On les avait un peu oubliés, soyons honnête, pourtant, ils étaient toujours là, tapis dans l’ombre, depuis 2017, année de sortie de leur premier album Death by Prescription. Les SEMPERVIVUM reviennent donc chargés comme jamais avec un nouveau long sous les bras, et l’envie bétonnée par une inspiration renforcée. Et on les comprend au jugé des premiers morceaux de cet inespéré Despicable Being That You Are. Le répertoire bouscule, et les premières minutes, cruciales, cartonnent comme jamais. Entre mélodies à la suédoise et franchise rythmique à l’allemande, le quatuor renouvelé nous donne une belle leçon d’efficacité, dans un créneau pourtant difficile.
Mais alors, que leur manquait-il pour opérer leur grand comeback ? Un batteur tout simplement, assise indispensable pour un groupe de ce créneau, et dont le tabouret vient donc d’être occupé pour le plus grand plaisir des fans. Et en totale autoproduction, le quatuor de Damelevières bande les muscles, durcit le ton, pour séduire les amateurs de sensations fortes agencées et réfléchies, dans la plus pure tradition nineties de nos orchestres les plus fameux.
Ainsi, Yann (basse), Titi (guitare), James Blosch (guitare/chant) et Geoffray Noel (batterie) peuvent enfin reprendre le cours de leur carrière, satisfaits d’un travail très bien fait. Car si Despicable Being That You Are reste classique, il n’en intègre pas moins un brin de wah-wah, des breaks rudement bien amenés, et des soli enchanteurs et harmonieux qui caressent les tympans que la rythmique explose de son allant.
Pour un deuxième album, Despicable Being That You Are est motivé comme une mule traversant un désert. Les riffs sont nombreux et variés, l’attitude bravache, mais l’humilité toujours à portée de main. « Evil Fate » confirme les espoirs formulés à l’époque de leurs débuts (qui remontent aux nineties quand même), et le petit parfum NO RETURN de début de carrière est assez envoutant. Mais loin de se placer sous l’égide d’influences envahissantes, le groupe préfère développer son propre vocable agressif pour le rendre plus accessible aux masses.
Dans une certaine mesure.
On sent beaucoup de méchanceté scandinave sur ce disque, qui reprend les recettes du Néo-Death de Stockholm, tout en y ajoutant cette french touch légèrement thrashy qui se manifeste par un tempo élevé, mais toujours contrôlé. La combinaison fonctionne donc à plein régime, et un titre aussi puissant que « Despicable Being That You Are » achève de nous convaincre de la pertinence de la démarche. La mise en place est précise, les enchaînements fluides, et la posture ferme. Grâce à une production propre mais rêche, le groupe joue sur un mélange de velours et de papier de verre qui sied parfaitement à son optique. Faire mal, mais le faire bien.
Les percussions donnent une idée de l’envie des frenchies. Avec un nouveau batteur derrière le kit, il s’est senti pousser des ailes, au point de tenter le hit brutal improbable avec le sec et nerveux « Commander in Chief of the Armed ». Mid tempo, BPM qui volent, écrasements symptomatiques de l’école Death floridienne, pour un festival de possibilités, et un éventail de capacités. Aucune raison donc de craindre un quelconque ennui, puisque tout a été fait pour vous captiver pendant une grosse demi-heure.
Classique dans la forme mais inventif dans le fond, SEMPERVIVUM se permet même quelques audaces fugaces, comme cette superbe intro sur « Tin Soldiers ». Un gros travail sur le son et les arrangements pour aboutir à quelques mesures hypnotiques, immédiatement ruinées par une bourrasque accentuée. Là est donc la force d’un groupe qui regarde autour de lui et se laisse imprégner par son époque, vouée à la diversité et à l’hommage old-school. Difficile à dater tout comme enfant de son époque, Despicable Being That You Are est une méchanceté adorable, que les amateurs de mélodies dans la bestialité apprécieront à sa juste valeur marchande.
AT THE GATES en voyage à Paris, c’est sans doute une carte postale un peu cliché, mais ça s’approche de la vérité. C’est en tout cas ce que semble nous dire l’infernal « The Force of Nature », qui joue la rage et la sagesse à parts égales, et qui nous entraîne sur le terrain de l’ambivalence, entre ces couplets sulfureux et ce refrain heureux. Et ça fonctionne, tout en fausse simplicité, qui peine à cacher le potentiel individuel de chaque musicien.
2017/2024, en sept ans, SEMPERVIVUM n’a rien perdu de sa crédibilité. Et si on peut encore sentir une marge de progression conséquente, le bilan temporaire est largement positif, et évidemment, bien au-dessus de la moyenne. Confrontant PESTILENCE à SOILWORK sur le très malin « Mos Majorum », pour finir sur un épilogue sous-marin et troublé comme le « Planet Caravan » de BLACK SABBATH, le groupe signe un disque très honnête, et franchement recommandable.
Nous sommes tous mauvais, mais l’essentiel est d’en être conscient. Et éventuellement, d’essayer de se racheter en faisant les bons choix. SEMPERVIVUM nous guide sur le chemin de la rédemption, encore faut-il avoir les bonnes foulées. Car ces gens-là marchent vite.
Titres de l’album :
01. Evil Fate
02. Sempervivum
03. I Am
04. Despicable Being That You Are
05. Commander in Chief of the Armed
06. Tin Soldiers
07. The Force of Nature
08. Mos Majorum
09. Voices from the Depths
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