Oui, le mec est borderline, un peu comme tous les mecs de sa trempe, avec des opinions bien tranchées, des avis pas toujours pertinents, et une attitude frondeuse qui lui cause autant d’ennuis qu’elle ne lui ramène de nouveaux fans. En plus des anciens, qui sont méchamment nombreux. Il a souvent sombré dans son propre pathos, il a levé le bras un peu haut, s’est ridiculisé publiquement et oralement après des nuits agitées d’alcool et autres substances, et pourtant, l’affection qu’on lui porte ne se dément pas. Il se perd dans des projets pas toujours viables, mais lorsque l’envie est là, l’énergie suit, et nous aussi. Alors qu’on le veuille ou non, Philip H Anselmo est une figure d’excellence de la scène Metal, et pas seulement parce qu’il a été le frontman d’un des groupes les plus importants de la décennie 90. PANTERA, c’est loin maintenant, plus que DOWN et tout ce qui l’a amusé au travers des années. Alors, et sans le juger parce qu’il s’en fout, il convient de se concentrer sur l’après, le maintenant, et non pas l’avant. Son calendrier de l’avent à lui n’est pas rempli de chocolats industriels, mais bien de chansons, toutes plus agressives et sans complaisance les unes que les autres. Oui, le mec est un gros bourrin, sa musique ne se calme pas avec le temps, mais lui non plus. Et tant mieux, parce qu’un Phil grabataire accroché à son micro pour baver des insanités et enfoncer des portes ouvertes serait aussi pathétique qu’un Henry Rollins attaché à son déambulateur, pour errer dans les couloirs du Hardcore en balbutiant les sempiternels mêmes messages individualistes. PHILIP H ANSELMO & THE ILLEGALS ? Vous pouvez voir ça comme un caprice nihiliste, l’exaction bruitiste de trop, ou un side-project qu’il ferait mieux de ranger dans sa musette avant de fermer sa gueule définitivement. Mais Anselmo, vous le savez, n’est pas du genre à la fermer. Mieux, ou pire, c’est selon, il l’ouvre de plus en plus, pour gueuler de plus en plus fort. Parce qu’il a choisi sa maladie mentale comme une qualité. Sa maladie, c’est cette foi indéfectible en une musique bordélique, agressive, et osons-le terme suspicieux, « virile ». Et en ces termes d’analyse, le second album de ce projet si improbable n’a pas vraiment d’équivalent sur la scène.
Walk Through Exits Only en 2013 avait d’abord provoqué un tsunami, avant de s’échouer lamentablement sur le politiquement correct musical pour cause de densité un peu trop importante, et de desseins qu’on avait du mal à se figurer. Le public n’avait pas forcément compris la catharsis du bonhomme, surtout parce qu’elle ne concernait que lui. Mais il avait besoin de ce chaos pour se retrouver en tant qu’individu et artiste, et j’avais adhéré au principe comme une mouche à du papier collant. Certes, tout n’était pas parfait, mais c’était cette imperfection qui le rendait si habile, cette façon de dire aux fans, « c’est moi, c’est ma musique, et je vous emmerde ». D’ailleurs, il avait dit la même chose à ses musiciens, s’accaparant l’écriture et la composition, et n’admettant aucune idée externe. Aujourd’hui, les choses sont un peu différentes, et toujours les mêmes à la fois. Phil s’est plus ouvert aux autres, certainement à cause des années passées, mais aussi à cause du line-up idéal qu’il s’est constitué. Et entouré en 2018 de Walter Howard (basse), de son vieux pote SUPERJOINT Stephen Taylor (guitare), de son autre vieux pote José Manuel "Blue" Gonzalez (batterie), et du petit nouveau Mike DeLeon (guitare), surnommé « the man » par Steve Taylor, il semble encore moins apaisé que par le passé, encore plus violent, et choisissant une voie encore plus difficile à suivre, mais il ose enfin s’affirmer en tant que musicien à part entière, dirigeant d’une main souple ce projet amené sans doute à devenir un véritable groupe un de ces jours. Un de ces jours que les bien-pensants et autres calibreurs artistiques craignent mais espèrent secrètement en même temps, histoire de lui régler définitivement son compte. Il faut dire qu’après le mystère musical Walk Through Exits Only, Choosing Mental Illness as a Virtue ne calme ni les ardeurs, ni ne fera taire les reproches. En reprenant les choses-là ou l’album précédent les avait laissées il y a quatre ans, et en poussant le bouchon encore plus loin, Phil se fout bien de notre gueule, mais nous offre pourtant le LP le plus extrême de cette rentrée 2018, et sans lui accoler d’étiquette s’il vous plaît. Mais l’homme déteste les étiquettes à peu près autant que les bonnes ligues de morale