Plus on vieillit, moins on la garde haute. A moins d’avoir recours à un subterfuge, elle finit par se flétrir, et devenir purement fictive. Mais avec un peu d’imagination, et un minimum d’aide extérieure, notre estime peut redevenir celle qu’elle était lorsque nous avions vingt ans, toutes nos dents, et encore la vie devant nous. Parvenu à un certain âge, on la remise, et on cherche un équivalent pour ne pas sombrer dans les idées noires et l’auto commisération. Et en matière d’idées noires, j’en connais un rayon. Lorsqu’elles m’envahissent comme un souvenir fané, je me lance à la recherche d’une échappatoire, et le trouve souvent du côté du Black Metal.
Qui pour moi reste le style le plus fertile du spectre de l’extrême.
Ainsi, les ukrainiens de MOLH proposent leur premier album en autoproduction, alors qu’il a tout d’une superproduction. Ce trio plus ou moins anonyme ne cherche pas à bousculer les idées reçues en termes de violence et de mélodies, mais parvient à poser sur les créneaux de la cathédrale défroquée sa pierre, aussi noire que toutes les autres. Sans autre renseignement que trois pseudos (Izidij - chant, Sinister - guitare/basse et Tolf - batterie), MOLH se présente sous un jour très flatteur, et déroule avec Deus sa méthode Assimil du BM mélodique qui rappelle un sacré mélange entre DISSECTION et MAYHEM.
Norvégienne l’influence ? Parmi tant d’autres, puisque la rigueur germanique trouve aussi asile dans ce clos un peu louche, qui abrite les moutons noirs les moins disciplinés de la terre Metal. Mais avec un sens de la concision très affuté, des capacités individuelles notables et un panache pour mettre en scène des atmosphères brumeuses, MOLH joue le plus naturellement du monde, et s’appuie sur un son gigantesque que Devin Townsend pourrait leur envier.
Du Black en Imax ? Non, je n’irai pas jusque-là, mais nous sommes bien loin de l’intimisme générique du genre, mais tout aussi éloigné de sa frange la plus avant-gardiste. Le trio ne prouve rien, et ne le désire pas, mais nous enserre de sa majesté sur des morceaux à la grandiloquence intense (« The Witch’s Curse at Dusk », du DARKTHRONE avec un budget conséquent).
Efficace, poétique, macabre, ce premier long est juteux, et plaque des thèmes accrocheurs, qui vagabondent dans l’esprit comme des vers sur un cadavre. Plutôt sur-mesure que prêt-à-porter, Deus a fière allure, et se repose sur un principe d’alternance rythmique pour ne pas lasser, malgré sa durée réduite. Entre formalisme rassurant et agressivité ne manquant pas de mordant, Deus avance à sa cadence, prend le temps, le précipite, mais ne gâche jamais ses cartouches.
On sent une véritable admiration pour les fondateurs, sur le lapidaire et incendiaire « From the Depths of the Black River », mais on frémit aussi d’un hiver précoce sur « Iron Roots, Iron Hearts » qui insère une mélodie Folk slave de toute beauté.
Aussi probant dans le chaos qu’il n’est impressionnant dans le lourdaud, MOLH est tout sauf ce que la phonétique de son nom laisse craindre pour un francophone. « Beneath the Carpathian Moon » est vicieux, cite IMMORTAL, pilonne un mid tempo assez coutumier des attaques éclair de MARDUK, et coule le long des canalisations pour moisir tout ce qui est encore sain.
Très ancré dans les années 90 les plus opaques, Deus reste dans une moyenne d’intensité appréciable, mais ne prend pas de risques. Un premier album étant une présentation au monde, certains préfèrent ne pas se singulariser pour ne pas fermer de porte. Mais pas d’inquiétude à avoir, « Haunted by the Mavka’s Eyes » vous horrifiera comme une terreur nocturne, vous observant étouffer dans votre lit à la recherche d’un peu d’air.
Nous avons même droit à une tirade en langage national, grâce à « Коли Поля Стануть Червоними » qui lâche les chiens de l’enfer sur terre. On regrette qu’un ou deux morceaux ne se soient pas incrustés dans le tracklisting, mais la force de l’album est aussi sa cohésion, et sa pertinence. Sous cet aspect-là des choses, Deus respecte les dogmes, et force sur la puissance comme sur l’ambiance.
De quoi se sentir fier à nouveau, et se tenir en estime honnête. Pas le remède miracle attendu, mais avec MOLH, d’autres jeux de mots plus entendus auraient pu gâcher la fête.
Titres de l’album:
01. Blood on the Wheat Fields
02. Shadows of the Forgotten Forest
03. The Witch’s Curse at Dusk
04. From the Depths of the Black River
05. Iron Roots, Iron Hearts
06. Beneath the Carpathian Moon
07. Haunted by the Mavka’s Eyes
08. Коли Поля Стануть Червоними
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03/03/2025, 13:09
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Yep, c'était le war volume III de chez SOM. De mémoire les deux autres étaient ceux de Bloodthorn/And Oceans et Bethzaida/Anata. Un peu comme à la même époque le Thorns/Emperor mais c'était chez Moonfog :)
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Autant ils nous ont habitué à quelques pochettes bien merdiques, autant es deux dernières dont celle-ci sont magnifiques !
27/02/2025, 10:50
Merci beaucoup pour ce compte-rendu sur le vif. Je reviendrai avec plaisir à Rochefort !
24/02/2025, 13:32
C'est pas mal du tout, assez Marduk dans la période blast à tout va en effet. Je regrette juste toujours que sa musique ne soit pas aussi audacieuse que ses provocations, comme s'il s'arrêtait à mi-chemin, c'est plus un choix esthétique qu&apo(...)
24/02/2025, 13:31
Il y a un clin d'oeil à David Martin dans la chronique, on peut même aller jusqu'à "Enjoy The Violence" :-) les " vétérans" comprendront....
24/02/2025, 13:04
Complètement fan Merci holy records.J ai découvert bon nombre de groupe de metal à grâce à vous et ce catalogue que j epluchais à quête de la nouvelle pépite... que de nostalgie etque d heure de lecture.Et just(...)
24/02/2025, 11:28
Superbe Label en effet . J'ai justement decouvert le Metal Extrème avec ces groupes cités et inconnus jusque là
24/02/2025, 10:26