Je me suis levé ce matin en me disant que j’avalerais bien quelque chose d’épais. Oui ça peut paraître étrange, mais en hiver, ça réchauffe et pas seulement la gorge, les oreilles aussi. Alors en jetant un coup d’œil aux nouveautés, j’ai remarqué du coin de l’œil une sortie brésilienne à la pochette assez immonde et au sceau très précis : Sludge/Doom. Conscient d’être dans le bon créneau, j’ai écouté la chose, et j’en ai rapidement conclu ceci : la musique des LITRÄO est vraiment épaisse, et saura contenter tous les amateurs de musique lente, grasse, grave et lancinante. Peu d’informations au sujet du groupe, si ce n’est leur ville d’origine, Rio de Janeiro, une discographie succincte constitué de deux EP’s (O Filho Que Você Despreza en 2018 et O Sol Continua o Mesmo en 2019), et un line-up énigmatique (F -basse, M - batterie, G - guitare et K - chant/guitare). Pas de quoi fouetter un éléphant, mais après tout, l’important reste la musique. Sous cet aspect-là, osons dire que les brésiliens se complaisent dans un formalisme de lourdeur assez conséquent, n’hésitant jamais à faire traîner leurs riffs plus que de raison, les aplatissant d’une rythmique pesante et d’un chant rauque et glauque. Rien ne vient vraiment les distinguer de la masse grouillante des groupes de Doom épaississant leur son pour sonner Sludge, mais il y a quelque chose d’hypnotique dans leurs compositions qui leur permet d’obtenir un effet concentrique assez appréciable, d’autant que la seule référence qu’ils revendiquent est celle…d’Adam Sandler, ce qui ne permet pas vraiment de les situer sur une carte stylistique précise.
Mais qu’importe, et si l’ELECTRIC WIZARD de Dopethrone, si les MELVINS les plus pesants, si le SLEEP le plus troublant, et le BONGZILLA le moins complaisant font partie de votre vocabulaire musical, il y a de grandes chances que LITRÄO en fasse rapidement partie aussi. Le principe est simple, jouer le Heavy tel qu’il a été conçu il y a quelques siècles par BLACK SABBATH, en accentuant les aspects les plus exagérés, et surtout, en ne déviant jamais d’une ligne de conduite qui a depuis longtemps biffé les mots « évolution » et « progression » de son lexique. Alors, Egomorte se partage donc entre deux factions, avec d’un côté, les morceaux lourds et Sludge, et de l’autre, les titres encore plus lourds et Doom. « O Filho Que Você Despreza » fait évidemment partie de cette seconde catégorie, avec ses douze minutes bien tassées, malgré une faible accélération centrale laissant place à une mélodie rachitique, vite tuée dans l’œuf par un chant sans pitié au raclage intempestif. Quelles sont donc les qualités d’un quatuor qui finalement, ne fait que respecter des codes bien établis ? Admettons une certaine pureté dans leur approche, qui les empêche de s’ouvrir à des influences extérieures, et un monolithisme qui les confine au statisme, ce qui a le don de provoquer une sorte de torpeur chez l’auditeur. Un confort d’écoute, une douce lancinance dans la répétition, et l’assurance de ne pas être perturbé par des éléments hors contexte ou des breaks intempestifs. Ici, c’est le minimalisme dans le maximalisme qui domine les débats, et aussi gros et massifs soient les thèmes, ils ne dévient jamais, et c’est certainement là le point de focalisation principal de ce premier LP.
Un premier LP à la production elle aussi massive, et inextricable comme les traits de cette pochette grotesque, qui elle aussi agit comme un reflet dans un miroir déformant, présentant la réalité sous son jour le moins flatteur. Et en dehors de la courte transition instrumentale « 188 », tout n’est que noirceur, lenteur, oppression, perversion lourde, et rapport de dominé à dominant. Une longue marche en avant qui prend des heures à faire quelques mètres, soit l’apologie d’une non évolution que les brésiliens assument totalement. L’intérêt ? Pour les fans du genre, de quoi rassasier sa soif de Heavy en enclume frappée avec ferveur et foi, pour les autres, d’avoir affaire à un parangon absolu, érigeant un principe de base en dogme absolu. Les moyens comme fin, qui la justifient, et le Sludge/Doom comme seul objectif. On peut trouver ça redondant, d’autant plus que la chose dure presque cinquante minutes, mais on peut aussi apprécier ces sonorités passéistes qui nous ramènent aux années 90, lorsque NEUROSIS jouait l’obsession et EYEHATEGOD la dépression. Et si le final « Escrituras de uma Vida em Vão » ne propose absolument rien de neuf et nous laisse en proie aux affres du désespoir musical, c’est pour mieux proposer un épilogue en forme de boucle bouclée, et d’aveu définitif. Les LITRÄO ne s’écarteront jamais du chemin qu’ils se sont lourdement creusé, et resteront des esthètes de la lenteur poisseuse, leur musique gardant cette patine de crasse qui recouvre les meilleurs efforts du genre. Inutile donc d’espérer un Crossover qui n’a pas lieu d’être, Egomorte est la mort de l’ego, et l’acceptation du collectif et de l’objectif en tant que but unique, au mépris des individualités qui ne servent qu’un dessein commun. Et finalement, c’est très bien comme ça, même si le résultat a de quoi laisser dubitatif à notre époque.
Je voulais de l’épaisseur ce matin, et j’ai été servi. LITRÄO m’a introduit à un monde unidimensionnel, statique, souffreteux et même cruel parfois, et j’en suis ravi. Certes, un album pareil ne me permettra certainement pas de voir la vie en rose, mais le noir et le blanc sont décidément les deux nuances les plus proches d’une réalité quotidienne étouffante. Et si le monde est stone parfois, souvent même, il est finalement assez Sludge et Doom. Une apocalypse comme une autre…
Titres de l’album :
01. Lugares Memoráveis, Dores Inesquecíveis
02. Enquanto Abutres Consomem Nossa Carne
03. Riley-Day
04. O Filho Que Você Despreza
05. 188
06. Escrituras de uma Vida em Vão
Un report ? Je crois que j’y reviendrai l’an prochain mais deux jours afin de mieux profiter. J’en connais qui ont du moins apprécier le camping avec l’orage du dernier soir
16/05/2025, 06:52
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11