Techno-Thrash et Thrash progressif semblent venir d’un autre temps, lorsqu’un genre aussi figé essayait de s’extirper de sa condition de musique lapidaire et sans autre prétention que le headbanging de chambre ou de petites salles de concerts. Nul n’a oublié les pionniers du genre, les suiveurs doués, les inspirés ambitieux, mais force est d‘admettre qu’aujourd’hui, le genre n’est plus guère pratiqué que par quelques irréductibles qui n’ont jamais pu se remettre de l’écoute de TOURNIQUET, WATCHTOWER, DEATHROW ou toute œuvre signée par Ron Jarzombek. Alors, heureusement, ces irréductibles n’ont cure du caractère légèrement passéiste de leur démarche, et sortent des albums parfois maladroits, souvent intéressants, et parfois même, fascinants. C’est le cas de ukrainiens de BESTIAL INVASION, qui de leur nom pourtant donnent le sentiment de vouloir éloigner les érudits et les amateurs de précision instrumentale.
BESTIAL INVASION, c’est pourtant l’anti-DESTRUCTION par excellence, si l’on met de côté des albums comme Release From Agony et Cracked Brain. Fondé en 2014 à Sumy, avant de se relocaliser du côté de Zhytomyr Oblast, ce quintet aux moyens individuels et collectifs incroyables a déjà exposé ses vues sur la question progressive via trois albums aussi recommandables que Act of Retribution (2015), Contra Omnes (2017) et Monomania (2019, tous parus à deux ans d’intervalle, espace temporel que respecte d’ailleurs ce petit dernier Divine Comedy : Inferno.
Si la référence à Dante Alighieri n’aura évidemment échappé à personne, c’est surtout l’adéquation entre le thème et son illustration musicale qui frappe à la première écoute. Nul n’ignore qu’il est incroyablement ardu de mettre l’œuvre phare du poète florentin en musique, sans sacrifier la folie au profit de l’art, ou au contraire de sombrer dans la grandiloquence en ignorant la cohérence. L’enfer de Dante étant incroyablement baroque, il convient de trouver le juste équilibre entre la portée émotionnelle et le maelstrom de silhouettes évoluant dans les flammes et les ténèbres, et à ce petit jeu de cache-cache fragile, les ukrainiens se montrent habiles compositeurs, et techniciens hors-pair.
Entre Thrash de tradition, Symphonic Metal aux proportions raisonnables, Power Metal mélodique joué par des élèves de conservatoire en pleine euphorie, mélange de fragrances entre TOXIK et le classique italien, Divine Comedy : Inferno est plus une performance hallucinante qu’un simple quatrième album. Sans renoncer à ses principes de brutalité, le quintet ajoute une dose incroyable de démence instrumentale et de folie mélodique à son Thrash d’inspiration nineties, et nous offre sans aucun doute l’album le plus fort et intense de cette fin d’année. Et croyez-moi, dans une époque rongée par le conformisme old-school et le copié/collé malhonnête, cette sensation est une vraie bouffée d’air frais.
Vakhtango Zadiev (chant), Serg MP (basse), Alexander Klaptsov (guitare), Denis Shvarts (guitare/claviers) et Andrey Ischenko (batterie) se montrent donc sous leur jour le plus flatteur, et soignent des compositions à spirales et à tiroirs, pour nous entrainer dans un enfer poétique, ludique, et surtout, incroyablement enivrant et apte à donner des suées aux amateurs d’acrobaties les plus chevronnés et les moins impressionnables. Dans un déluge de sextolets, de prouesses rythmiques, de cassures impromptues, d’accélérations dantesques, de parties opératiques évanescentes, BESTIAL INVASION fait fi des schémas classiques pour adapter sa musique au chef d’œuvre italien du quatorzième siècle, au point de flouter la frontière séparant le Metal symphonique du Techno Thrash évolutif, ce qu’on ressent sur un morceau aussi fou que « Anger ».
Mais quelle autre meilleure façon de traduire les péchés capitaux en musique que de sombrer dans les affres de leur ressenti, à la manière d’un Fincher qui décrivait le blasphème sous la pluie incessante de New-York ? Pour accoucher d’une telle œuvre, les ukrainiens se sont payé le luxe de quelques invités de marque. Nous retrouvons donc sur la guest-list des noms aussi prestigieux que ceux de Josh Christian (TOXIK), John Gallagher (RAVEN), Jason Gobel (ex-CYNIC, ex-MONSTROSITY), ou André Grieder (POLTERGEIST, ex-DESTRUCTION), et peu importe que certains d’entre eux ne soient intervenus qu’à l’occasion d’un solo ou d’une intro chantée, puisque leur participation est une caution voire même un adoubement assez émouvant.
Le track-by-track est évidemment proscrit pour ce genre d’œuvre, mais sachez que l’inspiration ne baisse jamais de régime, que les chœurs grégoriens occupent une place importante dans les compositions, que les soli donneraient tous des frissons aux anciens poulains de l’écurie de Mike Varney, et que l’équilibre entre la puissance et la mélodie n’a jamais été aussi stable.
Mais la force de BESTIAL INVASION git ailleurs que dans la complexité et la précision de ces compositions. On la trouve sous les pierres de l’individualisme, puisque cet album ne ressemble à aucun autre, et se permet même de sonner inédit dans un monde ou les pierres de rosette sont sous vitrine blindée depuis longtemps.
Je ne rentrerai pas dans les détails pour souligner telle ou telle prouesse de basse (et il y en a beaucoup, à la mode Tony Choy ou Steve DiGeorgio), ou pour mettre en relief des riffs énormes et des soli aussi précis qu’un scalpel de chirurgien (mais beaucoup rappellent le talent de maestro de Josh Christian sur Think This), ni pour souligner le talent de percussionniste d’un batteur digne héritier de Gene Hoglan et Hellhammer. Je me contenterai de dire que dans un océan de convenance et de linéarité, Divine Comedy : Inferno est un radeau de la méduse sur lequel il fait bon naviguer sans cap autre que l’inconnu de la beauté.
Titres de l’album:
01. Limbo
02. Lust
03. Gluttony
04. Greed
05. Anger
06. Heresy
07. Violence
08. Fraud
09. Treachery
Quelle daube.
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