De temps en temps surgissent des abysses des monstres de cruauté, dont la seule mission sur terre semble être de la détruire par le feu, la torture, et dont le seul crédo semble une affiliation sans bornes au mal le plus absolu, un peu comme l’incarnation musicale d’un Antéchrist dont tout le monde attend l’avènement. Il est pourtant difficile d’imaginer que la somme de puissance des groupes existant puisse être dépassée, tant nous avons tout entendu et tout subi, pourtant, des artistes continuent de repousser les limites de l’abomination pour tenter de ravir le trône de l’ignominie musicale…C’est ainsi que j’ai fait la connaissance des américains d’ULTHAR, se plaçant d’emblée sous l’égide de Lovecraft et de ses ramifications divines, via leur premier longue-durée Cosmovore qui parvient en moins de quarante minutes à nous persuader qu’il est l’œuvre la plus bruyante, la plus puissante et la plus maléfique de l’année, pourtant déjà chargée en déflagrations soufflantes (EROSION en étant le dernier et plus fameux exemple). Nous en venant de la mythique Bay-Area, ULTHAR se veut point de convergence des styles les plus extrêmes de l’underground, et propose un genre de Death aux relents Black d’une férocité sans égale, le tout cousu en filigrane de références Thrash et d’énergie Hardcore malsaine. Parvenus à ce stade de la chronique, vous me direz sans doute que le créneau du Blackened Death est réputé pour abriter en ses tranchées les musiciens les plus classiques de la scène, et que la digression en elle-même commence à sérieusement s’essouffler au regard d’une production toujours plus pléthorique. Vous n’aurez pas complètement tort, et votre serviteur d’éviter avec fourberie toutes les sorties estampillées, par peur de devoir affronter une fois encore la logorrhée musicale de nostalgiques de la débauche, certes fertiles en termes de blasphème, mais désespérément stériles en créativité. Sauf que ces californiens-là sont des gens décidément intelligents, et qu’ils refusent implicitement de se laisser enfermer dans une petite case restrictive. Mieux, ils explosent les convenances, additionnent pour mieux démultiplier, et finissent par écrire des chansons qui vous explosent au visage comme des évidences faciles à identifier : la vilénie instrumentale n’a donc pas de frontières, et Cosmovore est bien décidé à explorer sa propre galaxie.
Fondé en 2014 du côté d’Oakland, ce trio formé de Shelby Lermo (VASTUM, EXTREMITY), Justin Ennis (VOID OMNIA, RUINE, ex-MUTILATION RITES, ex-TOMBS), et Steve Peacock (MASTERY, PANDISCORDIAN NECROGENESIS) et hébergé sur le label US 20 Buck Spin aura donc patienté quatre ans avant d’élaborer l’un des manifestes les plus cruels de la scène Death US, en mâtinant son inspiration de divagations cosmiques, de délires organisés et d’à-coups impressionnants de cruauté, parvenant à synthétiser le génie maléfique de quelques références éprouvées et de suggérer des accointances prononcées avec quelques grands noms de scènes multiples. A l’écoute de ce premier jet, on ne peut s’empêcher de penser à une combinaison fatale entre le MORBID ANGEL le plus satanique, le NOCTURNUS le plus tantrique, le BEHEMOTH le plus emphatique et l’ABSU le plus diabolique, le tout sous couvert d’une crédibilité Thrash héritée du patrimoine régional histoire de brouiller les pistes encore un peu plus. Et emballé dans un artwork du grand illustrateur Ian Miller (le jeu Warhammer, les livres de Lovecraft, et les films de Ralph Bakshi, un CV assez fourni et crédible) et bénéficiant d’une production, et d’un mixage signés Greg Wilkinson (BRAINOIL, DEATHGRAVE, VASTUM, NOOTHGRUSH) aux studios Earhammer d’Oakland, Cosmovore est plus qu’un simple LP, il est un monolithe de noirceur qui redonne foi en les commandements les plus néfastes de l’underground, et surtout, la preuve formelle que l’extrême a encore beaucoup de choses à dire pour peu qu’il accepte de transcender ses influences pour élaborer une recette personnelle. Sans formellement bousculer l’ordre des choses, le trio américain mélange les cartes et les redistribue, et finit par nous questionner sur la pertinence des affiliations de styles, tant le sien semble indescriptible, et à cheval entre plusieurs, nous obligeant de fait à nous concentrer sur la portée universelle d’une musique qui n’a d’autre but que de flatter nos plus bas instincts.
