Colours In The Sun

Voyager

01/11/2019

Season Of Mist

« Colours in the Sun est l’album le plus transcendant, le plus diversifié et le plus effervescent que nous ayons écrit et enregistré. Nos différentes racines se sont rencontrées et nous avons pu créer un son unique sous le soleil australien ».

C’est ainsi que Danny Estrin décrit le septième album de son groupe, et sans en avoir écouté une note, le fan accordera un crédit immédiat à ses propos. Il faut dire que le quintet australien n’a que rarement déçu depuis son apparition à la fin des années 90. Dès le départ, on sentait que les musiciens avaient autre chose à dire, quelque chose de plus qu’un énième soliloque progressif redondant et sans espoir. Pour beaucoup, sa musique à des allures de luminothérapie, de source de bonheur diffuse, de plaisir même pas coupable qu’on partage volontiers avec les non-initiés, comme une cure de jouvence, un ciel bleu dans la grisaille quotidienne ravagée par les nuages old-school et les tempêtes extrêmes. Pour autant, et malgré ces précisions quelques peu abstraites, l’art du combo pour trouver le juste équilibre entre beauté et puissance n’est pas contestable. Si les plus grands orfèvres du genre se sont quelquefois perdus sur les chemins de la complaisance (Devin, nous entends-tu de ta montagne ?), les originaires de Perth ont eux aussi parfois cédé à la tendance de la facilité, tout en soignant des albums qui tenaient la distance du temps. Et en vingt ans, et sept longue-durée, les VOYAGER nous ont entraîné aux confins de leur imagination, transposant le soleil australien dans la noirceur de la vieille Europe, parvenant même à convaincre les américains que la Floride n’était pas l’état de l’hédonisme artistique. Alors, au moment de juger de la pertinence musicale de ce septième né, aucun doute ne vient frapper notre conscience. Nous savons très bien que même dans un mauvais jour, VOYAGER nous offrira un trip intégral vers les étoiles. Enregistré aux Sumo Studios et au Templeman Audio, mixé par Matthew Templeman et masterisé par Simon Struthers, Colours in the Sun est donc une nouvelle bouffée d’euphorie australe, une leçon magistrale de simplicité cachée sous une technique incroyable, dissimulation qui est le propre des plus grands musiciens, qui préfèrent satisfaire qu’impressionner. Mais au-delà de cette constatation qui s’applique à chaque sortie du quintet, c’est surtout la preuve que les barrières de genre tombent les unes après les autres, et que la définition même du mot « Metal » devient de plus en plus floue pour être substituée par la généralité musicale. Et c’est très bien comme ça.

Colours in the Sun est une représentation musicale d’un voyage personnel dans un pays d’adoption.

C’est encore Danny Estrin qui s’exprime, et qui livre son ressenti, lui qui reste le seul membre originel de la formation des débuts. Mais avec un line-up stable depuis 2011 (Daniel Estrin, Simone Dow, Alex Canion, Scott Kay, Ashley Doodkorte), le groupe peut maintenant s’estimer solide, et suffisamment pour offrir des chansons qui profitent du bagage de chacun. C’est ainsi que depuis Ghost Mile en 2017, les choses n’ont pas vraiment changé, et l’approche non plus. On retrouve toujours ce subtil mélange de Metal moderne mais fluide, de Pop complètement assumée au virage rétro, de sonorités synthétiques qui renvoient au meilleur de la New-Wave des années 80, le tout emballé dans un écrin de progressif humble, mais presque parfait. Et il est assez intéressant de constater que ce septième LP sort la même année et dans la foulée d’œuvres majeures comme les derniers OPETH et LEPROUS, puisque les trois groupes partagent le même point de vue sur l’ouverture, l’assouplissement, et le naturel qui prévaut sur la sécurité et l’attente des fans de la première heure. Et en parlant de LEPROUS, nous retrouvons justement Einar Solberg venu taper le duo avec Danny Estrin, sur le magnifique et efficace « Entropy », subtil mélange de MARILLION, Devin TOWNSEND et LEPROUS, et tube autoproclamé de l’album. Quelques petites minutes de plaisir pur, pour deux des chanteurs les plus doués de leur génération, se retrouvant à l’occasion d’un constat : l’époque est plus que jamais au métissage, aux champs du possible vastes, aux inclusions parfois fortuites mais souvent volontaires, et au franchissement des limites. Le Hard-Rock, le Progressif ne sont donc plus ces genres figés qui devaient respecter des codes précis, mais bien des extensions musicales comme les autres, perméables aux influences extérieures. De fait, Colours in the Sun est soft, plus que la moyenne de la production actuelle, ce qui ne l’empêche pas parfois de céder quelques pouces à la puissance, lors d’un gigantesque « Reconnected », qui unit sans le vouloir FEAR FACTORY, Steven WILSON et CARPENTER BRUT. Tour de force ? Non, simple personnalité d’un groupe qui accepte d’autres possibilités, et qui ne voit que son intérêt artistique dans le crossover global.

