Call Down The Sun

Konvent

11/03/2022

Napalm Records

Aujourd’hui, il pleut, encore. Oui, je sais, cette rubrique n’est pas vraiment concernée par la météo, mais excusez l’auteur de ces lignes de se laisser guider par son moral, lui-même dicté par des conditions extérieures clémentes ou pas. Après tout, lorsque le soleil brille, on est plus enclin à se laisser porter par un Hard FM de qualité, un Thrash enjoué, ou même un Grind affolé, mais lorsque les grosses gouttes perlent aux fenêtres, humidifiant une atmosphère déjà bien chargée, on a tendance à fouiller les arcanes du net pour y dénicher l’album/BO de la journée.

Dont acte.

Le Danemark donc, et un quatuor qui ne verse pas au dossier de la joie ses pièces à conviction. Fondé en 2015, le quatuor KONVENT s’épanouit dans une sorte de Doom fortement imprégné de Death, à la manière des défricheurs des nineties, les dISEMBOWELMENT, INCANTATION, en poussant le vice encore plus loin, tout en acceptant d’être le prolongement des racines poussant dans les années 70. Une sorte de PRIMITIVE MAN envoyé dans le temps pour confronter BLACK SABBATH, un vice caché dans la foret, une inconnue dans une équation qu’on pensait résolue.

Le fait que KONVENT soit un groupe entièrement féminin n’est qu’un gimmick qui ne mérite pas qu’on s’y intéresse, puisque le genre n’a rien à voir là-dedans. Néanmoins, il est toujours étonnant de constater qu’une femme peut grogner encore plus macabre qu’un homme, et surtout, très plaisant pour les oreilles. Car ne le cachons pas, les hurlements cryptiques poussés par Rikke Emilie List ne sont rien moins qu’impressionnants, à la limite du 78 tours passé en 33, et cette vocaliste d’outre-tombe est au diapason de la bande-son proposée par ses collègues, lancinante, insistante, incantatoire et quelque part, hypnotique.

Après un premier album remarqué dans l’underground, ce Puritan Masochism qui semait déjà les graines de la discorde macabre, les KONVENT reviennent donc sur la référence Napalm Records avec ce Call Down The Sun, qui invite en effet le soleil à aller se coucher et faire de laids rêves. Le line-up du groupe, inchangé depuis 2017 (Heidi Withington Brink - basse, Sara Helena Nørregaard - guitare, Rikke Emilie List - chant et Julie Simonsen - batterie) possède donc cette cohésion indispensable à toute suite qui se veut à la hauteur, et les neuf morceaux de ce deuxième longue-durée, assez similaires dans les faits, agissent comme une litanie processionnelle, une sorte de réunion de congrégation étrange entre les ruines d’un ancien couvent dans lequel se seraient passées des choses assez effrayantes.

Du noir et blanc en musique, de la pluie persistante un matin d’hiver du côté de Copenhague, beaucoup de résignation quant au concept d’une « vie meilleure », et un Death/Doom de première bourre, épais comme du NEUROSIS ralenti et défraichi, moche comme du ENCOFFINATION légèrement grisé par un poison mortel, et en tout cas, lourd, sourd, et enrobé dans une production magique qui fait vibrer la basse et grésiller la guitare.

« In the Soot » est en quelque sorte le résumé d’une recette magique faite de lourdeur, de moiteur, de gravité constante et de rêves perdus. Cette distorsion venue du fond des temps, ce chant en dualité presque Black, ce rythme inamovible, font de ce titre le parangon de l’approche danoise en matière de brutalité aveugle et muette. « Pipe Dreams », le chapitre proposé en amuse-bouche n’a rien perdu de sa saveur, et ses percussions d’intro tribales nous entraînent sur un chemin dangereux, en mid tempo pataud, alourdi par des exhortations vocales à faire trembler Lee Dorian sur ses bases.

Reines de la misanthropie musicale, les KONVENT n’utilisent que de maigres variations pour ne pas perdre le fil conducteur de l’album, tout en proposant des digressions palpables. On en prend note sur le monstrueusement rétrograde « Fatamorgana », à faire cauchemarder SAINT VITUS un soir de Samain, mais aussi durant l’interlude noisy « Interlude », avec ses faux-airs de répète lo-fi captée sur le vif.

C’est évidemment la conclusion éléphantesque qui attire tous les tympans, mais « Harena » est plus qu’une simple clôture. C’est une déclaration d‘amour et de haine envers un genre qui ne supporte pas la demi-mesure, les gimmicks et autres poses faciles. En choisissant de parsemer quelques samples, en optant pour un faux-rythme roublard, les KONVENT s’offrent une sortie de route traumatique, de celles qui transforment la vie en passerelle vers la mort, quel que soit le chemin emprunté au départ.

Belle performance pour un jour de pluie, original soundtrack triste à mourir, de ceux qui vous font plonger sous la couette pour ne plus regarder la réalité blafarde en face.        

    

 

                                                                                                                                                        Titres de l’album :                                        

01. Into the Distance

02. Sand is King

03. In the Soot

04. Grains

05. Fatamorgana

06. Interlude

07. Never Rest

08. Pipe Dreams

09. Harena


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par mortne2001 le 26/12/2022 à 18:08
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