J’ai mis du temps à comprendre pourquoi certains musiciens aimaient jouer lentement. Je sais, l’adage populaire affirme que chi va piano va sano va lontano, mais en tant que fan de Thrash, Death et Grind depuis les années 80, j’ai longtemps été tenté de croire qu’il fallait taper le plus vite possible pour rendre une musique agressive et méchante. Jusqu’à ce que je découvre quelques albums clé, dont le séminal Souls at Zero de NEUROSIS, qui m’a prouvé que la lenteur pouvait être synonyme de malaise, avant que la vague des CROWBAR, EYEHATEGOD et autres ISIS ne me frappe de plein fouet. Et sans être devenu un fan de Doom ou de Sludge, je reconnais que cette mesure de tempo me parle beaucoup plus aujourd’hui, spécialement lorsqu’elle est prônée par des groupes s’y entendant come personne pour pilonner les sens de façon systématique MAIS intelligente.
Ainsi, les américains de KOZA font partie de cette catégorie, et le prouvent sans ambages sur leur premier longue-durée. Six ans après leur naissance à Chattanooga, Tennessee, ces quatre marsouins nous offrent donc trente minutes et quelques de souffrance sonore à la croisée des chemins, une œuvre tenant tout autant du Doom que du Sludge ou du Stoner. On reconnaît l’ouverture d’esprit à la saleté des riffs et à la cruauté de la voix, mais aussi à ce rythme faussement lancinant qui accepte les cassures régulières et les accommodations extérieures. Et six ans après leur premier EP éponyme, les KOZA démontrent qu’ils sont passés maîtres dans l’art de transformer la pesanteur en oppression maladive, un peu comme si un obscur combo de Virginie s’était exilé dans l’Oregon pour secouer les fondations de Portland.
Peu d’informations au sujet de ce quatuor (Bobby Rayfield - basse, Chris Ross - batterie, Russ Cannon - guitare et Brooks Rose - chant), qui sur ses pages officielles ne se répand pas en confidences sur ses influences ou sa genèse. Mais les influences sont réelles, la vague de la Nouvelle-Orléans, celle de New-York, une certaine vision d’un UNSANE encore plus maladif qu’à l’ordinaire, un poil de PRIMITIVE MAN en cure d’amaigrissement à Chattanooga, et vogue la galère, sur une mer de production sourde, abrasive, grave et grasse. La houle fait donc tanguer le navire sur tout le long de sa traversée, mais miraculeusement, on arrive à bon port, sans vraiment savoir pourquoi. Il faut dire que Russ Cannon tire de sa guitare des riffs dantesques aptes à ralentir n’importe quel voilier à la vitesse d’un croisé, trouvant parfois un axe Doom vraiment énorme pour alourdir un propos déjà fort peu digeste (« Dull Care Slain »). Ce morceau est d ‘ailleurs le haut fait d’un album qui peut donner des haut-le-cœur de son amplitude dévastatrice, avec son tracé d’oscilloscope tournant fou, entre saillies bluesy qui se greffent sur une basse Stoner, et si le chant monolithique et hurlé de Brooks Rose empêtre le propos dans les marais d’une âme trop noire, l’ensemble décolle miraculeusement, et évite le piège redondant d’un Doom trop fixé sur les obsessions de BLACK SABBATH.
Il y a pourtant du SAB dans cette musique, mais il y a autre chose aussi, de cette nouvelle vague de Sludge qui repousse les frontières du supportable, et qui ne tolère de limites que celles de sa vilénie. « Leeches » prévient d’ailleurs l’auditeur que la séance risque d’être fort désagréable, appuyant sur la lenteur comme un pneumothorax sur la plèvre, mais cette gravité de fond dans l’instrumental suggère que les KOZA ont une culture Hardcore, Death et Sludge qui mérite le respect.
Evidemment, la noirceur est omniprésente, parfois même dérangeante lorsque les premières notes déprimantes de « Hospice » vous heurtent de plein fouet, comme celle d’un EHPAD dans lequel des personnes âgées vivent leurs derniers instants de vie dans la solitude morale et la détresse physique la plus cruelle. Et de tout l’album, aucun moment n’offre de souffle salvateur, cette apnée se tirant sur trente-deux minutes éprouvantes, le corps essayant de regagner la surface alors que l’esprit a déjà compris que l’issue serait fatale. « A Cleansing Burst of Solar Fire » suggère quelques breaks fameux de NEUROSIS, ce que « Cosmic Mass » confirme de ses percussions tribales surprenantes. Mais pas d’équivoque, ici, tout n’est que névrose, analyse du désespoir face à une réalité de fond inévitable et tangible, et le groupe met un point d’horreur à terminer son effort par le pachydermique « Swine Lord », aux accents psychédéliques acides et à la wah-wah perverse.
Sortir un tel album le 1er janvier, un lendemain de fête est vraiment une déclaration d’intention. Mais cette lenteur obsédante permet justement de se mettre au diapason d’une année qui commence bien mal, et d’en anticiper peut-être les évènements les plus funestes à venir.
chi va piano va sano va lontano
Titres de l’album:
01. Leeches
02. Hospice
03. Narcissist
04. Dull Care Slain
05. Awaken
06. A Cleansing Burst of Solar Fire
07. Cosmic Mass
08. Swine Lord
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