Il y a des noms qui, une fois prononcés, ouvrent une gigantesque boite de Pandore. Une boite qui laisse échapper du bon (les souvenirs), et du mauvais (le temps qui passe, l’âge, l’approche de la mort). Celui d’OBITUARY en fait partie, tant il est associé à la famille Death Metal, celle qui nous rassure depuis des décennies en nous parlant de mort, de souffrance, de décrépitude, nécrophilie, solitude, maladie, profanation, torture, réalités obscènes et autres scènes de déconstruction de la civilisation. OBITUARY est l’un des compagnons de route les plus fidèles de la scène floridienne, et je me souviens encore de l’époque bénie du tape-trading, lorsque les cassettes arrivaient de l’étranger, porteuses de jubilation et autres curiosités. Et le cabinet de curiosités de Gibsonton à l’époque n’avait rien à envier à celui de Guillermo Del Toro : horreur, malheur, musique d’outre-tombe. Lorsque le groupe s’appelait encore EXECUTIONER ou XECUTIONER, les bases étaient déjà là, mais c’est évidemment le séminal et moisi (dans le bon sens roquefort du terme) Slowly We Rot qui a déclenché les passions les plus folles. Depuis, une foi sans failles, et des retrouvailles régulières.
Je ne dirai pas qu’OBITUARY n’a jamais déçu. Ponctuellement, sur des albums un peu plus faibles, il a joué la carte de la sécurité à outrance ou à l’inverse, celle du lifting dispensable. Mais dix ans après un éponyme qui avait replacé les choses dans leur contexte (l’excellence), le monstre floridien revient enfin nous exposer ses cauchemars qui seront bientôt les nôtres, comme d’habitude.
Notez comme le laïus présent sur le Bandcamp présente l’aventure Dying of Everything sous un angle interne. Ne sont cité que les trois héros, Donald, John et Trevor, et tant pis pour Terry Butler (basse) et Kenny Andrews (guitare). Après tout, seuls les premiers de cordée intéressent les passionnés, même si le CV d’un Butler a de quoi donner le tournis. Mais qu’importe, quand on aime, on compte, et le trio d’origine est toujours là, ce qui a le don de nous raccrocher à un passé jamais vraiment terminé.
Lorsque le premier single de l’aventure fut lancé, les avis divergèrent. Trop classique, trop facile, ou au contraire, vivifiant dans les nausées et putride juste ce qu’il faut. Les grandes légendes provoquent toujours une scission entre les fans hardcore et les autres, mais ces mêmes fans ne se sont pas trompés : ce onzième album peut d’ores et déjà trôner en bonne place dans la discographie du quintet, pas si loin que ça du sommet incarné par le podium Slowly/Cause/World Demise.
Non, non rien n’a changé, tout, tout a continué. Ainsi chantait ce groupe d’enfants dans les années 70, et cette assertion est toujours aussi vraie dans le cas de la bande à Donald et John. Les deux frangins ont encore une fois accordé leurs violons, et plaqué une rythmique qui se passerait presque de basse. Et en tombant sur le foudroyant de pesanteur « My Will to Live », on se dit que la fratrie n’a jamais été aussi liée, et en forme olympique pour aller déterrer quelques cadavres plus très frais.
Son parfait, juste assez sale pour ne pas trahir, avec des guitares qui glissent comme de la cire humaine sur les mains d’un profanateur, une frappe assurée, quelques accélérations fumasses, une double grosse caisse délicieusement analogique, et les cris/mots/borborygmes/onomatopées/injonctions/sons hurlés par John, aussi caverneux qu’il n’a les cheveux trop longs. Et dès « Barely Alive », OBITUARY prouve qu’il est non seulement bien vivant, mais qu’il a aussi des choses à dire, des crânes à fracasser, et des pelletées à évacuer. Ce premier morceau, entre Thrash fielleux et Death moelleux rassure quant à l’envie, et s’il reste classique, il pioche dans le meilleur du songbook.
Classique, le mot est lâché, et il a été pensé, soupesé, et balloté pour ne pas induire en erreur. Mais oui, Dying of Everything est bien un classique d’OBITUARY, un album qui respecte les désirs des fans, et qui leur en donne pour leur argent et leur temps. On retrouve tout ce qui a fait de ce groupe un ami de longue date, qui nous traîne depuis les années 80 dans le cimetière d’une société morbide qui se délecte de son propre spectacle de décadence et de putréfaction avancée.
Les titres forts ne manquent pas, et se succèdent à une vitesse folle. OBITUARY a soigné le songwriting, bétonné son retour pour que rien ne puisse lui être reproché. On retrouve tous les réflexes, les postures et les attitudes, et on se dit même que certains titres auraient pu figurer sur les grands albums, comme ce macabre et nauséeux « The Wrong Time », plus World Demise que n’importe quelle tournée de l’époque.