VOYAGER s’est toujours vu comme le groupe le plus coloré de la dimension Progressive. Et leur spectre lumineux semble s’être encore élargi, atteignant aujourd’hui une sorte de plénitude mélodique absolue, comme le démontre l’entame « Colours ». Rythmique d’une précision et d’une sobriété incroyables, synthé qui n’hésite pas à s’inviter au premier plan, sans pour autant faire de l’ombre à la puissance d’une guitare presque Djent, mais aux motifs totalement accrocheurs. La voix de Danny est toujours aussi pure, refusant les effets de facilité, et servant les mots plutôt que l’inverse. Le message, toujours positif, est mis en relief par une bande-son en forme de lien passé/présent, avec toujours ces clins d’œil au synthétisme 80’s. Soundtrack d’une love-story entre un groupe et son pays, entre des fans et une musique, Colours in the Sun refuse le pessimisme ambiant, et nous entraîne dans le désert australien, dans le centre-ville de Perth, à la recherche de réponses, et de certitudes. « Severomance » évoque le DURAN DURAN des années 90, mais aussi DREAM THEATER, PERIPHERY, et ces soirées passées entre amis à disserter sur la vie et les espoirs encore vivants, nous agitant de pulsions Metal pour mieux apprécier les éclats de rire Pop qui ne sont parfois pas sans rappeler IQ. A ce titre, la première moitié du LP est d’une exactitude rare. Tous les arrangements sont en place, les parties de chacun mesurées avec précision, et si les débordements de clavier de « Brightstar » feront se dresser les épaisses tignasses des metalleux les plus réfractaires à l’instrument, ils caresseront les tympans de ceux qui acceptent les modulations, les sinuosités, les grands espaces et les endroits plus intimes et confinés. Faux rythme, asymétrie, tout y passe et suggère un Post Rock apaisé mais ferme, avec des harmonies vocales doublées au synthé qui lubrifient la mécanique du plaisir. Difficile certes de faire se sentir concernés les plus extrêmes, mais qui ne blêmirait pas à l’écoute de « Saccharine Dream », rêve en technicolor, dégoulinant de souplesse et renfermant pourtant des parties rythmiques puissantes ?

Je ne me prononcerai pas ici sur la qualité de ce septième LP par rapport aux six précédents. Je laisserai le temps faire son office, j’admettrai que sur les quarante minutes, tout n’est pas encore irréprochable, et que certains morceaux marquent le pas sur la fin. Mais même en mode simplissime, VOYAGER séduit (« Sign of the Times », archétype de New-Wave song travestie en exploit technique), VOYAGER sublime (« Runaway », du Mike Rutherford, du A-HA, mais aussi du Devin), et finalement, VOYAGER colore. « Colore le monde, sans feutre, sans épreuves ni bombes » disaient les INNOCENTS. Qu’ils aient toujours les mains pleines, pourvu que nos yeux voient toujours ces sons en arc-en-ciel.         

               

Titres de l'album :

                        01. Colours

                        02. Severomance

                        03. Brightstar

                        04. Saccharine Dream

                        05. Entropy

                        06. Reconnected

                        07. Now or Never

                        08. Sign of the Times

                        09. Water Over the Bridge

                        10. Runaway

Site officiel

Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 12/11/2019 à 17:46
85 %    1167
Derniers articles

LOUDBLAST : 40 ans de carrière !

