Il y a des groupes qui décrochent la timbale du premier coup, rendant tout le monde jaloux. D’autres parviennent à lancer une mode à eux-seuls sans passer par la case démo ou galère, et qui filent des complexes. Tout ça arrive, inutile de le nier. Mais pour un METALLICA, un KORN, un SLIPKNOT, un IRON MAIDEN, combien de combos nagent dans l’ombre en espérant un jour célébrer leur grand soir ? Ne nous leurrons pas, la normalité, c’est l’underground, le cachet qu’on court d’année en année, à partir du moment où on décide de devenir professionnel. Le temps où les producteurs et CEO se pointaient dans les bars et les salles est révolu depuis longtemps, et deux choses paient : le travail, et la persévérance. Et encore, pas toujours. Et dire que les grecs de DREAMLORD sont persévérants est un doux euphémisme. Pensez-donc, un second album enfin sur le marché pour vingt-cinq ans de carrière. Ça laisse songeur quant à la foi qu’ont ces musiciens en leur musique, et ce, malgré un hiatus de deux ans pour cause d’obligations militaires. Fondé en 1994, DREAMLORD est en quelque sorte le porte-parole de tous ces groupes qui se remuent dans l’attente que le public les remarque au détour d’un gig ou d’un festival, mais qui s’accrochent, sans tenir compte du qu’en-dira-t’on. Et ils ont raison les bougres, puisque leur musique a bien des qualités qu’ils savent mettre en avant, de façon sobre, mais plutôt convaincante. Evoluant dans un créneau assez complexe de Heavy Thrash, les originaires d’Athènes ont donc dû patienter jusqu’en 2007 pour publier un premier EP éponyme, sans savoir alors qu’il leur faudrait encore douze ans pour lâcher leur premier long, en étant cette fois soutenus par un vrai label. Ce sont donc les nationaux de No Remorse qui s’occupent aujourd’hui du destin de ce quatuor (Babis Paleogeorgos – guitare/chant, Yiannis Glykiotis – guitare, Christos Peveretos – basse et Nikos Kousounis – batterie), et qui sont chargés de répandre la bonne parole de ce Disciples of War à travers le monde, tout du moins l’Europe dans un premier temps. Mais la tâche n’est pas difficile, puisque les athéniens ont fini par atteindre leur vitesse de croisière et un taux de persuasion tout à fait honorable. Du moins sur le papier.
Inutile de le cacher de fait, la musique de DREAMLORD n’a rien d’une épiphanie ou d’une percée dans l’inconnu. A la rigueur, leur album aurait pu être composé indifféremment dans les années 80, en tant qu’expression de la seconde vague de Thrash européen, dans les années 90, comme témoignage tardif d’une passion sincère, ou bien en 2019, comme allégeance à la vague old-school actuelle sans vraiment chercher à y adhérer. Mais le problème n’est pas là, puisque les nostalgiques s’accrochent peu importe l’époque, mais plutôt dans le caractère convenu de compositions qui ont la plupart du temps du mal à vraiment décoller. On sent que malgré les deux décennies passées à se chercher, les grecs n’ont toujours pas vraiment trouvé leur réelle identité, et continuent de se fier aux recettes des plus grandes influences des années 80. Il n’est d’ailleurs pas étonnant de constater que le groupe a assuré la première partie d’ANNIHILATOR en Grèce, tant les deux groupes partagent ce goût pour un Heavy à la lisière du Thrash, subtilement mélodique, mais toujours hargneux. Malheureusement pour les hellènes, ils ne disposent pas dans leur rang d’un Jeff Waters pour nous illuminer de ses idées géniales ou de ses soli lunaires. Ici, ce sont les conventions qui font loi, et le formalisme est roi, au travers de ces références plus qu’évidentes que le groupe ne cherche même pas à cacher. Vous penserez pêle-mêle en écoutant Disciples of War à SACRED REICH, METALLICA, ICED EARTH, VIKING, ANNIHILATOR donc, mais aussi CHANNEL ZERO et même HEATHEN lorsque les mélodies transpercent la rage, soit la quintessence d’un Thrash/Heavy qui fonce, mais ne défonce jamais.
La faute à quoi donc ? D’abord, à une production un peu trop polie pour être Eric Forrest. Tout est parfaitement équilibré, de la basse claquante qui aurait pu sonner plus NYHC, aux guitares qui semblent s’essuyer les cordes après chaque riff, en passant par la batterie, manquant de punch et au chant encore un peu timide. Ensuite, les compositions. S’en remettant un peu trop systématiquement au bon vouloir d’un mid tempo persistant, les grecs empêchent leur musique d’exploser, et nous retiennent les deux pieds sur terre, un peu trop frustrés. Ensuite, et pas des moindres reproches, des riffs et des structures qui ressemblent à un catalogue de figures imposées, piquées dans le manuel du parfait petit obsédé de la Bay Area, période 87/89. Pourtant, « Out for Blood », à défaut de laisser espérer le nouveau messie Thrash laissait augurer d’une puissance globale un peu plus marquée, sans aller jusqu’à parler de culot. Avec un morceau aussi lapidaire aux intonations très SLAYER/SACRED REICH, le groupe disposait d’une intro tonitruante, mettant l’écume aux lèvres, mais disons-le sans détour, les blancs en neige à défaut de monter retombent vite, et bien à plat. Non que l’album soit désagréable, loin de là, mais il fait partie de ces œuvres anecdotiques, qu’on écoute finalement d’une oreille distraite, au-delà du simple plaisir coupable de reconnaître tel ou tel riff. Cette sensation assez désagréable attend quelques morceaux avant de se manifester, même si « Disciples of War » commence déjà à montrer quelques signes de classicisme un peu trop prononcé. On apprécie évidemment les rythmiques saccadées, la solidité générale, on sent que les instrumentistes y croient, mais il manque toujours un petit quelque chose pour transformer la tradition en satisfaction. Incriminons aussi la longueur des morceaux qui la plupart du temps ne reposent que sur une ou deux idées, et pas toujours pertinentes, même si le quatuor essaie parfois d’insuffler un peu de groove à sa linéarité (« Humanity Enslaved », plus SACRED REICH qu’une grimace de Phil Rind).
Toujours confiant, DREAMLORD essaie, persiste, mais malgré quelques secondes d’inspiration, le soufflé retombe vite, à peine relevé par quelques soli gentils (« Aggressive Denial »), ou quelques mélodies progressives qui malheureusement s’embourbent vite dans un Heavy agressif, mais passéiste (« Infratricide »). Le véritable sauveur est assez ironiquement l’instrumental « Act of God », qui sans se montrer héroïque, nous dispense au moins de lignes vocales un peu trop prévisibles. Dommage quand même qu’au bout de tant d’années, les grecs n’aient pas fait preuve de plus de témérité, et se soient contentés d’une facture trop formelle et de morceaux trop consensuels. Tout ça est très bien joué, mais manque de panache et de « saleté », s’inscrivant dans une moyenne de nostalgie pas très élevée. Espérons que le soutien d’un label donne confiance aux DREAMLORD qui méritent de s’extirper de cette zone de confort qu’ils ont trop bien balisée.
Titres de l'album :
01. Out for Blood
02. Disciples of War
03. The 11th Hour
04. Humanity Enslaved
05. Aggressive Denial
06. Infratricide
07. Blinded Eyes
08. Act of God
09. Outcast
10. Uncompromised
Un report ? Je crois que j’y reviendrai l’an prochain mais deux jours afin de mieux profiter. J’en connais qui ont du moins apprécier le camping avec l’orage du dernier soir
16/05/2025, 06:52
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11