Un album de Black qui commence comme un album de Rock Progressif français des années 70 n’est pas chose banale. Mais PROFUNDAE LIBIDINES l’explique en six mots : Ce N'est pas un Choix. Mais si ça n’est pas un choix, alors, qu’est-ce que c’est ? Une volonté ? Un désir profond comme le nom du groupe en témoigne ? Une envie de provoquer les fans un peu trop intégristes ? Pour avoir la réponse à cette question, il faudrait la poser à Philoxera, aka Mathilde Depernet, qui depuis une décennie nous abreuve de ses liqueurs musicales aux parfums étranges, et au goût très doux/amer.
PROFUNDAE LIBIDINES est certainement le vecteur d’expression le plus libre de la scène Black avant-gardiste. Dès Evangelium Secundum Matthaeum, Mathilde s’est écartée d’un chemin trop bien tracé par les dogmes du Black le plus traditionnel, pour en proposer une version moins prévisible, plus théâtrale, et disons-le, indatable ou anachronique si vous préférez le terme. J’ai toujours été fasciné par son approche, entre lyrisme, violence exacerbée et individualisme prononcé, et ce quatrième album revient à point nommé rappeler la singularité d’une artiste qui à l’image de certaines de ses consœurs, transcende les règles et joue avec les images d’Epinal.
Ce N'est pas un Choix pourrait dans le fond être un album de Proto-Black enregistré entre 1975 et 1978 par ANGE ou PULSAR, soudainement mis au courant des dérives bruitistes à venir de Suède et de Norvège. On retrouve la même liberté de ton, les passages narrés, les arrangements complexes, et si évidemment la comparaison reste figurative, elle n’en permet pas moins de cerner un disque étonnant, qui rebutera les amateurs les plus classiques et autres accros à la brume matinale.
Oublier de parler, contrecarrer, contester, refermer la porte de son cœur, anticiper les peurs.
Que ce soit au niveau des textes ou de la musique, PROFUNDAE LIBIDINES se détache de la masse via une inspiration complexe et multiple, entre Folk, évolutif malin et BM Ambient et mélodique. La superbe voix de Delora, invitée de luxe, lui permet de dérouler le tapis de velours d’un chant clair au vibrato sensible, mais aussi de recouvrir de tessons de verre le couloir de sa pensée lorsque les growls pleuvent comme des sauterelles. Cette dualité vocale est à l’image d’une musique qui elle aussi se découpe en plusieurs angles, comme un triangle éternel renfermant des secrets divins. Et le résultat est patent dès le title-track, posé en ouverture.
Il n’est pourtant pas facile d’affronter sans recul un recueil d’une heure de musique. Mais là est tout le talent d’une artiste qui a plus d’un tour dans son sac, et qui refuse de se répéter au risque d’en prendre pas mal. Avec ses accents jazzy avant-gardistes, Ce N'est pas un Choix joue le Black comme BLIND ILLUSION jouait le Thrash, sans vraiment vouloir en faire ou s’y voir affilié de façon trop directe. Accompagnée par plusieurs chanteuses sur ce quatrième tome, Mathilde peut donc une fois encore se concentrer sur l’instrumental et les mots, et nous offre un disque en convergence de la poésie pure et de la brutalité la plus dure.
Suivant un schéma assez régulier, Ce N'est pas un Choix propose sept pistes de durée égales ou presque, un interlude samplé, des ambiances lourdes et oppressantes (« The Left Hand of Darkness »), des pistes de basse travaillées et concentriques, et si le son de la programmation est parfois difficile à supporter, le tout jouit d’un excellent mixage, très aéré, et qui permet d’apprécier toutes les idées grâce à des espaces négatifs très amples. Et entre le français, l’anglais et le latin, entre le Marquis de Sade et CATHEDRAL, Louis-Ferdinand Céline et MYRKUR derrière les nuages noirs, Mathilde nous dévoile encore un pan de son univers entre onirisme noir et réalisme brut.
Mais la culture de l’artiste ne s’arrête pas là, et se permet de citer dans le texte Nas, AZ, ou Johnny Cash, lors du frontal « Life's a Bitch, and Then You Die », petite incongruité dans le catalogue 2023, et qui voit Mathilde partager le chant avec Elise, pour la saillie la plus franche et nette du lot.
Les souvenirs passent et s'effacent,
Lambeaux d'une histoire jouée encore et encore
Témoins impuissants d'un monde dégueulasse;
Aucune récompense, aucun réconfort
Mais alors qu’on pensait suivre un fil rouge tendu entre deux points précis, la route dévie et nous entraîne dans un cauchemar diurne intense, qui occupe plus de seize minutes du métrage. En utilisant les mots de Louis-Ferdinand Céline mélangés à un texte personnel, PROFUNDAE LIBIDINES prend soudainement une autre ampleur, entre dissonances irritantes, pauses pesantes et reprises traumatiques, et nous enfonce encore un peu plus dans un sol mouvant et dangereux, qui une fois foulé nous fait oublier toutes les convenances du Black Metal moderne.
Et en s’appropriant CATHEDRAL pour en proposer une version très personnelle, Mathilde arrache les dernières mauvaises herbes pour que son terrain soit le plus fertile possible. Proche de la perfection dans son non-style, Ce N'est pas un Choix est une quatrième incarnation fascinante, une projection hypnotique, et plus simplement, une autre façon de jouer un style qui accepte toutes les audaces. Ici, le passé et l’avenir se percutent constamment, et les années 70 le disputent au nouveau siècle pour s’assurer une place enviable dans l’inspiration.
Merci Mathilde pour ce disque unique. Très sincèrement.
Titres de l’album:
01. Ce N'est pas un Choix
02. Ainsi parla la Duclos
03. Une Nuit d'Orage
04. Mater, Ades, Florum
05. Simone Hopkins (interlude)
06. The Left Hand of Darkness
07. Life's a Bitch, and Then You Die
08. Renoncement du Cœur
09. Bonheur / Douleur (CATHEDRAL Cover)
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