La Suède, Eldorado des amateurs de Metal depuis les années 90, et qui n’a de cesse de puiser dans ses propres réserves pour nous abreuver de sensations sonores fortes. L’héritage semble donc inépuisable, telle une corne d’abondance qui répand ses richesses à travers tout le pays, rassasiant ses propres représentants d’effluves diverses qui caressent nos oreilles d’année en année.
Cette fois encore, la démonstration tourne au tour de force, et à la reconnaissance de facto d’une suprématie que même le géant américain ne saurait remettre en cause. Foin d’AOR, de Death ou de Nu Metal torsadé, nous nous consacrerons pour cette nouvelle chronique/preuve à une forme assez intéressante de Thrash moderne, qui emprunte les chemins autrefois dessinés par le jeune MESHUGGAH et la vague nordique de relifting d’un Death à l’agonie.
Et tout en gardant une emprise certaine avec un Heavy Metal plus traditionnel, ces nouveaux chevaliers du froid font la loi dans un registre hybride, qui permet à ce qui semble être leur premier effort de se démarquer de la production nationale pléthorique habituelle.
Pas vraiment de bio à se mettre sous les yeux, puisque les HIN HÅLE sont du genre discrets. Ils nous renvoient sur leur page Facebook à un antique MySpace pas vraiment au goût du jour, et l’entrée qui leur est consacrée sur la bible Encyclopedia Metallum nous aiguille vers une autre formation locale homonyme, n’ayant sans doute rien à voir avec eux.
Des infos difficiles à obtenir, pour un album qui pourtant en vaut largement la peine. Disponible sur toutes les bonnes plateformes de téléchargement légal, Damnation est une excellente surprise digitale qui confirme que nos « presque » voisins Suédois restent bien les maîtres de la diversité et de la brutalité maîtrisée, et les dix pistes de ce LP sont autant de déclarations d’intention.
Pourtant, les définir avec précision n’est pas chose facile. Si leurs guitares sont incisives, elles savent se montrer caressantes et ondulantes, alternant les riffs pointus et touffus et les déliés plus aérés. Saccades, arpèges, glissando et HO/PO, Conny Mohlin et Joakim Repo revisitent toutes les techniques pour apporter aux titres l’ambiance qui les sert au mieux, tandis que la paire rythmique Jonas Viktorsson (basse) / Gustav Salminen (batterie) suit le mouvement en imposant sa patte, alternant les up, mid et tempi cassés pour ne jamais laisser la routine s’installer.
De son côté, le vocaliste Tobias Wetterlind joue le rôle difficile de catalyseur/fédérateur de ses intonations légèrement Hardcore sur les bords, qui parfois flirtent avec les harmonies doucereuses d’un Metalcore qui a brillamment su éviter le piège du conformisme mercantile.
Comme vous le constatez, il n’est pas chose aisée que d’enfermer les HIN HÅLE dans une petite case bien cloisonnée. Le quintette suédois préfère les grands espaces libres, et laisse voguer son inspiration, qu’on pourrait situer dans un accès de facilité entre un MESHUGGAH soudainement libéré du carcan rythmique millimétré, une version modernisée et adoucie des KRIXJHALTERS, qui aurait gardée en tête l’affranchissement stylistique du projet OMNITRON sans se départir de sa rudesse initiale, et une version polie des AT THE GATES, plus enclin à visiter les catacombes d’un Heavy scandinave assombri que le cimetière des illusions Death de nineties ravagées.
Je ne sais pas si le contexte cité vous aidera à mieux appréhender ce Damnation qui ne se laisse pas facilement apprivoiser, mais je ne vois pas d’autres repères à vous donner, même si quelques morceaux échappent à ce repère presque orthonormé (“My World », Heavy mélodique, Thrash catatonique, et Hardcore métronomique, une grosse surprise accrocheuse et limpide).
Le chant de Tobias Wetterlind, souvent assez proche des intonations d’un Jens Kidman, sans la profondeur de baryton dérangé, est assez plaisant, et se montre très à l’aise dans tous les registres, y compris les plus harmoniques ou le grain de sa voix se montre assez abrupt pour ne pas verser dans la mièvrerie prévisible.
En optant pour des structures évolutives assez amples, les Suédois n’ont certes pas choisi la voie la plus simple. Les morceaux évoluent entre quatre et sept minutes et proposent donc un nombre conséquent de thèmes qui s’enchaînent sans temps mort, même si quelques pauses mélodiques et médianes viennent aérer le tout à intervalles réguliers.
Mais « Breath Me In » plante le décor avec un souci du détail remarquable, et vous permet d’entrevoir la suite dans des conditions assez confortables, sans trop en dévoiler non plus.
On se dit à ce moment-là que le Crossover proposé par les HIN HÅLE va se montrer particulièrement plaisant, avec son parti-pris de non choix délibéré et trop tranché, et « The Wall » confirme les bonnes impressions tout en dégageant d’autres chemins plus escarpés.
Arpèges électriques, pour six minutes à cheval entre un Néo Thrash moderne et un Heavy travaillé, le tout dopé d’un chant Hardcore hargneux et belliqueux, pour une sacrée valse sans hésitations entre divers courants extrêmes ou pas, qui rappellent les confluents des premiers MESHUGGAH, un peu comme si Contradictions Collapse était entré en collision justement avec le meilleur de l’inspiration des SOILWORK.
Le quintette ose même le pari du single « K.O. », qui cavale comme un dératé AT THE GATES de « Blinded By Fear », tout en ménageant quelques accalmies harmoniques sublimées par des arrangements vocaux séduisants et convaincants. D’un autre côté, radicalement opposé, l’épique « The Reinventing » se laisse le temps de voir venir, et dispose de sept minutes bien tassées pour organiser son pèlerinage sur les terres progressives. Intro sublime d’acoustique percutée de coups massifs, couplet principal mixant MEGADETH à TESTAMENT et AT VANCE, et cheminement piano qui laisse traîner quelques soli bien troussés, avant de laisser parler un final homérique que le MAIDEN le plus inspiré aurait pu imaginer, c’est une preuve que ces cinq-là ne sont pas du genre à se laisser amadouer par la conformité.
A l’inverse, ou presque, l’uppercut « Call me Napalm » échauffe les esprits de son Thrash contemporain, qui une fois encore sombre dans le gros Heavy mordant, dans une alternance savamment orchestrée pour se montrer d’une optimale efficacité.
S’il est certain que la recette est appliquée avec une constance indéniable, et que certains thèmes se retrouvent employés avec régularité, HIN HÅLE parvient toujours à trouver une approche un peu différente pour faire passer la pilule de la violence maîtrisée (« Six Feet Down », « The Wall »). L’ensemble dégage donc une fraîcheur indiscutable, et offre un visage différent de l’invasion suédoise mondiale.
Damnation est donc un album solide qui sans tergiverser, louvoie entre plusieurs tendances tout en affirmant la sienne. Et qui ravira de fait les amateurs d’un Metal sans concession, mais avec multiples options. Le genre de LP qui vous en met une bonne dans la tronche avant de vous passer un peu de pommade pour ne pas laisser trop de traces.
Pas fourbe, mais un peu sournois sur les bords. Dans le bon sens du terme évidemment.
Titres de l'album:
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