Divide and Devour

Destroyed In Seconds

24/04/2020

Autoproduction

Dans les années 80, les groupes chantaient le mal-être de la grande Amérique des années Reagan. Le Hardcore s’en donnait à cœur joie, tandis que la Pop et le Soft Rock détournaient le regard des gens vers le soleil Californien et les plaisirs hédonistes de la vie aux USA. Dans les années 90, les rappeurs, East et West coast chantaient la violence des rues, le réalisme du deal, le racisme ambiant dans la violence du LAPD, tandis que Seattle se repaissait de son propre ennui. La parenthèse Obama a permis de reprendre un peu de souffle, mais depuis l’avènement du perruqué et orangé Trump, la donne est revenue sur le tapis, plus implacable que jamais. L’homophonie, la xénophobie, les injustices, le capitalisme galopant, l’avidité, le néo-libéralisme acharné ont transformé le pays en usine à cauchemars, le peuple se scindant en deux parties : les fanatiques et les révoltés. Les premiers s’enivrent de leur propre bêtise, rechargent leur gun en se demandant sur qui ils vont tirer, tandis que les seconds se battent becs et ongles pour que la nation revienne sur les bons rails…considérant qu’elle les a déjà empruntés. Difficile de se sentir à l’aise dans une Amérique dirigée par un clown ancien animateur de télé-réalité, et entrepreneur sans scrupules se moquant de l’intégration, de la pollution, et multipliant les saillies publiques confirmant sa stupidité crasse et son sens de la formule misogyne. Dans ce contexte, pas étonnant que les artistes nationaux se retournent sur leur passé pour faire table rase d’un présent peu réjouissant, et c’est en pleine révolte que les DESTROYED IN SECONDS ont vu le jour à la fin des années 2000. Fondé en 2008 à  North Hollywood, ce quintet (Jon Tomala - chant, Bruce Reeves & Christian La Rocca - guitares, Kyle Hertz - basse et Sean Vahle - batterie) a mis à peine deux ans à publier son premier LP, Critical Failure, qui dénonçait déjà pas mal de problèmes. Deux ans plus tard, c’est Becoming Wrath qui appuyait encore plus sur la plaie de la colère, mais après quelques ajustements de line-up le groupe semblait avoir trouvé sa vitesse de croisière. Pourtant, ce furent huit années supplémentaires qui furent nécessaire à l’élaboration d’un troisième LP, et les californiens fêtent enfin en 2020 leur retour…fracassant.

En substance, la formule utilisée par DESTROYED IN SECONDS est assez simple. Se baser sur la crudité du Hardcore américain le plus véhément, et corser la trame d’une énergie D-beat à la suédoise. Le mélange est donc sacrément relevé, et fait penser à une union entre DISCHARGE, URSUT, et AGNOSTIC FRONT. Soit la quintessence de la violence Punk teintée de Metal, puisque le groupe ne rechigne pas à épaissir sa colère de riffs plus purement Thrash et Hardcore. L’application de cette recette est elle aussi très simple. Un beat de base, rapide, des influences/références respectées à la croche près (DISCHARGE, ANTI-CIMEX, VENOM, BLACK FLAG, ENTOMBED, MOTORHEAD, THE GERMS, SLAYER, WOLFBRIGADE, DISFEAR, VICTIMS, SKITSYSTEM), pour un résultat qui ne manque ni de mordant, ni de souffle. Des Américains qui apprécient l’héritage des pays nordiques, et qui troussent de petites bombes artisanales d’une poignée de minutes pour ne pas perdre en puissance. C’est ainsi qu’à l’exception d’une entame de quatre minutes et d’une clôture de trois, les titres restent toujours entre les balises de deux minutes et quelques secondes pour frapper fort et vite. C’est bien évidemment assez linéaire dans les faits, avec pas mal de titres qui se ressemblent, mais pris comme un bloc mangé en pleine face, Divide and Devour bouffe tout ce qui passe à sa portée et laisse de vilaines cicatrices. Méthode classique, des riffs qui se souviennent du legs anglais des années 80, un Jon Tomala qui beugle à s’en arracher les tripes, et une section basse/batterie imperturbable. Pourtant, de temps à autre, le quintet ose quelques idées un peu plus légères et Punk, comme ces petits licks mélodiques sur « No Respect ». De même, les BPM grimpent parfois légèrement dans les tours, pour produire des bourrasques Hardcore du plus bel effet (« Only Throats »).

