En jouant avec les codes et l’identité artistique, Dino Jelusick fait preuve d’un certain culot. Mais le fait d’avoir reproduit à sa sauce le célébrissime American Gothic de Grant Wood en dit long sur sa soif de reconnaissance hors de ses frontières et de son envie de mettre l’Amérique à genoux. Mais en lieu et place de la fameuse ferme, de l’air complètement neutre des personnages dépeints et de cette fourche si symbolique de l’Amérique rurale, le preux chanteur a choisi une ville à l’agonie, des regards défiants et une batte de base-ball pour bien indiquer qu’il ne compte pas adopter des bonnes manières pour se faire accepter. Mais après tout, depuis le début de sa jeune carrière, l’artiste n’a pas vraiment fait profil bas. Après l’Eurovision junior en 2003, des albums originaux et de reprises et des vidéos balancées sur Youtube avec son groupe ANIMAL DRIVE, des montées sur scène avec TRANS-SIBERIAN ORCHESTRA, et une incursion sur les œuvres de RESTLESS SPIRITS, ce premier album est une suite tout ce qu’il y a de plus logique, et surtout, la preuve s’il en était besoin que le tempétueux vocaliste est bien l’une des têtes les plus recherchées des DRH musicaux. Il n’est donc guère surprenant de retrouver le bonhomme au catalogue déjà fourni de la turbine Frontiers, qui n’est jamais la dernière à chauffer pour les surprises bien préparées. Alors, si jusque-là le jeune Jelusick nous avait impressionnés de sa voix chaude et puissante, il lui manquait encore un écrin pour la mettre en valeur, et surtout, un orfèvre pour la tailler comme un diamant vingt-quatre carats, histoire de gommer les imperfections et trouver la forme pour qu’elle s’épanouisse pleinement. Et après de nombreux contacts avec des stars du Metal international, c’est aux côtés de l’hyper-productif George LYNCH que nous retrouvons notre nouveau héros du micro, par le truchement d’une association élaborée par ce bon vieux Serafino. Mais la combinaison de deux énormes talents suffit-elle à produire un grand album ? Non, et la simple évocation du naufrage Coverdale/Page suffirait à prouver cette assertion, sauf que les ego s’accordent parfois pour trouver le meilleur terrain d’entente.
Profondément attaché au patrimoine eighties (spécialement ses représentants les plus mélodiques, AEROSMITH, EUROPE, BON JOVI, etc…), Dino Jelusick s’est donc offert les services du meilleur sidekick qui soit sur le marché, sauf qu’il serait injuste d’ignorer la contribution 90’s de Lynch à notre musique préférée. Certes, c’est bien de DOKKEN dont on se souvient le plus facilement, eu égard au pedigree du groupe, mais en déduire que DIRTY SHIRLEY ne serait qu’une vaste affaire de nostalgie de plus serait une erreur impardonnable. Car le fantasque guitariste a prouvé depuis le premier split de son ancien groupe qu’il était largement capable d’adapter son jeu aux époques qu’il traverse, que ce soit au sein de LYNCH MOB, KXM, SWEET & LYNCH, THE END MACHINE ou en solo. Avec une discographie qui pourrait bien faire rougir bien des artistes plus capés que lui, George était donc le parfait parner in crime pour cette opération de survol d’un patrimoine qui ne s’est pas limité à une décade bien précise. Et la collaboration entre l’un des guitaristes les plus doués de sa génération et un chanteur dont la réputation commence largement à dépasser ses frontières a donné l’un des albums les plus excitants et frais de ce nouveau siècle, et au moins aussi probant que n’importe quel chapitre de la saga BLACK COUNTRY COMMUNION. L’entente musicale entre les deux hommes frappe d’ailleurs les sens dès l’ouverture flamboyante de « Here Comes The King ». Avec ce titre en forme d’aveu d’ambition démesurée, Dino Jelusick abandonne immédiatement toute mesure et toute tendance présumée à l’humilité pour s’affirmer comme le vocaliste d’exception qu’il est. Lourde batterie à la LED ZEP, riff qui rappelle les plus grandes heures