Des danois qui jouent un Death suédois, rien d’anormal. Après tout, ça reste entre voisins, alors laissons-les balayer devant leur propre porte. Fondé en 2019 à Silkeborg, le quatuor impitoyable et imputrescible BLOODGUTTER se concentre donc sur la période la plus n’Roll d’ENTOMBED et consorts, et nous propose avec son premier album un solide exercice de style nostalgique.
Bjørn Jensen (basse), NP Nielsen (batterie), Mikkel Lau (chant) et Heinz B. Jacobsen (guitare, arrivé en 2023 avec sa HM-2) ne sortent donc pas des sentiers battus, et rentrent même dans le rang. Death Mountain est l’album typique de cette nouvelle génération brutale qui admire un peu trop ses aînés pour défigurer ou s’approprier leur héritage, et qui se contentent donc de reprendre quasiment à la lettre des classiques comme Wolverine Blues, Where no Life Dwells, j’en passe et des moins incontournables.
Le tout s’écoute donc avec plaisir, parce que bien composé et bien joué, mais on se demande où l’originalité est partie se terrer, puisque tous les plans ou presque sont prévisibles à loisir, malgré quelques tentatives pour sonner plus brutal que ses cousins.
A ce titre, divisions le groupe en deux parties. D’un côté, les indécrottables passéistes, chant, guitare et basse, qui ne prennent aucun risque pour ne pas gâcher la non-surprise. De l’autre, un batteur culotté qui surprend de ses rythmes osés, et de ses blasts posés. En effet, inutile de le cacher, la véritable plus-value de ce disque est son batteur phénoménal, qui transcende des titres aussi traditionnels que respectueux, et qui permet à BLOODGUTTER d’atteindre une moyenne enviable.
Loin de moi l’idée de rabaisser ses trois comparses, mais autant reconnaître que sans son flair pour coller des fills un peu partout, et sans sa clairvoyance groovy impeccable et contagieuse, Death Mountain aurait immédiatement été rangé sur les étagères des nouveautés qui n’en sont pas. Pour comprendre mon argumentation, tendez l’oreille sur « For the Empire », démonstration de force et de savoir-faire de NP Nielsen, qui sait exactement de quelle manière aborder un morceau pour le rendre plus costaud sous les bravos.
De fait, impossible de se montrer trop dur envers un groupe qui cache en son sein un tel trésor percussif. Sans lui, BLOODGUTTER aurait fini à l’orphelinat des enfants cachés d’ENTOMBED, entre LIK et autres jumeaux plus ou moins reconnaissables. Misant tout sur les ambiances, le groupe parvient donc à se tirer lui-même vers le haut, même si le chant monolithique freine souvent l’avancée.
Et il est tout à fait possible d’envisager BLOODGUTTER comme un fils illégitime des suédois, dont on aurait échangé les étiquettes à la naissance, en ajoutant celle de Dave Lombardo. Aussi étrange que cela puisse paraitre, Death Mountain sonne comme du SLAYER joué à la nordique, avec titres rapides, moments lourds, et tension permanente. La bonne humeur congelée qui se dégage de l’ensemble, cette osmose entre partenaires, et surtout ce poulpe capable de dynamiter des hymnes formels, permettent à ce premier album de passer la barre des anecdotes pour atterrir dans la rubrique « incongruités sympathiques ».
Format super-court pour cavalcade dans les prairies (« Unternehmen Gericht »), pesanteur morbide et effluves de putréfaction dans les naseaux (« Fill the Graves »), panache en mid et bravade en fast, BLOODGUTTER suit les balises pour atterrir, et reste sur la piste avec précaution. Espérons juste que NP Nielsen ne reste pas l’unique qualité de ces danois, qui gagneraient à écouter autre chose que Left Hand Path ou Clandestine pour exister par eux-mêmes.
Bien, mais pas top. Mais bien quand même.
Titres de l’album:
01. Katabatic Death Wind
02. Rot Awaits
03. Artillery Supremacy
04. Torture Sacrifice
05. Down the Gutter
06. For the Empire
07. Unternehmen Gericht
08. Fill the Graves
09. Whirlwind of Doom
10. Jaws of Death
11. Our Final Conflict
Mais bien quand même !
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