Vous êtes-vous déjà demandé ce qui aurait pu se produire si SUICIDAL TENDENCIES avait continué sur sa lancée triomphale de Lights, Camera, Revolution/The Art Of Rebellion, et si Mike Muir n’avait pas pété les plombs façon Punk édenté pour oser nous refourguer la bouse infâme que fut Suicidal For Life ? Moi oui, parce qu’à l’époque je n’avais pas très bien compris où il venait en venir, jusqu’à ce que je tombe sur l’horreur Lost My Brain! (Once Again), sur laquelle on trouvait le bon gros Mike en compagnie d’un Steve Jones à l’agonie venu cachetonner pour se payer ses bières…Avec le recul, je pige évidemment que cette atrocité laissait préfigurer du split du groupe, avant reformation lucrative quelques années après. Mais nous sommes nombreux à avoir regretté que ST n’ait pas capitalisé sur son line-up majestueux pour enregistrer le chef d’œuvre définitif qu’on était en droit d’attendre de lui, au croisement de ses deux LP majeurs, ce fameux The Art Of Rebellion et cet imparable How Will I Laugh Tomorrow…Mais il semblerait que depuis 2015 des suédois se posent la même interrogation, sauf qu’entre-temps, ils ont trouvé la réponse, qu’ils ont d’ailleurs enregistrée eux-mêmes. On aurait d’ailleurs pu croire que cette fameuse réponse se cachait sous la pochette sans ambiguïté de leur premier LP éponyme, mais pourtant, il semble plus raisonnable de penser qu’elle se cache sous celle plus rougie de leur second, ce Control the Fear qui reprend à son compte les recettes de son prédécesseur en les poussant à leur paroxysme de perfection. Sans être vraiment sur que le parallèle total convienne à ces musiciens tenant visiblement à leur identité, je ne peux m’empêcher de voir en cette suite d’aventures un hommage plus qu’appuyé à Rocky George et Mike Muir, et ceci, sans même tenir compte de la façon de porter le bandana bien vissé sur le regard…Mais plus simple pour comprendre la situation, envoyez-vous donc les quarante-cinq minutes que les originaires de Stockholm vous ont concoctées, et vous serez à même de comprendre pourquoi la Suède se retrouve soudainement délocalisée du côté de la Californie, genre à Venice par exemple…
Sincèrement, et sans faire preuve de subjectivité, Control the Fear est sans doute le meilleur album de SUICIDAL TENDENCIES à ne pas avoir été composé et enregistré par SUICIDAL TENDENCIES, et ce, en tenant compte de la désaffection de Robert Trujillo, parti depuis faire le malin chez les METALLICA pour pas grand-chose. On retrouve en effet au casting de cet album tous les (f)acteurs de l’époque, humains et stylistiques évidemment, de ces riffs de guitare malins et férocement métalliques, à cette attitude frondeuse et délicieusement Punk, réfutant toute affiliation trop proche avec le Metal. Et si les interventions en solo sont vraiment dignes des plus vifs éclairs de Rocky George, si le chant singe à la perfection tous les tics de Mike « I’m a punk » Muir, jusqu’à lui emprunter ses murmures et son phrasé étouffé si spécifiques, les NEGATIVE SELF ont au moins le mérite d’emballer le tout sous un packaging bien plus mélodique et parfois plus véloce, ce qui leur permet de prendre discrètement leurs distances avec leur glorieuse référence. Sans se départir d’une hargne omniprésente, ce nouveau chapitre de l’histoire claque comme un riff lâché avec conviction, et nous conforte dans l’idée que la Suède est décidément l’Eldorado du renouveau vintage nostalgique, tant l’atmosphère de ce disque pue le skate-park improvisé dans les rues californiennes des années 80. Tout est reproduit à l’identique ou presque, et aménagé de ce perfectionnisme suédois qui transforme en or tout le Metal qu’il touche de ses mains habiles, et nous entraîne dans le sillage de cette fameuse scène Crossover d’il y a trente ans, qui savait alors aménager avec beaucoup d’intelligence un passage évident entre