qui osent lui dire quoi faire et ne pas faire. Et à travers « Finger Me », il leur règle leur compte comme à la grande époque de PANTERA, lorsqu’il se lançait dans des diatribes acides et fielleuses sur scène. Mais je vous sens dubitatifs, parce que finalement, vous ne savez pas vraiment quel chaos vous attend. Et vous avez raison de l’être, puisqu’après l’avoir écouté, je n’en suis pas sûr non plus. Disons simplement que l’écart qui sépare Walk et Choosing est à peu près aussi important que celui qui sépara jadis le premier et unique album de REPULSION du Scum de NAPALM DEATH. Ou pour utiliser une comparaison maison, celui qui séparait Power Metal de Vulgar Display Of Power, fut un temps. Sauf qu’ici, l’écho est amplifié, à tel point qu’on se demande toujours de quoi il en retourne après avoir ingurgité les quarante-six minutes de massacre organisé. Massacre, le terme est faible, organisé est choisi à dessein. Parce qu’aussi bordélique soit ce disque, il est agencé, intelligemment composé, et pas forcément improvisé. On sent des lignes conductrices, des riffs placés aux bons endroits au bon moment, des dissonances qui ne sont là que pour irriter, mais avec malice, et surtout, des paroles, des mots qui se détachant dans le marasme ambiant. Une sorte d’annonciation à priori d’une apocalypse sociale à venir.
Une ignominie cathartique, encore, mais une horreur musicale.
A vrai dire on pourrait résumer le truc à quelques détails. Cette pochette facétieuse à l’humour noir qui détourne les codes sudistes maladifs des EYEHATEGOD via un pastiche de leur In The Name Of Suffering. Car ici, on souffre, mais on sait pourquoi. On pourrait aussi se servir d’aiguillage via l’intro infâme de « Little Fucking Heroes » qui nous fait anticiper un Thrash de première bourre avant de nous écraser d’un Grind sadique que Phil décore de quelques cris. C’est à la rigueur le point de liaison le plus évident entre les deux albums du combo, pas à cause de son aspect fouillis qui détermine toujours aussi bien le mode de pensée global, mais à cause de cette rythmique concassante qui joue des plans que l’on anticipe avec beaucoup de difficulté. Mais l’avis et l’atmosphère changent dès « Utopian », qui sans rappeler l’effort de Birmingham du même nom, lui rend quand même un sacré hommage. Ou, pour être pertinent jusqu’au bout, préférer se baser sur la longue attaque suffocante de « Individual », pour cerner la personnalité et les travers du bonhomme. Ce mec qui ne fait rien comme tout le monde, mais qui parvient quand même à injecter un groove macabre au sein d’un tissu mélodique maladif, et qui ridiculise de fait tous les combos extrêmes de la planète en jouant leur propre jeu. Hardcore en bourbier, Death en chausse-pied, Grind pour emmerder, mais finalement, du pur BM en fusion qu’il a lui-même adapté à sa propre vision. Et puis « Photographic Taunts » qui tire les cartes aux PRIMITIVE MAN, à SUFFOCATION, NAILS, CONVERGE en moulant leur art pour façonner une peinture de la scène underground plus fidèle qu’une Joconde qui ne sourit plus. Ou parler de cette basse qui s’impose, de la complémentarité de deux guitaristes qui savent très bien ce qu’ils jouent. De ce batteur qui ne semble jamais manquer de souffle et de culot. De ces motifs concentriques presque norvégiens dans l’âme, mais absolument américains dans le désordre. Désordre, le mot est lâché, mais pas pour rien. Car ici, le désordre est agencé, de façon à imposer la folie comme seule réalité, et non comme une alternative pour la fuir et se cacher. Car Phil n’est pas homme à se soustraire à ses obligations. Il les accepte, et les transforme, via « Mixed Lunatic Results », qui en tant qu’acmé et conclusion conjuguées, nous force presque la main, et nous oblige à adopter le projet comme seule alternative possible à la prévisibilité ambiante.
Oui, le mec est borderline. Oui, on peut facilement le détester. Et détester sa musique par la même occasion, en l’accusant d’être tout sauf de la musique. Mais si la folie est la seule porte de sortie pour échapper aux diktats de la pensée des philosophes bon marché, incapables ne serait-ce que d’entrevoir le désespoir d’une génération, alors le capitonnage de cet album est le seul revêtement susceptible de nous protéger de l’explosion. Une explosion théorique et philosophique qui risque bien de devenir physique. Mind over matter, pour toujours, et strenght beyong strenght. Le crédo n’a pas changé. Phil non plus.
Titres de l'album:
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