Essayons de passer une soirée entre gens de bon goût. Le reconfinement pointant le bout de son nez, il est temps de choisir sur les étagères les bons films susceptibles de nous soigner de l’ennui dans lequel on nous enferme. Evidemment, impossible de piocher n’importe quoi sous peine de passer pour des cuistres. Il est obligatoire de faire son choix parmi les classiques de la série B horrifique, de désigner les meilleurs inédits de la scène italienne, et de prendre entre ses petites mains quelques représentants honnêtes estampillés Grindhouse. En accompagnement, une bonne téquila fera l’affaire, et un sofa pas encore trop abimé, mais pas neuf non plus. La soirée s’annonce bien, et les amis sont excités par cette perspective, mais il manque encore un élément pour que le bon déroulement des festivités ne soit grippé par un petit grain de sable. La bande-son qui accompagnera l’entre-deux films, et qui elle aussi se doit d’être impeccable. Vous avez des doutes, trop de choix ? Les GOBLIN ? Fabio Frizzi ? Je vous propose de faire preuve d’un peu de culot et d’éviter les « trop classiques », et de laisser les CRAMPS et les MISFITS dans leur boitier, ainsi que WHITE ZOMBIE. Pourquoi ne pas se laisser tenter par une nouveauté, qui justement vous permettra de faire preuve d’audace et de vous faire positivement remarquer de vos convives ? Ainsi, glissez discrètement le dernier long des américains d’adoption de RUSTY EYE, qui fera parfaitement l’affaire et collera à la thématique de la soirée. Pourquoi ce choix pour le moins culotté et étrange ? Laissez-moi vous présenter la bande.
Dissecting Shadows est loin d’être le premier jet de ce trio hors-normes, qui depuis 1995 récite ses classiques avec une application remarquable. Et après un nombre incalculable de démos et quelques live, la bande s’est enfin lancée dans l’enregistrement d’un LP, définissant avec une acuité certaine leur approche. Rust n’Roll a donc vu le jour en 2000, l’année du soi-disant bug, et a permis aux trois résidents de Mexico City de se faire un nom, à défaut de prendre le monde d’assaut. S’en sont suivis deux autres albums, Stendhal Syndrome en 2006 et Possessor en 2009, avant que les trois companeros ne décident de rendre hommage à leurs racines avec l’album de citations en espagnol Saca El Cobre. Et nous étions donc sans nouvelle de la bande depuis six ans, comme s’ils avaient rangé leurs chapeaux et remisé leur tord-boyaux au placard, malgré une reprise de contact l’année dernière en format court avec Rust n' Roll Over Again. Heureusement, les trois marsouins nous en reviennent avec dix nouveaux hymnes occultes, et nous enchantent encore de leur crossover global qui prend des allures de partouze de styles de laquelle on ne sort pas vraiment indemne, ni tout sec. Retrouvant l’inspiration dans la culture bis, pulp et horrifique des années 70, RUSTY EYE nous propose avec Dissecting Shadows son travail le plus varié, le plus audacieux, et le plus énervé, accentuant encore plus sa singularité, et justifiant ses apparitions dans des institutions comme Noisey, Revolver, Metal Sucks et Metal Edge. Il n’est pas étonnant qu’une certaine presse se soit emparé de leur cas, les californiens développant un style qui leur est propre, et qui intrigue. On est d’ailleurs bien ennuyé au moment de leur coller une étiquette sur le sombrero, puisque leur musique emprunte au Rock, au Hard, au Gothique horrifique cartoon, à la Darkwave, au Stoner, au Doom, au Heavy Metal, au Punk, à l’Horror Punk, et tout ce qui peut servir à enflammer la mèche de leur imagination. Et une fois encore, c’est la nôtre qui se met à travailler au contact de ces chansons étranges, qui rappellent clairement les années 70, mais aussi le redressement du Rock des années 90, et qui porte aux nues le métissage culturel.
Toujours un peu gauche et au parfum amateur, l’optique du trio est toujours mené d’un train d’enfer par la batteuse/chanteuse Miss Randall (Julieta Randall), et soutenue dans sa cadence par le bassiste/chanteur Mr. Rust (Paul Casanova), accessoirement DJ résident au Rainbow Bar & Grill. Les deux leaders sont accompagnés par Baron Murtland (guitare) depuis 2006, et l’association de ces trois personnalités donne un mélange haut en couleurs, tirant sur KADAVAR, les MISFITS, une pincée des RUNAWAYS, les CRAMPS, les KYUSS, mais aussi BLACK SABBATH, DEATH SS, et une poignée d’autres petits malins qui un jour ont cru bon de ne plus jouer comme les autres. Le cocktail est donc détonnant, à base de jus de serpent, d’une attitude bravache, et de plans simples, enchainés les uns aux autres comme des meurtres dans un slasher de catégorie A. Un peu Rob Zombie dans le traitement du son en image, un peu bancal dans l’équilibre entre Rock et Metal, le trio s’illustre par sa recherche de climats qui rappelle parfois le plus méchant et vicieux de la NWOBHM (« Mrs Baylock », le hit de l’album et très bel hommage au personnage homonyme de The Omen, « This Is Permanent ») , et surtout par son flair au moment de fusionner les tonalités narquoises de la voix de Miss Randall et les cris gutturaux de Mr Rust.
Presque Psychobilly dans leur traitement du Rock, remplaçant le Rockabilly de papy substitué par du Metal de tonton, les RUSTY EYE incarnent donc l’avant-garde du Psychometal, avec leurs constantes références au passé de cette musique, les clins d’œil à MAIDEN et MOTORHEAD, tout en gardant du PURPLE sous le coude (« Can’t Wait to go to Hell »). Ils échappent donc facilement à la catégorisation trop restrictive du vintage remis au goût du jour, et se permettent de laisser la datation au carbone 14 dans le placard. Impossible de ne pas se laisser aller au son d’hymnes chaloupés de la trempe du boogie infernal de « Hellbound Witch » qui sonne comme un duo entre Cherrie Currie et Screaming Lord Sutch, ou du très métallisé « The Destroyer », sorte de Proto-KISS passé au prisme d’ANGEL WITCH. On reconnaît bien l’influence de la première vague occulte anglaise de l’orée des années 80, mais les américains picorent à tellement de niches qu’on peine vraiment à leur désigner des influences primordiales. On se contente donc d’apprécier la musique, très trash mais toujours un peu Art-Prog, et on inhale avec délice les fumées exhalant du mélancolique et amer « Kandarian Dreamin’ », tandis que le final « All the Colors of the Dark » pointe du doigt l’importance du classique de Sergio Martino. Je vous parlais donc d’une bande-son idéale pour une soirée entre fins connaisseurs. Et après écoute de Dissecting Shadows, vous acquiescerez du fait que cet album se substitue facilement à toutes les BO horrifiques de votre connaissance. Sinon, continuez de regarder les infos et de paniquer. C’est bien tout ce que vous méritez.
Titres de l’album:
01. This Is Permanent
02. Can’t Wait to go to Hell
03. Dissecting Shadows
04. Hellbound Witch
05. Defacing Effigies
06. Mrs Baylock
07. Hope Denied
08. The Destroyer
09. Kandarian Dreamin’
10. All the Colors of the Dark
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