Hardcore et Metal, pour tenter de réconcilier les deux publics dans un même élan d’enthousiasme. Et rayon enthousiasme, les NEGATIVE SELF s’y connaissent comme personne, eux qui sont capables d’unir des chœurs symptomatiques de la vague BAD RELIGION à des couplets adaptés de la tendance suicidaire au sein d’un même creuset d’influence, au point de friser les cimes de l’hybridation Pop/Thrash/Punk sur un titre aussi radical que « Answers », aux harmonies magiques et à la rythmique ludique. Miracle ? Un petit oui, même si les esprits chagrins n’y verront une fois de plus qu’un vulgaire talent de reproduction…
Certes, les copies se ressemblent, et les chemises aussi. Mais comment ne pas craquer face à un tel panache, qui reprend à son compte le meilleur du Crossover pour l’adapter à l’air du temps, et le réactualiser sans le déformer ? C’est la mission suicide acceptée et relevée par le quintette (Tor Nyman, Andreas Sandberg, Frank Guldstrand, Jakob Strand and Viktor Svensson), qui parfois, fait tellement bien illusion qu’on se sent obligé de vérifier le line-up pour ne pas se tromper (« Underneath The Wave », « No Common Ground »). L’ombre de ST plane donc encore très bas sur cette réalisation, qui assume totalement ce parrainage non désiré, et qui en profite pour placer quelques salves plus personnelles, à l’instar de ce bouillonnant « A New Beginning », qui pendant plus de six minutes nous dresse un état des lieux des relations tendues entre Heavy Metal charnu et Thrash ténu, osant juxtaposer dans une même créativité la préciosité mélodique des TESTAMENT au radicalisme des EXCEL, tout en incrustant façon chausse-pied des kilos d’harmonies typiques de la nouvelle vague métallique suédoise. Un résultat plus que probant, et quasiment miraculeux, qui sans occulter les emprunts nombreux, permet de les faire passer avec plus de clémence et de facilité. Nous avons même droit de temps à autres à quelques poussées d’intensité, lorsque le climat se durcit et que la double grosse caisse rugit, pour un terrassant « In My Head » qui tente l’introspection plus intime pour en extirper des crises de rage Thrash plus félines. Dotés une fois encore d’une production au-dessus de tout soupçon, les suédois enquillent et enfilent les hymnes en toute décontraction, enchaînant les plans percutants avec une aisance déconcertante (« Drawing Blood », un up tempo tout ce qu’il y a de plus bondissant, « Never Leave », son petit frère tout aussi nerveux et dansant), multipliant les allusions tout en gardant le ton (« Curse of Life », avec la bonne accélération pile au bon moment), et se répandant en soli/révérences au talent énorme de Rocky George, la caution Metal de SUICIDAL, qui doit certainement être fier de constater que son style a fait des émules aussi appliqués.
Et le quintette de Stockholm de terminer son travail de sape par une ultime pirouette artistique, intronisant une entame digne du séminal « You Can’t Bring me Down », avec guitare acoustique en plainte et guitare électrique en complainte, histoire de nous laisser sur un sentiment de plénitude absolu et de certitudes convaincues. Il serait restrictif de ne voir en Control the Fear et NEGATIVE SELF qu’une simple distorsion du temps façon « Mike et sa bande perdus dans un vortex suédois », mais il est indéniable que les plus jeunes ont beaucoup appris des plus âgés. Le constat dépendra donc de votre capacité à lire entre les lignes et à voir ce qui ne se voit pas forcément, et si nombre d’entre vous rangeront ce nouvel album dans le placard du plagiat, d’autres, encore plus nombreux sans doute y verront une seconde révélation, faisant des suédois les messies qu’on n’attendait plus.
NEGATIVE SELF motherfucka ?
Titres de l'album:
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21/11/2024, 08:46
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