Nous l’avons déjà souligné à de nombreuses reprises, le cap du troisième album est toujours le plus difficile à passer. En effet, l’épreuve consiste à rester fidèle à son style tout en le transcendant, pour lui faire atteindre des hauteurs conséquentes, et ainsi passer un grade pour devenir une valeur sure. Le mieux étant finalement d’ignorer ce statut un peu iconique pour continuer à composer naturellement, ce qui semble être la voie choisie par les français de KARNE.
Après deux albums assez appréciés par le public (Faith in Flesh, 2014 et Symposium of Torments, 2017), KARNE revient donc enfoncer le clou dans l’œil et rompt avec six années de silence qui avaient commencé à faire douter de sa survie dans l’underground. Et cette inquiétude somme toute légitime est rassurée aujourd’hui de la plus noble des façons, le quintet nous ayant réservé des retrouvailles tonitruantes et placées sous le signe du Black le plus puriste et accrocheur.
Raido & H.K.A (guitares), Armory (batterie), Apathy (chant) et Lethal (basse) peuvent donc s’avancer à découvert, les premières mesures de Condamnés nous explosant au visage d’une puissance à décimer bien des armées. Bien décidé à revenir sur le devant de la scène, le groupe joue donc crânement sa carte, sans se poser trop de questions inutiles, capitalise sur sa réputation pour convertir les grognons et les fédérer d’un riff ample ou d’une attaque rythmique lapidaire. Enrobé dans une production impressionnante, ce troisième album est une sacrée réussite, inutile de ménager un suspense qui n’a pas lieu d’être. Les compositions sont solides, délicieusement décadentes dans leur approche du classicisme, et surtout, éminemment violentes, au moins autant que la seconde vague allemande des années 90.
Le Black Metal de KARNE est donc tourné vers l’international. Capable de se mesurer à la moindre écurie noire de jais, le groupe garde le menton relevé pour défier les cadors du genre, de ceux que l’on retrouve à longueur d’année en bonne position dans les tops. Et « Mandragores » de mettre les choses au point, en toute grandiloquence et en tapis de ténèbres foulé du pied par des musiciens lucides, mais capables de se sublimer.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Condamnés ne fait guère dans le détail. Loin de l’avant-garde et proche d’un héritage européen capitalisé avec les années, cet album prône une brutalité sourde et clinique, qui se veut quand même suffisamment viscérale pour concerner les plus durs des irréductibles purs. On se laisse donc aller à cette farandole de licks acides, de cassures Heavy et autres breaks d‘ornementation, puisque la forme affichée par les français à de quoi persuader les plus sceptiques, mais aussi ceux qui en avaient oublié jusqu’à leur existence.
En six morceaux pour quarante minutes de résumé exhaustif, Condamnés nous incarcère dans les geôles de la tradition, nous laissant un pauvre quignon de pain sec et une gamelle d’eau croupie. Le régime est donc difficile à suivre, mais la fermeté du propos en justifie les règles draconiennes. Il faut en effet se concentrer sur les pistes pour pouvoir en appréhender la beauté formelle, une beauté évidemment qui s’apparente à une laideur sublime, de celles que les ténors des nineties ont exploitée jusqu’au moindre reflet du miroir.
Le rythme soutenu, la voix stable et écorchée, la basse omniprésente et concentrique, tout contribue à réchauffer une atmosphère déjà méchamment oppressante, et le souffle brûlant des riffs corrosifs intervenant lors de breaks vraiment durs contribuent à faire de ce troisième album une sacrée épreuve des sens, sans pause, sans respiration, et sans issue possible.
On pouvait craindre que KARNE ne revienne par la petite porte avec un disque trop calqué sur les précédents, ou au contraire avec une œuvre trop ambitieuse et altérée, mais il n’en est rien. Le groupe de Nancy est toujours aussi crédible, agressif, puissant et louable. Ce nouveau tracklisting va permettre une campagne live qui écrasera tout sur son passage, mais aussi une reprise de contact avec la fanbase sous d’excellents auspices.
Et sincèrement, un groupe capable de nous achever d’un « La Fin aux Misérables » épuisant et traumatique mérite forcément toute l’attention que vous pourrez lui accorder. Un retour en fanfare, avec des moyens, une intention, et une crédibilité inattaquable. Tout ce qu’on attend légitimement d’un album de Black Metal traditionaliste, mais sévère.
Titres de l’album:
01. Mandragores
02. Kamarde
03. Limbus Puerorum
04. Caffa
05. Le Silence est D'ordre
06. La Fin aux Misérables
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)
17/01/2025, 22:44
Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !
17/01/2025, 17:03
J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.
16/01/2025, 18:21
Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène.
16/01/2025, 12:15
Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.
16/01/2025, 10:22
Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)
15/01/2025, 12:58
Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)
14/01/2025, 09:27
Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.
13/01/2025, 08:36
Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête.
13/01/2025, 07:59
Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)
12/01/2025, 17:38
Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)
12/01/2025, 14:27
Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.
11/01/2025, 12:16
Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)
10/01/2025, 09:12
J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)
09/01/2025, 19:49