Tant qu’on peut recycler les idées, pourquoi essayer d’en avoir de nouvelles ? En politique, cette règle est de mise, et en art aussi. L’art est bien évidemment comme la mode, cyclique, et répond à des besoins de retour aux sources pour accommoder les restes du passé au menu du présent. Oh, bien sûr, certains petits malins vous diront qu’ils croient avoir inventé quelque chose, mais la plupart du temps, il n’en est rien. Après six décades, la musique populaire a subi toutes les mutations, toutes les déviations, les hybridations, et il ne reste plus un seul centimètre carré de terre vierge à découvrir. Il est toujours possible de bidouiller un truc qui paraîtra plus ou moins neuf, mais il risque plutôt de sonner incongru, ou alors totalement inutile, un peu comme si vous mélangiez un yaourt aux fraises et des rognons pour faire le malin. Ceci étant posé, jugeons superficiellement le travail de PYRE. En activité depuis 2011, ce trio se réclame d’un passéisme qu’on constate assez facilement, et qui effectivement, respecte les règles sans chercher à les transgresser. Après quelques formats courts et partagés (Ravenous Decease, EP de 2012 et un split avec ENTRAPMENT en 2013), le groupe de Saint Petersburg nous a enfin accordé plus d’attention avec un premier long en 2014, judicieusement intitulé Human Hecatomb, avant de retomber dans la facilité des splits et des compilations, s’incrustant même sur un hommage à POSSESSED. Ceci dit, il n’est pas étonnant de retrouver ces fossoyeurs de joie de vivre au casting d’une œuvre hommage à celle de Jeff Becerra et les siens, puisque PYRE, comme ses influenceurs et autres icones de l’époque a gravement été marqué par le son des américains au point de le reproduire à sa sauce. Mais sa sauce, épaisse et relevée est toutefois bien connue des embaumeurs du monde entier, et les ingrédients utilisés pour la préparer d’usage, de convenance, et aussi prévisibles qu’une chute de Colombo.
Trio de musiciens expérimentés et très occupés (Dym Nox - basse/chant/batterie, BLAZING RUST, LIKFERD, PORTFIRE, TEITANFYRE, ex-DRAMA, ex-BLASPHERERION, ex-INTERNAL DAMAGE, ex-RAGOR, ex-SEPTORY, ex-ULVDALIR, Roman Rotten - guitare, BLAZING RUST, TEITANFYRE, ex-DRAMA, NEVA, ex-RAGOR, ex-ULVDALIR, ex-АНАХОРЕТЪ et Fred Obsinner - guitare, NEVA, ex-CHAMBER OF TORTURE), PYRE est en quelque sorte l’épitomé de l’art de la reproduction russe, qui copie conforme pour mieux refiler sur le marché des rondelles beaucoup moins chères. Mais autant dire qu’en la matière, ils n’ont pas d’équivalent et qu’ils sont les meilleurs pour reproduire à l’identique les sonorités d’époque. Lesquelles ? Celles de l’âge d’or du Death sombre, glauque et froid, celui qui régna sur les ténèbres du Metal entre 1988 et 1992, celles qui virent les croque-morts d’ENTOMBED, MORGOTH, GRAVE, AUTOPSY, ASPHYX, UNLEASHED occuper le cœur des fans les plus décharnés et acharnés. Le mimétisme est à ce point troublant qu’on pense parfois avoir affaire au fils caché de Marc Grewe et Martin Van Drunen, tellement le timbre de Dyx Nox est similaire à leur gravité graveleuse. Mais musicalement, Chained to Ossuaries est lui aussi enchaîné à ses propres références, ce que démontre assez vite « Impaler The Redeemer », cavalant bon train pour se rapprocher d’une version contemporaine de NIHILIST, et tâter de la vitesse typiquement suédoise, avec évidemment en exergue ces guitares sous accordées si morbides. L’approche est terriblement traditionnelle, n’apporte pas grand-chose de neuf à la cause old-school, mais le tout est si efficace et joué avec conviction qu’on ferme les yeux sur les emprunts un peu trop flagrants.
Il faut dire que les trois originaires de Saint Petersburg savent y faire pour combiner les divers courants en vogue dans le Death des années 90. Entre la lourdeur moite et suffocante d’AUTOPSY, la puissance hargneuse de la vague allemande de MORGOTH, et la froideur cadavérique de la scène suédoise de GRAVE et ENTOMBED, tout y passe, et avec brio. Les dix morceaux de ce second longue-durée sont autant de classiques qui pourraient avoir été composés à l’époque, et même le son donne le sentiment d’avoir été capté conjointement au Sunlight et au Morrisound. De fait, impossible de faire la fine bouche devant des steaks tartares aussi épais que « Wreath Of Crucifix », qui cumule tous les tempi, toutes les atmosphères, tous les breaks que nous avions l’habitude d’apprécier il y a quelques années. Doté d’un son incroyablement profond et clair, Chained to Ossuaries semble faire tout ce qu’il peut pour mériter son titre, et enchaîne les plans classiques, sans perdre de vue l’efficacité. Dans son rôle de chanteur, bassiste et batteur, Dym Nox est relativement impressionnant, convaincant dans les trois domaines, et excellemment secondé par une paire de guitaristes qui n’ont pas oublié la gravité dans la tombe de grand-mère. Ecrasants (« Across The Shores Of Emerald Fractals »), ombrageux et surpuissants (« Crown Of Death »), glauques comme un enterrement anonyme dans une fosse commune un dimanche matin sous la pluie (« Chained To Ossuaries »), PYRE détourne les clichés pour en faire des tours de passe-passe, et s’approprie tout le bréviaire Death de tradition pour trousser une œuvre dantesque, sorte de copié/collé de génie, qui associe toutes les déviances pour aboutir à une perversion unique.
Certes, ceci n’est pas l’album le plus fondamental du cru, encore moins le plus original, mais de tous les groupes old-school en activité depuis des années, le trio russe fait partie des plus capables et des plus crédibles. Un album qui sent bon la mort, qui sent bon l’inéluctabilité, le destin funeste, les linceuls, et tout ce qui accompagne une fin inévitable, mais appréciable. De quoi rendre la mort infiniment plus supportable.
Titres de l’album :
01. Exordium
02. Impaler The Redeemer
03. Wreath Of Crucifix
04. Across The Shores Of Emerald Fractals
05. Ornaments Of Bones
06. Chained To Ossuaries
07. Crown Of Death
08. Disgraced And Dethroned
09. Antae To The Nothingness
10. Death's Dawn Call
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Je ne suis pas au courant.. il s'est passé quelque chose récemment avec le groupe Al Namrood?
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