Si vous êtes un metallogermanophile et que vous pensez ne serait-ce qu’un instant à votre passion, deux noms émergeront comme étant les porte-drapeaux naturels et incontestables du Metal à l’allemande.
DORO et UDO.
UDO venant juste de nous offrir une nouvelle tranche de vie en quincaillerie, il était somme toute assez naturel que sa sœur de coeur en fasse de même, et la princesse blonde n’a pas lésiné au moment de graver ses dernières pensées sur disque. Pas moins de deux CD, vingt morceaux, une heure et vingt minutes de musique, un duo ou deux fameux, des reprises ne l’étant pas moins, largement de quoi sustenter l’appétit féroce de sa fanbase qui commençait à avoir les crocs depuis la sortie du gargantuesque Forever Warriors, Forever United. Ce concept album à l’époque affichait une forme insolente, et des proportions tolkiennes. Il convenait donc de ne pas revenir par la petite porte avec un quickie plus ou moins habilement troussé, mais bien avec un disque fort, conséquent, aux rondeurs affolantes.
Et ça, DORO l’avait très bien compris. Dont acte.
Conqueress - Forever Strong And Proud est donc un pavé qu’on se prend en pleine tête, et qui rebondit dans la pièce comme une superballe de plomb trouant tout sur son passage. Visiblement, la chanteuse allemande avait beaucoup de choses à dire, et encore plus à chanter, mais toujours la même mission : faire vivre une certaine vision du Metal, non édulcoré, fier et d’acier, pour rester sur ce trône chèrement acquis au fil des années. Réussite ? Pas vraiment, même si le charme opère par intermittence, si on craque sur la voix de la prêtresse Pesch évidemment.
Entouré de musiciens plutôt capables (Johnny Dee - batterie, Bas Maas & Bill Hudson - guitares et Stefan Herkenhoff - basse), DORO se laisse donc aller à ses fascinations et donne à sa foi une nouvelle dimension, entre révérence à ses influences et assomption d’un style qu’elle ne compte jamais trahir. Et si l’œil est rebuté par l’une des pochettes les plus laides de ces dernières années (à peu près autant que celle du dernier SAVAGE GRACE, ce qui en dit long), l’oreille est immédiatement caressée à la râpe à fromage, laissant couler le sang des tympans alors que la crinière décrit des cercles réguliers dans l’espace.
C'est assez Heavy. Les cinq premières chansons sont totalement Heavy. Puis un hymne en mid tempo vient temporiser. La chanson « I Will Prevail » est la plus Heavy, je pense. Et l'ouverture que j'aime particulièrement s'appelle « Children Of The Dawn ». Il y a aussi quelques duos sur ce disque.
Trois lignes, le terme « Heavy » employé trois fois, largement de quoi rassurer les fidèles qui auraient pu croire que leur valkyrie s’était égarée sur les chemins de la compromission, comme elle l’avait fait au début des années 90. Mais la DORO 2023 n’est plus celle qui se cherchait il y a si longtemps, et incarne toujours le versant le plus standard d’un Heavy Metal joué avec les tripes et le cœur. Mais alors, cet album, que vaut-il vraiment ? Est-il plus riche artistiquement que le dernier UDO, qui lui se contente de recycler sans vergogne ses recettes jusqu’à la nausée ?
Oui, non, peut-être. Il faut déjà s’armer de courage pour affronter ce mastodonte qui ne fait ni dans la dentelle de Calais ou de Douvres, mais plutôt dans le cuir de Bavière.
Notons immédiatement un duo amusant entre la chanteuse et Rob « Metal God » Halford sur la reprise de « Living After Midnight », qui sert aussi de single, mais qui franchement, n’apporte pas vraiment de bière au moulin. Rob a du mal, Doro est en pilotage automatique, et les arrangements sonnent plus faibles qu’un chasseur avec une carabine à plomb. Mais Conqueress - Forever Strong And Proud ne peut évidemment pas se résumer à cette friandise qui fait mal aux dents, et recèle quand même de très bons moments, comme cet autre duo sur le trépidant « Bond Unending », entonné en tapant du pied avec Sammy Amara de BROILERS. Ce deuxième duo est d’ailleurs l’un des moments les plus enthousiasmants d’un disque très formel, qui joue évidemment sur la passion d’un public pour un Metal passéiste à outrance, entre Power Metal, agression létale et up tempo fatal.
Gardons pour la bonne bouche l’enflammé « Time For Justice », aussi énergique qu’un SINNER sous perfusion de Red Bull, le tendre et orchestral « Fels In Der Brandung », balade grandiloquente comme les aime tant DORO, mais aussi ces quelques astuces de production, ce piano qui vient taquiner les guitares de temps à autres, quelques mélodies plus efficaces que la moyenne, des ambiances tamisées, et évidemment, la voix de la chanteuse qui est toujours aussi puissante et rauque.
Je mentirai évidement en affirmant que cet album m’a transcendé au point de me faire oublier que depuis des années DORO s’exprime plus volontiers par le biais de compilations qui s’entassent ou de live qui se ramassent (à la pelle). Mais j’ai néanmoins passé un moment assez agréable, assez en tout cas pour faire semblant de ne pas remarquer que « Rise » est l’archétype de morceau à l’électro-encéphalogramme plat qui se contente d’un riff éculé jusqu’à la moelle, ou d’oublier que « Best In Me » a des relents d’au-revoir sur le quai de la gare de Berlin à deux heures du matin.
Faites-vous plaisir, et cédez au charme d’un « Total Eclipse Of The Heart » entonné à quatre voix avec une fois encore l’incontournable biker cuir Halford (mais beaucoup plus crédible que la cover de JUDAS PRIEST, un comble), et laissez-vous aller à un headbanging d’enfer sur l’appropriation du « The Four Horsemen » de METALLICA & Mustaine. Deux plaisirs clairement régressifs, mais qui finalement, font le charme d’un disque fourre-tout, sans réelle direction artistique.
Für immer ?
Pour le moment, et c’est déjà pas mal.
Titres de l’album:
01. Children Of The Dawn
02. Fire In The Sky
03. Living After Midnight
04. All For You
05. Lean Mean Rock Machine
06. I Will Prevail
07. Bond Unending
08. Time For Justice
09. Fels In Der Brandung
10. Love Breaks Chains
11. Drive Me Wild
12. Rise
13. Best In Me
14. Heavenly Creatures
15. Total Eclipse Of The Heart
16. Warlocks And Witches (Intro) (Bonus Track)
17. Horns Up High (Bonus Track)
18. True Metal Maniacs (Bonus Track)
19. Heart In Pain (Bonus Track)
20. The Four Horsemen (Bonus Track)
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30