Bukowski

Bukowski

23/09/2022

At(h)ome

BUKOWSKI, c’est plus qu’un groupe, plus qu’une simple fanbase, c’est une AOC, le lien ténu tissé entre le Rock et le Metal, avec une seule conviction au cœur : ne jamais stagner, avancer coûte que coûte. Depuis 2007, cette évolution permanente sans renier les racines est le leitmotiv du groupe, passé à travers bien des tempêtes, mais ayant aussi déclenché des tornades sur scène, du Hellfest au Sonisphère en passant par des salles plus raisonnables.              

BUKOWSKI, c’est plus qu’un groupe, c’est aujourd’hui un nom commun passé dans le domaine public grâce à cet album éponyme qui assume pleinement l’identité, mais aussi, en brodant un peu, un nouveau départ, quatre ans après Strangers qui restait à ce jour l’ultime enregistrement studio du quatuor. Le quatuor aujourd’hui, c’est évidemment Mathieu Dottel (chant/guitare), le phare dans la nuit, mais ce sont aussi Clément « Knäky » Rateau à la guitare, Romain Sauvageon, batteur depuis 2019, et feu Julien à la basse, bientôt substitué sur scène par Max Müller, chaussant les bottes de son prédécesseur avec humilité.

Alors, plus que de longs discours, c’est évidemment la musique qui prime sur tout le reste. Une musique composée en pleine pandémie, lorsque personne n’avait le droit de voir qui que ce soit, lorsque les musiciens étaient bloqués chez eux, obligés de répéter en mode zoom, et de se parler en mode visioconférence. Un album qui a donc profité d’un climat unique, un peu cosy, un peu cocoon, mais aussi un peu rageur, de ne plus sentir cette énorme énergie en répétition à bosser sur des nouveaux titres taillés pour la scène.

Aujourd’hui, BUKOWSKI est donc Bukowski, pour la première fois de sa carrière, et nous lâche onze morceaux pour plus de cinquante minutes de musique, onze morceaux dont certains font déjà partie des plus aventureux que le quatuor ait proposé à son public. Mathieu a perdu son frère, ce qui en aurait poussé plus d’un à stopper net, mais par passion, par amour et par respect, Mathieu a décidé de continuer l’aventure, ce qu’aurait évidemment souhaité Julien, aussi attaché que lui à cette carrière, ce parcours, et cette trademark amplifiée. Mais au-delà des heurts et des malheurs, subsiste le doute : peut-on encore se renouveler sans se trahir avec ce bagage lourd sur les épaules et cette réputation sans failles ?

La réponse est assez évidente, et ce, dès les premiers morceaux de ce nouveau chapitre. Bukowski ratisse large, titille le Rock alternatif pour mieux provoquer le Metal, soigne ses refrains pour mieux bichonner ses couplets, et se dévoile par touches, parfois émouvantes comme ce long et sinueux « Breathin’ Underwater », placé en deuxième de couverture, et qui dévoile une facette plus fragile du groupe. Facette vite cachée par le masque Noisy et furieusement Rock de « Crossroads », qui ne s’éternise pas, mais fout quand même un sacré bordel.

Le répertoire est donc un pont tendu entre hier et demain, et dévoile un quatuor sûr de lui et de sa puissance, plus intime, mais toujours aussi affamé de décibels. En bidouillant certains arrangements par l’informatique, BUKOWSKI a souhaité tester ses textures, et jouer sur les ambiances pour proposer une œuvre pleine, sans doute la plus culottée et ambitieuse de sa longue carrière. On sent les chairs à vif sur « NCFYC », l’ombre des BEATLES dans les harmonies vocales, la lumière des 7 WEEKS pour le déhanché Rock sombre, mais surtout, cette envie d’oser des choses moins prévisibles pour prendre ses fans à rebours. Pas question de recycler, de réécrire, mais d’avancer, le plus loin possible, quitte à ne pas revenir.

Ceux qui connaissent BUKOWSKI live savent que son pendant studio est plus timide, moins overdrivé, moins cramé par les watts. Pourtant, Bukowski, assemblage de pièces détachées n’a jamais autant sonné comme une groupe capté live, la rage aux lèvres et le regard perçant le futur. Ce qui n’empêche nullement une certaine légèreté au moment de pondre un totalement incongru « The Third Day », troisième jour saccadé à outrance et qui rappelle le meilleur du HC urbain new-yorkais, avant d’oser le chant en français sur la collaboration avec Wojtek, de la ligue de battle a cappella RAP CONTENDERS. Electronique, piano un peu suranné, lignes de guitare qui s’empilent, chœurs qui se détachent de ce chant rappé hurlé de l’intérieur, la surprise est magnifique, et le morceau superbe.

BUKOWSKI n’a jamais sonné aussi mature qu’en 2022. Et pourtant, il n’a pas vraiment changé, il a juste encaissé les épreuves, l’isolation, le deuil, qui lui ont gravé de profondes rides sur le visage, mais certainement moins qu’il ne l’aurait mérité. Les mélodies sont toujours là, massacrées par un accès de puissance totalement grungy (« Vox Populi »), ou mises de côté façon Rock sur « My Claws », griffes qui déchirent la moindre des carapaces.

Bukowski n’est pas un album qu’on brade sur les plateformes pour en apprécier un tube de temps en temps. Pas le genre d’album qu’on va payer avec des crédits Apple Store pour faire plaisir à son fils, pas le genre d’album qu’on va randomiser sur une playlist quelconque en le mélangeant à de la vulgarité commerciale. Non, il est un album qui s’apprécie dans son propre contexte, isolé, écarté de la masse, et écouté dans la pénombre en clair-obscur d’une journée pas comme les autres.

C’est un album qui évoque les KYUSS, les REFUSED, le DEP aussi par courts épisodes. C’est un album qui sent bon les cheveux gris, et l’attitude teenage sur scène, le terrain de jeu qui va s’enflammer dès que les nouveaux morceaux y seront joués. C’est de l’alternatif sublime (« Vertical » qui s’énerve toutefois par à-coups), et un aveu hors modes (« Uncool », but chic), et plus simplement…

…le meilleur album de BUKOWSKI ?

Peut-être puisqu’il porte son propre nom. Il y aurait raisonnement plus absurde, spécialement après dix ou quinze écoutes religieuses. Alors.

Alors, BUKOWSKI, c’est plus qu’un groupe, c’est la famille.  

         


Titres de l’album :

1. From Above

2. Breathin’ Underwater

3. Crossroads

4. NCFYC

5. The Third Day

6. Arcus (feat. Wojtek)

7. Vox Populi (feat. Toni Rizzotti)

8. My Claws

9. Stolen

10. Vertical

11. Uncool


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par mortne2001 le 06/09/2022 à 17:42
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