ATTAXE fait partie de cette myriade de groupes ayant enregistré un sacré paquet de démos, sans jamais parvenir à graver un premier véritable album. Fondé en 1985, il a connu un parcours plus que chaotique, enfilant les maquettes comme d’autres les perles sur un collier. Pas moins de six ont été enregistrées durant la première période d’activité du groupe, et certains de leurs titres ont même figuré sur des compilations en vue. Las, le destin s’est chargé de les laisser dans l’ombre, même si quelques college radios ont programmé leurs chansons. Tout ceci n’aurait pu rester qu’une petite annotation de bas de page dans une encyclopédie Metal américaine, mais avec un peu de ténacité, le combo de Cleveland, Ohio a enfin vu ses efforts récompensés.

Les périodes d’activité du groupe ont été très erratiques. 1985-1989, 1989-1990, 2004-2005, 2011, 2019-aujourd’hui, une ligne de vie pour le moins hachée, mais une reformation prometteuse en 2019 et une signature sur le label allemand Golden Core, spécialisé dans l’exhumation de pépites eighties oubliées de tous les maraîchers. Et aujourd’hui, le résultat de toutes ces années d’abnégation et de passion, sous la forme de dix morceaux étonnants est pour le moins rafraichissant.

ATTAXE a mis les petits flight-cases dans les grands, et nous offre un festival d’énergie et de jeunesse, quarante ans après sa naissance. Alors que tout le monde s’attendait plus ou moins à une œuvre Heavy classique, les américains ont mis le paquet pour nous surprendre en effectuant un gros travail au niveau de la composition et des arrangements. C’est ainsi que Braving The Tempest sonne très décalé et opératique, voire hypnotique si on considère le chant très particulier de Juan Ricardo, leader incontestable à la voix unique et puissante.

Outre le chanteur au coffre impressionnant, on retrouve au casting Steve Sinur, batteur historique, Ray Hitchcock dont la basse avait fait une courte apparition entre 1986 et 1988, et deux petits nouveaux malmenant leurs guitares, Pat Jaxx et "Wild" Bill McConneaughey. Un quintet entre tradition et modernisation, entre racines et ouverture, pour un résultat qui laisse pantois. Certes, les années ont permis aux musiciens de tirer le meilleur d’eux-mêmes, mais au regard d’une production old-school toujours aussi prévisible, Braving The Tempest fait figure d’incongruité géniale.

Le ton, tout est dans le ton. Entre lyrisme exacerbé et violence maîtrisée, ce premier long est un choc thermique temporel qui secoue les os. Avec des éléments de la NWOAHM et des clins d’œil adressés à QUEENSRYCHE et HEIR APPARENT, ATTAXE signe là l’un des albums les plus fascinants de cette rentrée 2024, en s’appuyant sur son talent naturel.

Loin des pâles copies de JUDAS PRIEST, WASP, IRON MAIDEN ou SAXON, ATTAXE affirme son propre style, et ressemble parfois à une version un peu branque du SAVATAGE le plus dramatique, ce que l’épique « Sign Of The Snake » souligne avec beaucoup d’à-propos. Les capacités hors normes de Juan Ricardo permettent à l’instrumental d’adopter des postures pour le moins audacieuses, en syncopant à outrance pour mieux rendre hommage à ce Heavy américain des années 80 (« The Abyss »).

Un soupçon de théâtralité MERCYFUL FATE, beaucoup de références à Grateful Inheritance, mais aussi à LEATHERWOLF, LIZZY BORDEN, et un répertoire 2024 qui fait feu de tout bois. Impossible de résister à la fougue de ces musiciens d’une autre époque, qui n’ont pas vieilli, et qui aiment toujours autant les décibels, pour peu qu’ils soient créatifs. Et Braving The Tempest l’est, se matérialisant souvent en une tempête de passion qui ne peut laisser indifférent.

L’album explore les thèmes de la résilience, du courage et de la capacité à surmonter les obstacles face à l’adversité. Par sa musique, ATTAXE incite son public à affronter les tempêtes de la vie et à relever courageusement tous les défis qui se présentent à lui. Message positif pour une bande-son bouillonnante, le mélange est parfait, et pour le moins explosif. Avec des syncopes purement US et une attitude solide à l’anglaise, ATTAXE trouve le plus bel équilibre entre les deux écoles, allant jusqu’à inscrire des mélodies à la tierce et des saccades au cahier des charges.

Extrêmement solide, Braving The Tempest n’a peur de rien, et vient sanctionner une carrière mise au service d’un Heavy Metal noble et efficace, désireux d’explorer des terrains moins foulés, pour ne pas recycler des plans vieillots et idiots. Certes, certains morceaux sont d’un classicisme indéniable, mais d’autres refusent la conformité, et mixent les références, à l’image de « Do You Believe? », au port de couplet altier et au refrain au sang bleu.

« Diamonds », tendu comme du Dark Metal, « The Highwayman » qui conjugue le Metal US au futur du HELLOWEEN le plus agressif, le défilé est excitant, les sensations épidermiques, et la fascination laisse finalement place à la sidération. Comment ce groupe extraordinaire est-il passé entre les mailles du filet de son temps, alors qu’il aurait pu incarner l’avenir d’un Metal à l’américaine sans compromis ?

Le mystère reste entier, mais le destin peut toujours changer. D’autant qu’ATTAXE ne s’est pas perdu sur les routes de l’émotion en nous casant une ballade mi-gigue mi-maison. Une ou deux facilités, un final décollé (« Avenging Angel »), et un au-revoir qui je l’espère n’est que temporaire. Vous avez patienté quarante ans pour exister en longue-durée messieurs, vous resterez bien encore un peu.

Ma porte vous est ouverte quoiqu’il en soit.                   

Titres de l’album:

01. Braving The Tempest

02. The Abyss

03. Devil’s Advocate

04. Sign Of The Snake

05. When Tyrants Fall

06. Do You Believe?

07. Diamonds

08. The Highwayman

09. Can’t Stop The Evil

10. Avenging Angel

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