C’est donc fort, très fort, dense, rapide, effroyablement brutal, mais surtout, mélodique dans la méchanceté, et intelligent dans la construction. En étalant sous nos tympans des qualités qu’on pensaient disparues depuis l’orée de la transformation finale entre Death et Black, ULTHAR incarne avec horreur Der Übermensch de Friedrich Nietzsche, symbiose mythique entre l’homme et le divin, et substitue ce même divin avec le malin pour se transformer en Damien de l’apocalypse, et ravager la planète de sa violence outrancière et de son talent de destruction absolu. Et pour ceci, nul besoin d’annonce à priori avec trompettes de Jéricho et souffle céleste, puisque dès « Cosmovore », les principes d’annihilation sont étalés au grand jour, et plus prosaïquement, la technique incroyable de ce trio de musiciens faisant autant de bruit qu’un quintet. Avec des riffs de guitare qui hissent le vibrato au rang de composante majeur de la dissonance, une section rythmique qui pulse et joue le contretemps à un tempo infernal, et un chant en dualité d’ignominie gravissime, les éléments sont compacts, et le résultat immédiat. On reste sonné de tant de méchanceté instrumentale agencée comme un manifeste de haine avec des chapitres ordonnés et une pensée structurée. Et échappant de fait à la facilité routinière d’un Death boosté au Black pour sonner encore plus cruel, Cosmovore ressemble plutôt à la symbiose parfaite entre les deux styles, adoptant la théâtralité morbide du Black pour noircir la violence sourde du Death, et ainsi trouver l’équilibre le plus parfait entre l’extrême onction et le passage dans l’au-delà. On pense donc à une mise en terre aussitôt suivie d’une résurrection dans le sang, tant les cinq premiers morceaux illustrent à merveille la douleur de la mort et l’exaltation de la renaissance, qui découle donc sur un massacre systématique de la race humaine.
Des graves qui souillent l’âme, des aigus qui la maculent d’idées noires, des enchaînements sans répit et des déliés d’une fluidité incroyable, pour une précision dans la bestialité que les DESTROYER 666 ont dû rêver en plus d’une occasion. Et comme celle-ci fait le larron, « Dunwich Whore » nous narre l’histoire de Lavinia Whateley, jeune fermière qui accoucha du fils du démon sur plus de treize minutes d’exactions, prouvant par la même que la brutalité la plus excessive peut faire preuve d’ambition progressive tout en gardant son ADN de cruauté intact. Et avec un niveau technique largement au-dessus de la moyenne, mais une humilité effective les empêchant de sombrer dans la démonstration, une science quasi-exacte du riff qui les fait placer le bon plan au bon endroit, et une envie de sonner comme l’hybride le plus dangereux de la création, ULTHAR fait exploser tous les potentiomètres, et bloque constamment dans le rouge, sans pourtant paraître excessif. Il l’est pourtant, et ce premier album démontre que la fin de la route de la souffrance auditive est encore loin, et qu’il reste une bonne marge aux créatifs de l’ombre pour nous malmener.
Titres de l’album :
1.Cosmovore
2.Solitarian
3.Infinite Cold Distance
4.Entropy-Atrophy
5.Asymmetric Warfare
6.Dunwich Whore
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29/04/2025, 02:24
@DPD:Pour finir, là où je pense te rejoindre (je suis presque quinqua, pourtant), c'est que je trouve insupportable les anciens qui prennent les jeunes de haut en leur disant que ce qu'ils font ne sera jamais au niveau de ce qu'ils ont connu.
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@DPD: que METALLLICA n'apporte plus rien à la scène depuis 30 ans, je pense que ça fait plus ou moins consensus. Mais je ne vois pas ce que LORNA SHORE apporte non plus.Ceci étant dit, qu'est-ce qu'un "jeune" de la scène. Moins de 40(...)
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