous offre bien plus qu’un énième album de Thrash rétrograde, même si son optique répond aux mêmes besoins de retour aux sources.
Titres de l’album:
01. L.F.I.R.S.
02. King of the Dead
03. Castle of Fear
04. The Fall of a Realm
05. Banging in the Grave
06. Feed the Night
07. The Creed
08. Sisters of Battle
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