Jus de cadavre 20/04/2025

Vidéos

Big Brave + MJ Guider

RBD 12/04/2025

Live Report

Becoming Led Zeppelin

mortne2001 09/04/2025

Live Report

Klone

RBD 08/04/2025

Live Report

Dr. Feelgood

mortne2001 29/03/2025

Live Report

1000Mods + Frenzee

RBD 24/03/2025

Live Report

Datcha Mandala

mortne2001 22/03/2025

Live Report

Wishbone Ash

mortne2001 18/03/2025

Live Report

Peter Hook and the Light

RBD 14/03/2025

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Arioch91

Je rajoute une couche avec l'album d'Anialator sorti en fin d'année dernière. Je l'ai beaucoup écouté et l'écoute encore avec plaisir.

22/04/2025, 19:35

Arioch91

Plus fan de Massacra que de Loudblast perso, même si je possède les deux premiers albums du groupe.

22/04/2025, 19:34

Jus de cadavre

De mon côté j'ai toujours eu du respect pour le groupe même si ce n'est pas ma génération, je n'étais pas né quand ils se lançaient... Donc ils ne m'ont pas marqué comme ils ont pu le faire avec leurs fans de la prem(...)

22/04/2025, 17:35

Simony

Pour moi Loudblast, ce sont des suiveurs avec un bon train de retard sur ce qui se fait à chaque époque et Clearcut fait partie de cela... Bref, je ne suis pas très client de leurs albums, on m'avait chanté les louanges de Burial Ground, je me suis ennuyé..(...)

22/04/2025, 16:04

LeMoustre

@RBD : ton dernier paragraphe est plein de vérité. Quant au pseudo DPD je préfère le laisser croire ce qu'il veut. Vu comment il écrit, il a pas dû encore sortir de l'école. J'encourage néanmoins les thr(...)

22/04/2025, 13:35

Gargan

Coup sous la ceinture, tout le monde l'avait oublié celui-là ! 

22/04/2025, 08:44

fecal prout

Et les 25 ans de Clearcut, on en parle?

21/04/2025, 20:55

fecal prout

@Tourista : tu t'es trompé, la news sur les 40 ans de Loublast, c'est plus haut

21/04/2025, 20:53

Tourista

Le Metal est parfois sur le fil du rasoir de la beauferie... Voire tombe carrément dedans.

21/04/2025, 11:45

Saul D

Ready for Eurovision :-)

21/04/2025, 11:04

Saddam Mustaine

J'y étais ! C'était cool

21/04/2025, 01:42

Buck Dancer

Vidéo vue, merci.De mon côté, je préfère le son de Sublime à celui de Disincarnate et c'est aussi le style de death que j'affectionne. Bien lourd, posé et mid tempo tout en étant agressif. Par exemple, c'est pour cela qu(...)

20/04/2025, 18:02

David

Comme je le dis dans la vidéo, leur sommet c'est Desincarnate. Puis The Burial Ground. Je suis moins fan de Sublime.

20/04/2025, 14:08

Buck Dancer

Pour moi Loudblast c'est surtout Sublime Dementia et Cross the Threshold. (Quand à la vidéo je ne manquerai pas de la regarder ce soir). 

20/04/2025, 12:45

RBD

Si je comprends, cette charge allait contre cette part non négligeable du public Metal qui reste bloquée aux groupes de leur jeunesse mais ont cessé de se tenir au courant dès qu'ils ont reçu des responsabilités (premier travail, première rela(...)

19/04/2025, 14:36

DPD

J'écrit comme un enfant de 5 ans ici et je dois encore ajouter des précisions, imagine le truc, peut-être que l'Ehpad c'est metalnews au final. Combien de personnes postent depuis leur lit de mort ici ?Le metal généraliste c'est d&eacut(...)

19/04/2025, 09:13

Humungus

J'ai pas tenu 30 s...J'imagine qu'ils seront sur la mainstage au HELLFEST en juin prochain non ?

19/04/2025, 08:38

Nubowsky

Je suis fasciné.

19/04/2025, 06:37

DPD

Jus de cadavre, je parle pas des captations audio dans un instant précis, je crois d'ailleurs que certaines œuvres sont intemporelles, mais ce qu'il reste de ces gens aujourd'hui, c'est extrêmement différent. Bien entendu qu'il faut écoute(...)

19/04/2025, 05:07

Kamel

I am now officially ON THE JOB MARKET (is my career over ?

18/04/2025, 12:53