Je pense que c’est avec la scène de Birmingham que tout ça a commencé. Les échanges de musiciens entre groupes, le mélange fanzine/activisme musical, et surtout, ces projets incestueux qui pullulaient alors sur le circuit. Et il faut admettre que ce bon vieux Shane n’était pas le dernier à s’investir plus que de raison. Tiens, UNSEEN TERROR, entre autres, c’était déjà lui, bien obsédé par ce vieux Odie, chien perdu dans les griffes saillantes de Garfield.
Un peu plus tard (beaucoup plus tard), il nous a refait le même coup, genre fin des nineties. En 1999, il se met à la colle avec le gros Nick Barker, en mal de violence brute depuis son passage chez les DIMMU. Ça avait donné quoi déjà ?
Ah oui, Pleasure Pave Sewers, et ça ramonait pas mal, surtout dans cette époque de transition entre deux conceptions de la brutalité…
Depuis, une poignée de disques, toujours avec le chauve derrière les fûts, sauf qu’entre temps les collègues ont changé, mais après tout, le principal c’est que la bête soit encore en vie non ?
Et elle l’est bordel, peut-être plus que jamais…
Alors, on avait tous bien aimé les délires de Necropolis Transparent, mais c’était il y a six ans, alors il était temps de relever les compteurs. Chose faite, les ingénieurs sont passés, et visiblement, la consommation d’électricité à salement grimpé depuis.
Tiens, un nouvel arrivant s’est même fait les dents puisque Tompa s’est barré pour se concentrer sur le regain d’intérêt AT THE GATES. Il a laissé sa place à Kevin Sharp de l’entreprise VENOMOUS CONCEPT, et je sens déjà les jugements désapprobateurs quant au choix de ce nouveau haut-parleur. Mais après tout, ça compte pour du beurre puisque l’âme de LOCK UP a toujours été Shane. Ce side-project, c’est son bébé-bruit, son exutoire NAPALM DEATH larger than life, dans lequel il peut s’extérioriser sans penser à abîmer la légende. Quoique celle qui se dessine autour de LOCK UP soit en passe de devenir huge elle aussi…
Et puis en fait, le Kevin en question a l’air plutôt à l’aise dans ses pompes, et gueule bien comme il faut, même s’il faut un peu de temps pour s’adapter à son organe. Mais ça colle, pas de problème, et puis l’instrumental est tellement balèze que la seule condition pour le ruiner aurait été de filer le micro à un aphone fan de Blues….
Demonization, c’est un nouvel album, le quatrième en presque vingt ans de carrière, mais excusez ces musiciens d’être plus occupés que la moyenne, sans pour autant lâcher la barre du fun. Et ce nouvel album en est rempli, pas forcément musicalement, puisque la tendance est toujours au tir de barrage bien maousse, mais on sent clairement un regain de forme en arrière-plan, et surtout, une inspiration qui va puiser aux racines de quoi foutre le bordel dans le landerneau Death/Grind qui depuis quelques temps, a vraiment tendance à se mordre la queue et à overtrigger tout ce qui passe à sa portée. Mais avec les LOCK UP, la philosophie old-school à encore de beaux jours orageux devant elle. Car Shane et Nick ont une fois de plus patiemment élaboré la bombe de la rentrée à grands coups de rythmiques en biseau et de riffs en coups de marteau. Alors non, Demonization ne fera exception à aucune règle et reprend même le boulot là où le NAPALM des années 90 l’avait arrêté.
Il est brutal, mais ça c’est une évidence, et se veut survol de la carrière des Anglais sous un autre nom, tout en gardant en focale la puissance dévastatrice d’opus comme Enemy Of The Music Business mais en se rappelant des épisodes Indus d’Inside The Torn Apart ou Words From The Exit Wound. C’est patent et manifeste sur une grosse poignée de titres, alors que les autres surfent sur les accords graves d’un début de carrière Death qui avait transformé ND en machine de guerre à décibels outranciers.
Difficile à juger, ce quatrième LP est de ceux qu’on écoute, et qui vous noient les neurones sous une énorme masse d’informations de déflagrations Death/Grind sans empathie aucune. Objectivement, il est largement à la hauteur du mythe des trois premiers, la basse de Shane brille toujours autant de sa distorsion exagérée, et les fluctuations oscillent entre Crust bien tassé, Grind débridé et légères touches Induscore assumées, sans que personne n’y trouve rien à redire. Le groove est là (« Foul From The Pure », qu’on pourrait dénicher en bonus-track d’un des derniers efforts de ND), mais Nick en arrière-plan assure les plans qui concassent l’espace sonore et s’accolent parfaitement aux riffs du pas si discret que ça Anton Reisenegger (depuis 2009 quand même), et vogue la galère pour quarante minutes de leçon Death’n’Grind dictée d’une voix de barbare et jouée par un quatuor qui a la dalle et déchaîne les enfers tout en gardant sous le pied assez d’enthousiasme pour rendre ça léger et agréable.
Pas grand-chose à dire de plus sur un tel disque qui de toute façon ne convertira personne, mais ne rebutera surtout pas les fans de Shane, gardien de la flamme, qui malgré les années passées et les cheveux de plus en plus perdus n’en a rien à foutre et continue sa route, en jouant de sa basse comme si elle était la proverbiale épée pourfendeuse de dragons de l’underground à deux balles.
Ok, les toms de Barker sonnent comme des barils de lessive, mais les guitares sont grasses et la grosse caisse tout sauf éparse, alors, rien à dire, c’est du très bon travail qui valait largement le temps d’attente.
Les mecs d’ailleurs rentrent dans le lard dès « Blood and Emptiness », qui ne ménage ni le Crust ni le Grind, continuent NAPALM Grind avec le terrifiant et blasté « The Decay Within the Abyss », dont les dissonances de guitare nous renvoient encore du côté de l’ancienne et regrettée paire Harris/Pintado, et puis « Locust » dévaste les champs de l’impossible comme des insectes revanchards qui exhument des années de rage. Trois morceaux, et tout est dit, le reste n’a plus qu’à suivre, puisqu’on est déjà conquis.
Mais que ça n’empêche pas les mecs de la jouer un peu plus fin sur le surpuissant et oppressant « Demonization », plus de cinq minutes de lourdeur appuyée par ce chant si harassant, ou de foncer en mid pour bien vous raser le bide avant l’opération, avec la dissection Hardcore « Instruments of Armageddon ».
Petit plaisir en quickie (« Mind Fight », ou comment faire comprendre aux THE KILL et à BRUTAL TRUTH qui sont les vrais patrons), et final long play sur « We Challenge Death » qui passe en revue toutes les tendances pour rétablir la sienne une fois pour toutes. Et c’est vrai qu’ils emmerdent la mort. Pourquoi ? Parce qu’ils sont trop vivants depuis le début et qu’ils sont éternels quoi qu’il arrive.
LOCK UP, c’est un vice même pas coupable. Ou un vice de procédure alors, une faille dans l’espace-temps qui nous renvoie à nos propres démons du passé.
Ou sans se prendre la tête, le meilleur album de Death/Grind de ce premier trimestre, enregistré pour s’amuser, et qui en effet donne plus de plaisir que tous ces allumés du boucan qui ne font que répéter ce que les grands hurlent depuis trop longtemps.
Shane président ?
Non, il s’en cogne, la politique, les honneurs, c’est du vent. Et ça le décoiffe, alors…
Titres de l'album:
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21/11/2024, 08:46
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