C’est déjà l’heure du troisième album pour les thrasheurs allemands de STAGEWAR, qui depuis presque vingt ans, déclenchent des guerres sur scène comme nombre de leurs compatriotes. Après Living on Trash, petit précis à l’usage de ceux vivant sur des tas d’immondices, Killing Fast, bible des tueurs de masse qui détestent perdre du temps, les originaires de Neu-Anspach nous avouent qu’ils sont un danger pour eux-mêmes, et la révélation a de quoi étonner.
Fondé en 2003, le combo a patiemment élaboré sa stratégie de conquête de l’Europe, en quatre démos successives, distribuées à raison d’une par an. Et c’est finalement huit ans après son émergence que le quatuor a enfin osé plonger dans le grand bain, révélant ses intentions et dévoilant ses ambitions. On a toujours des préjugés en ce qui concerne le Thrash d’outre-Rhin. Les aînés de SODOM, KREATOR, TANKARD, DESTRUCTION ayant mis en place un système de destruction systématique par la violence outrancière, on a souvent tendance à considérer que les musiciens de la belle Allemagne ne sont que de violents bourrins incapables de ralentir le rythme et d’insuffler un peu de finesse à leur musique. La donne avait légèrement changé à la fin des années 80, avec l’arrivée de la vague Techno-Thrash portant les HOLY MOSES, DEATHROW et autres à flots, mais cette arrière-pensée reste fermement ancrée dans l’inconscient collectif, alors même que les groupes nationaux cherchent depuis longtemps à s’éloigner de leur patrimoine génétique.
Ce qui est assurément le cas des sympathiques STAGEWAR. Si vous ne connaissez pas le groupe et vous attendez donc à une resucée des plans popularisés par ASSASSIN ou EXUMER, vous en serez pour vos frais, TVA comprise. Le quatuor (James Reuter - basse, Josef Schweng - batterie, Kimon Roggenbuck - guitare et Dominik Dezius - guitare/chant, les deux membres originaux) développe depuis longtemps des arguments beaucoup plus nuancés, n’hésitant pas à faire appel au pouvoir fédérateur du groove pour séduire son auditoire, et osant les contrastes les plus nuancés pour ne pas verser dans le classicisme outrancier.
En gros, old-school, mais pas trop. Et l’écoute du monstrueux « Box Of Dirt » vous prouvera immédiatement que les allemands ne sont pas tous des chats gris la nuit, avides de bière et de riffs bon marché. Certains cherchent leur pitance ailleurs que dans les poubelles des choucrouteries, et ne rongent pas les saucisses de la brutalité pour les vomir en mode gros rouge qui tâche. Avec un beat chaloupé, une voix à rendre les représentants de la NOLA ivres de bonheur, et une tendance à mixer les conditions de vente de CORROSION OF CONFORMITY et EXHORDER, les cousins germains surprennent de leur audace, et s’éloignent des schémas Thrash les plus convenus.
Sans négliger l’importance de la vitesse, il est évident que Danger to Ourselves se concentre plus sur l’efficacité que sur la rapidité. Les titres sont conséquents, construits, professionnels, et nous offrent autre chose qu’un plan détaillé de la Ruhr ou qu’un voyage organisé et nostalgique de la Bay-Area. Thrash parce que, mais terriblement Heavy aussi, parfois bluesy, traitant la mélodie comme une alliée et non un ennemi (« Follow Me »), STAGEWAR se démarque de la faune conformiste, et chasse sur ses propres terres. Doté d’un soliste volubile qui ne parle jamais pour ne rien dire, d’un frontman qui occupe l’espace avec intelligence, et d’une section rythmique polyvalente s’adaptant à merveille aux climats, ce troisième album se révèle dans sa profonde richesse, et nous entraîne sur les traces des chercheurs en hybridation les plus redoutables, avec en exergue cette façon de plaquer un refrain entêtant sur un thème brutal (« R.U.N. »).
Attendez quand même un peu avant de décerner la palme Thrash de l’année 2021. Si les qualités du groupe sont nombreuses et bien mises en avant, une certaine routine finit par s’installer, avec des lignes de chant qui ne s’écartent jamais du grognement préventif, et une guitare qui mouline souvent dans le même sens. Mais nous avons au moins la chance d’éviter les chœurs de la fête de la binouze, et celle de pouvoir apprécier des choses que METALLICA et EXODUS ne sont plus trop capables de produire (« Enough Is Not Enough »)
Il faut souligner que les morceaux dépassent souvent une durée raisonnable, sans tomber dans l’excès, mais juste assez pour distiller des plans inhabituels dans le créneau. Et même si la cadence raisonnable donne parfois des fourmis dans les jambes tant on aimerait que les BPM s’envolent (« Hands Of Time »), le talent du groupe pour combiner violence et musicalité est exceptionnel, et loin des tentatives les plus lénifiantes d’un TESTAMENT compromis.
Nous aurions évidemment apprécié un titre bien killer cavalant comme un dératé, mais la fin de l’album, fidèle à l’éthique, clôt le débat avec mesure. Intéressante sortie, groupe méritant, et bouée lancée dans l’océan de la nostalgie déjà surpeuplé de nageurs désespérés attendant qu’on s’intéresse à leur sort. STAGEWAR reste fidèle à lui-même, et c’est finalement ce qu’on préfère chez eux.
Titres de l’album:
01. Danger To Ourselves
02. Box Of Dirt
03. Follow Me
04. R.U.N.
05. Enough Is Not Enough
06. Hands Of Time
07. Nothing For Nothing
08. Over And Out
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