KRALLICE est certainement l’un des groupes les plus stables et prolifiques de la scène Black underground. Pensez donc, en quinze ans d’existence, aucun changement de line-up, et pas moins de dix longue-durée au tableau d’horreur. Depuis l’initial et éponyme de 2008, les new-yorkais n’ont pas ralenti la cadence, au point de nous avoir proposé trois albums en autant d’années, depuis Mass Cathexis, sans perdre en imagination ni efficacité. En 2021, je vous entretenais déjà de la haute teneur en énergie et originalité de Demonic Wealth, neuvième enfant du quatuor, et c’est donc très logiquement que je reviens cette année vous parler de ce Crystalline Exhaustion, qui continue le travail de sape entrepris il y a déjà plus d’une décennie.
Colin Marston (guitare), Mick Barr (chant/guitare), Nicholas McMaster (basse/chant) et Lev Weinstein (batterie) et leur CV collectif qui ressemble à celui individuel de Rogga Johansson (mais qui contient des implications notables et des participations intéressantes, dont GORGUTS, ENCENATHRAKH, BLOODY PANDA, CORAL CROSS, DAMNATUM, j’en passe et des dizaines) continuent donc leur route biscornue et pleine de circonvolutions comme si de rien n’était, et surtout, comme si les évènements extérieurs n’avaient aucune prise sur leur réalité…parallèle.
Si le mot avant-garde est souvent lâché avec une facilité déconcertante dès lors qu’on ne peut raccrocher une locomotive à des wagons existant, autant dire qu’il prend tout son sens dans le cas des américains. Mais pas cette avant-garde élitiste auquel seule une poignée d’initiés faisant partie du cénacle comprend, ou fait semblant de comprendre. Celle réservée aux amateurs de DODECAHEDRON, BLUT AUS NORD, LITURGY, VAURA, mais aussi les plus accessibles WOLVES IN THE THRONE ROOM et SPECTRAL LORE, mélange d’audace instrumentale et de textures vocales sourdes et lointaines, de parties écrasantes et de longs passages plus modérés et harmonieux.
De fait, ce nouvel album ne déroge pas à la règle établie par les new-yorkais eux-mêmes. Aller là où seuls leurs fans les attendent, et encore, pas toujours. Se cacher derrière le paravent de l’expérimentation mélodique, des arrangements improbables, et de ces synthés dissimulés sous une épaisse couche rythmique traditionnelle, à base de vélocité contrôlée et de blasts enchaînés. Pour ne pas prendre les néophytes pour des imbéciles et caresser leur fanbase dans le sens du poil hirsute, les KRALLICE mettent les choses au point dès le départ, via un « Frost » de dix minutes qui congèlera les plus timorés pour les empêcher d’avancer à l’aveugle dans le grand froid du chaos. Percussions éparses mais puissantes, basse cognée, cymbales aigues, l’ambiance est plantée, et le décor dessiné. A la manière d’un NEUROSIS vraiment pas pressé, le quatuor prend son temps pour développer ses premiers arguments, et appâter. On se laisse prendre alors à cette séance d’hypnose instrumentale douce et lancinante, qui préfigure quelque chose de néfaste qui ne tarde pas vraiment à arriver. Mais les ingrédients sont là, l’attitude est inamovible, et la tradition respectée : l’atmosphère lourde et vicieuse.
Adeptes des riffs les plus étranges et dissonants sur tapis de BPM, les quatre américains évoluent toujours dans l’ombre d’un BM de tradition, revu et corrigé par la nouvelle génération US de défricheurs d’horreur. Si beaucoup, comme d’habitude, verront en cette musique une simple accumulation de sons irritants et de postures presque hype, d’autres se noieront dans l‘inspiration en laissant leurs sens faire office de boussole, bien que savoir où l’on se situe n’est pas le propos les plus important dans cette affaire.
Six morceaux, qui une fois assemblés forment la même symphonie. Aucun changement notable, toujours le même désir d’explorer les abysses les plus sourds, sans écho, sur la surface desquelles les graves s’écrasent dans un fracas de brutalité stérile. Les voix, difficilement discernables et agissant comme une narration de l’au-delà, prennent à la gorge et révèlent un rêve éveillé pas franchement rassurant. KRALLICE n’étant pas de ces groupes consensuels qui forcent le respect de leur génie, Crystalline Exhaustion ne parlera une fois de plus qu’à un noyau de fans choisis, sans que ceux-ci ne se prennent pour des élus désignés par des dieux anciens.
Le title-track, imposant de son quart d’heure toute la majesté sombre d’un groupe qui n’a jamais accepté la moindre concession, permet de tirer le rideau sur un dernier acte grandiloquent, mais une fois encore cryptique dans son déroulé. L’orage passe, d’une violence rare, détruit quelques toitures et consciences, mais laisse un souvenir diffus, comme une catastrophe irréelle. Ce synthé onirique, ces lignes mélodiques étranges qui nous renvoient au Krautrock le plus évanescent, cette façon de confronter le BM et l’Ambient sans chercher à désigner un vainqueur est donc la particularité la plus frappante de ce groupe hors-norme, qui parvient tous les ans à pondre un nouveau chapelet de morceaux qui complètent sa légende.
Sans être un choc, ou une déviation, Crystalline Exhaustion est au contraire une marche de plus qui descend vers les enfers les moins chauffés de la mythologie religieuse. Une façon de voir le Black Metal comme une profession de non-foi absolue, et un terrain d’expérimentation fabuleux.
Titres de l’album:
01. Frost
02. Telos
03. Heathen Swill
04. Archlights
05. Dismal Entity
06. Crystalline Exhaustion
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