rebelles des seventies, pour un démarcage de luxe de la vague Rock dru, avec des allusions multiples à Coverdale, à DEEP PURPLE, CACTUS, et tous les seigneurs passés. Certes, l’entrée en matière est classique, et joue sur du velours, mais la portée émotionnelle du titre est indéniable, profonde, et laisse des séquelles délicieuses dans la mémoire auditive. Avec son timbre chaud et lyrique qui rappelle les plus grands du micro, de David à Ian en passant par Ronnie James, Jelusick lâche la performance d’une vie, et nous convainc du bien-fondé des opinions dithyrambiques à son sujet. De son côté, Lynch fait du Lynch, assombrit ses riffs et peaufine ses soli, le duo de tête se sachant très bien épaulé par une section rythmique unique. Avec l’assise de Trevor Roxx à la basse et Will Hunt (EVANESCENCE) à la batterie, George et Dino peuvent se permettre toutes les audaces, et passer d’une décade à l’autre en bons caméléons qu’ils sont. Et si les seventies marquent de leur empreinte indélébile les deux premiers morceaux du disque, les arrangements modernes de « Dirty Blues » prouve que les musiciens n’ont pas l’intention de s’enfermer dans une période précise.
Chaloupé, œillades énamourées au WHITESNAKE des années 80, sans oublier quelques astuces électroniques des nineties, le cocktail est corsé, le ton donné, et l’ambiance plantée. Les deux alliés n’ont pas leur pareil pour tenter le Crossover global, et mixer les décades avec bonheur. C’est donc de cette façon qu’ils échappent à une étiquette encombrante de nostalgic band, avec en exergue des thèmes hérités de la scène alternative des années 90 (« I Disappear »), qui se retrouvent fondus dans une humeur bluesy, la marque de fabrique de Lynch depuis le premier au-revoir de DOKKEN. Onze morceaux pour une heure de musique, c’est assez long pour une introduction, et pourtant, rien ne vient gâcher la fête. Avec un peu de diversité et des digressions plus légères, DIRTY SHIRLEY se montre sous son véritable jour, celui d’un groupe uni et non d’un simple tremplin pour un chanteur en manque de reconnaissance, et les saillies moins emphatiques comme « The Dying », qui ressemble comme deux gouttes d’eau à un inédit récent de EUROPE, ou l’épileptique « Siren Song », qui de son titre aiguille sur une fausse piste ZEP prouvent que le duo peut tout évoquer, tout aborder, se montrer à l’aise dans tous les registres comme si des années d’expérience reliaient les deux musiciens. On savait depuis longtemps Lynch capable du meilleur, mais ce premier album prouve qu’il est toujours capable de se remettre en question pour adapter son talent à son environnement. Sans abandonner ses propres références, le guitariste est toujours aussi prompt à s’approprier un matériau de légende pour le faire sien. C’est ainsi qu’il singe les meilleurs tics de WHITESNAKE pour un long shuffle suintant (« The Voice Of A Soul »), tout en retrouvant ses syncopes 90’s qui tranchent toujours autant (« Cold »).
Habitué des grands et fantasques chanteurs, Lynch n’a donc eu aucun problème pour offrir à Dino les décors dont il avait besoin pour s’imposer, et si chaque titre est une démonstration de force, ils n’en restent pas moins individuellement des moments de plaisir, comme le post-Grunge « Escalator », ou le final surprenant, acoustique et tribal « Grand Master ». Et entre un EUROPE moderne, un DOKKEN transcendé, un WHITESNAKE dopé et tout simplement un DIRTY SHIRLEY juste né, ce premier album est bien plus que la célébration de l’avènement d’un des meilleurs chanteurs de son temps. Il est une œuvre complète, témoignage d’un instant T où le talent de deux artistes n’en a plus formé qu’un seul.
Titres de l’album :
01. Here Comes The King
02. Dirty Blues
03. I Disappear
04. The Dying
05. Last Man Standing
06. Siren Song
07. The Voice Of A Soul
08. Cold
09. Escalator
10. Higher
11. Grand Master
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