Dans le fond et la forme, et malgré l’influence suédoise marquée, on a parfois le sentiment d’un Hear Nothing, See Nothing, Say Nothing réactualisé, délocalisé à Stockholm pour en accentuer la froideur brute. Et si l’ensemble dégage une énergie incroyable, on se prend à regretter que le groupe n’ait pas proposé plus de titres conséquents comme « Divide And Devour », ce qui aurait permis d’aérer un peu le tout, et proposer des plans moins systématiques. Car lorsque les musiciens se décident à jouer sur l’alternance entre la lourdeur et la vitesse, ils se montrent terriblement convaincants. Mais ne boudons pas notre plaisir et acceptons cette démonstration de force pour ce qu’elle est, un cri de révolte, un ras-le-bol D-beat de première bourre, et la constatation d’un pays fonçant droit dans une impasse mortelle. Avec ce troisième LP intervenant sur le tard, DESTROYED IN SECONDS continue son travail de sape et son entreprise de destruction de l’Amérique moderne, qui ne trouve sa grandeur que dans la mesquinerie et la bêtise.                    

              

Titres de l’album :

                      01. Divide And Devour

                      02. The Tower

                      03. The Badge

                      04. Wraiths

                      05. Disarm

                      06. American Carnage

                      07. World War When

                      08. No Respect

                      09. Only Throats

                     10. Buzzards

                     11. Sulfur

Site officiel

Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 21/09/2022 à 18:20
78 %    571

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Obscura + Gorod + Skeletal Remains

RBD 17/02/2025

Live Report

Doom, Rock'n'Roll & Vin rouge

Simony 10/02/2025

Interview

Voyage au centre de la scène : le tape-trading

Jus de cadavre 09/02/2025

Vidéos

Carcass + Brujeria + Rotten Sound

Mold_Putrefaction 28/01/2025

Live Report

Carcass + Brujeria + Rotten Sound

RBD 23/01/2025

Live Report

Antropofago + Dismo + Markarth

RBD 16/01/2025

Live Report

Sélection Metalnews 2024 !

Jus de cadavre 01/01/2025

Interview

Voyage au centre de la scène : MONOLITHE

Jus de cadavre 15/12/2024

Vidéos
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
l\'anonyme

Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé. 

20/02/2025, 09:27

Simony

Hello Styx, problème remonté à notre webmaster, merci.

20/02/2025, 08:00

Tourista

Ça devient de la chaptalisation ce rajout permanent de groupes.

20/02/2025, 06:42

LeMoustre

Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci. 

19/02/2025, 17:51

Styx

Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.

19/02/2025, 16:32

Ivan Grozny

Merci pour le report, ça me tente bien d'y aller jeudi à Paris.

18/02/2025, 22:44

Jus de cadavre

Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !

17/02/2025, 21:39

Saul D

Moi je regrette quand même le line up des années 80...mais bon....

17/02/2025, 14:08

RBD

Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)

17/02/2025, 13:18

Humungus

Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)

17/02/2025, 06:50

RBD

C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)

15/02/2025, 18:14

Humungus

Super titre !Cela donne envie putain...

14/02/2025, 09:45

NecroKosmos

Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)

14/02/2025, 05:50

Warzull

AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)

13/02/2025, 18:38

Jus de cadavre

Toujours le même riff depuis 35 ans    Mais toujours efficace !

13/02/2025, 17:13

Simony

Excellente initiative, dommage que je sois si loin !

12/02/2025, 07:08

RBD

Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)

12/02/2025, 01:30

Saul D

Un bouquin est sorti là-dessus, "The Tape Dealer" de Dima Andreyuk ( fanzine Tough Riffs)...

10/02/2025, 15:31

Humungus

Toute ma jeunesse.Mais franchement, je ne regrette pas cette période : Le nombre d'heures "perdues" à remplir des K7s et faire les pochettes bordel... ... ...

10/02/2025, 10:16

Truesouth

Um som genuíno e nostálgico.Eu olho para Um poema morto, com grande carisma, com a esperança de que a boa e velha desgraça dos anos 90 ainda respire. Abstract Existence, talvez, seja o &(...)

09/02/2025, 11:22