Pour bien comprendre l’univers de DEHA, il faut s’immerger dans sa discographie pléthorique. L’homme, plus que prolifique, nous avait déjà servi huit albums en 2021, treize en 2020, deux en 2019 et deux aussi en 2018. En 2022, année pas encore entamée de moitié, deux longue-durée sont déjà disponibles. Ce qui porte le score à un total de vingt-cinq albums pour ce musicien belge, passé par la case Sofia avant de revenir dans son pays en 2017. Sous l’identité de DEHA se cache celle plus civile d’Olmo Lipani, artiste constamment affamé de sonorités, qui outre DEHA, bat pavillon sur une multitude de navires. On citera pour l’exemple ACATHEXIS, COAG, CULT OF ERINYES, DRACHE, GOD ENSLAVEMENT, IMBER LUMINIS, INIQUITATEM, LYKTA, MALADIE, MERDA MUNDI, SATURNIAN TEMPEL, SILVER KNIFE, SLOW, SORTA MAGORA, THE NEST, THE PENITENT, TRANSCENDING RITES, WE ALL DIE (LAUGHING), WOLVENNEST, WRATH OF THE NEBULA, YHDARL, IGNIFER, histoire de brosser un portrait qui se voudrait presque exhaustif.
Olmo Lipani est donc méchamment productif, mais aussi incroyablement versatile. A tel point que son entrée sur The Metal Archives ne mentionne aucun autre style que « divers », ce qui en dit long sur les visages que peut arborer le belge. Même au sein d’un seul cadre, il reste imprévisible. Ainsi, en prenant en compte le parcours de DEHA, la forêt dense qu’incarne cette discographie insatiable cache en son sein des arbres différents, et une flore vaste et riche. En 2022, l’homme a donc décidé de frapper un grand coup avec deux longue-durée consécutifs, alors même que ce Decadanse a été rendu obsolète dès le premier avril par la sortie d’Averses.
Je ne parlerai donc pas de nouveauté, mais bien d’importance. Avec ses deux morceaux, Decadanse et son titre en clin d’œil à Gainsbourg développe de beaux arguments, résumés à sa façon par Olmo qui n’aime rien tant que brouiller les pistes pour vous perdre encore un peu plus. Le musicien décrit donc le full-lenght en ces termes :
Imaginez deux histoires sombres, nées à la préhistoire, et qui prennent fin dans un futur dans lequel la mort par le vide de l’espace est un moyen de torture. Dans l’une d’entre-elles, le Diable de toutes choses. Dans l’autre, une prière pour la déesse de la guerre.
Ce petit laïus ne nous en dira pas plus sur la conception de ce Decadanse, qui musicalement, incarne une sorte de synthèse géante de tous les sous-courants du Black Metal moderne. Beaucoup de violence et de gravité, des cris stridents, des itérations irritantes, des silences pesants, des reprises fulgurantes, pour imposer une sorte de BM progressif Ambient, très dense et bourré d’informations à prendre avec des pincettes.
Comme le souligne l’auteur de l’œuvre, Decadanse mixe menu des sources d’inspiration classiques (Death, Black, Doom), et d’autres beaucoup moins conventionnelles (Electronique, Glitch et autres). Le mélange entre les deux, loin d’être roboratif se montre entraînant, violent évidemment, mais fascinant même si les deux compositions piétinent allègrement les vingt minutes. Avec une intelligence rare, DEHA dose ses ingrédients, et parvient sans peine à nous entraîner dans les dédales de son imagination, à la recherche d’un passé étrange menant à un futur dystopien. Avec un son de guitare parfois grésillant, parfois imposant, le musicien tisse des strates de sons, agence ses chapitres, et nous raconte effectivement une longue histoire qui ne se répète que très rarement. De fait, et malgré des composantes externes, son BM reste d’obédience classique, et ne se repose pas sur des astuces d’arrangements ou des escroqueries de production destinés à cacher la stérilité derrière un écran de fumée.
Si « The Devil's Science » peut s’appréhender sans trop de mal, malgré ses bidouillages électroniques et ses litanies vocales d’humeur changeante, « I Am The Dead » se veut beaucoup plus étrange dans sa conception, privilégiant la pesanteur, l’oppression, les dissonances, et une sorte de dérive spatiale en mode torture des sens. L’homme cite avec justesse les DODSHEIMGARD, qui semblent être une source d’inspiration très crédible, mais il y a longtemps que son propre univers se passe de comparaison.
Violence, pression, ambiances, dissonances, échos effrayants, DEHA passe en revue toutes ses obsessions et signe un album cohérent, et loin d’être indigeste. En alternant les séquences avec beaucoup de panache, Olmo Lipani peut se vouloir symphonique, Raw, classique, avant-gardiste, sans jamais sonner surfait ou imbu de lui-même. Et la perfection justement, est atteinte grâce à des idées vraiment pertinentes, via quelques riffs accrocheurs, et des parties rythmiques doublées de synthétiseur.
On s’immerge donc dans cette aventure sans doute sans lendemain, dans une ère préhistorique sauvage et un avenir spatial cruel, pour respirer une bouffée de cet air vicié, sans bouée ni repère. Et malgré une propension à parler sans s’arrêter, et à produire plus que de raison, DEHA signe avec Decadanse un manifeste de violence pure et crue, et un voyage intemporel nous faisant traverser tous les âges de l’histoire.
Une danse sacrément décadente, pour un Black Metal pluriel et fertile. Et l’un des plus corsés du marché.
Titres de l’album :
01. The Devil's Science
02. I Am The Dead
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