De là, inutile de piocher tout ce qui sort du chapeau, même si chaque morceau exigerait une analyse poussée. J’ai craqué évidemment pour « Without a Conscience » qui sent bon la transition 1989/1994, pour le title-track rythmiquement imparable à la basse roublarde, mais aussi pour le prévisible « Torn Apart », saccadé, syncopé, et même groovy sur les bords et au milieu. Le répertoire 2023 est solide, consistant, et les quarante-cinq minutes totalement justifiées, aucune chanson ne méritant de rester sur le carreau de la salle de montage.
Une fois encore, les reproches vont pleuvoir. Pilotage automatique, recyclage plus ou moins habile, facilité de surface et apathie d’innovation, mais que faire de critiques qui ne tiennent pas compte du parcours et de la légende, qui ose afficher une telle forme en 2023, et une mine plus blafarde que jamais ? Le zombi floridien est plus dangereux que jamais, et transmet un sale virus qui nous contamine tous, et beaucoup plus dangereux que celui refilé par la vague old-school qui elle, se repose sur le passé, et même pas le sien. Le mérite d’OBITUARY est d’avoir été là bien avant tout le monde, et d’avoir été le contemporain de DEATH, MORBID ANGEL ou CARCASS.
Alors, du respect, le même qu’on témoignait à MOTORHEAD et qu’on continue à vouer à AC/DC, METALLICA ou je-ne-sais-qui. Et puis sincèrement, « Weaponize the Hate » est ce que le groupe a proposé de plus efficace depuis très longtemps John n’ayant absolument rien perdu de son charisme vocal avec les années. En publiant ce disque comme s’il ne s’agissait que d’un rendez-vous anecdotique, OBITUARY a joué la bonne carte, et s’est rappelé de sa passion pour CELTIC FROST, mais aussi de sa lucidité par rapport à sa propre carrière. On ne termine pas un album comme Dying of Everything par une déclaration d‘intention aussi claire que « Be Warned » sans savoir que la suite des évènements ne vas pas être très joyeuse.
De plus en plus ancré dans son époque, OBITUARY nous offre la B.O d’un monde agonisant, entre inflation, pollution, aveuglement et fuite en avant. Si ce onzième album a vraiment des airs de grande étape, c’est parce que chaque album l’est, d’une façon ou d’une autre. Mais en restant honnête, Dying of Everything est une excellente reprise de contact, et l’un des disques les plus intègres de la bande. Entre tradition et quelques concessions. A perpétuité s’entend.
Titres de l’album :
01. Barely Alive
02. The Wrong Time
03. Without a Conscience
04. War
05. Dying of Everything
06. My Will to Live
07. By the Dawn
08. Weaponize the Hate
09. Torn Apart
10. Be Warned
Mortne2001, arrête les chroniques stp, surtout si pour mettre World Demise dans le panthéon du groupe.
Pas de grande surprise, ce nouvel Obituary est dans la lignée du précédent : du Death mid-tempo pas trop mal, sans soutenir sérieusement la comparaison avec les temps légendaires constitués pour ma part par les trois premiers albums. On peut néanmoins penser à "World Demise" (que je mets en deçà pour ma part) notamment avec cette intro samplée sur laquelle le tempo du morceau se cale peu à peu. Le riffing est sympathique et d'un niveau constant (ce qui passe mieux qu'une bonne attaque qui s'étiolerait).
Cela fait beau temps que l'agressivité n'est plus la même que jadis mais ce n'est pas seulement un effet de l'âge. Ils ont fait clairement le choix, avec Joe Cincotta, de sonner à la manière du Stoner Sudiste. Et au fond je pense d'abord que cela correspond profondément à leur identité de braves rednecks, et ensuite que cela éclaire le regain d'intérêt sensible dont ils ont bénéficié au-delà du retour en grâce du Death old-school.
Pour ma part j'aime beaucoup World Demise donc pas d'objection à ce sujet.
Très bon album que j'apprécie un peu plus à chaque nouvelle écoute. 2/3 morceaux un peu plus faible que les autres mais rien qui vient gâcher le plaisir d'ensemble. Y'a même des petites surprises bienvenues, comme le premier morceau et le dernier.
Pareil pour moi "World Demise" est un incontournable du groupe.
L'un de leur pires albums. Si l'on ajoute à cela une pochette inadequate, il est temps d'arrêter les frais.
Buck Dancer +1.
Et quelle pochette boudiou !!!
J’étais passé à côté comme un gland et ça fait un bien fou de les retrouver en bonne forme.
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21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
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14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09