Plus c’est pourri, plus je souris. Non, je ne vous parle pas de ce reste de porc sauté qui traîne dans le frigo depuis une éternité, ni de ce fromage à la couleur douteuse et à l’odeur heureuse, mais bien de Death Metal. Oui, le Death Metal, depuis ses origines, trouve sa jouissance dans l’expression morbide la plus faisandée, et nous enivre de ses riffs congelés et décongelés sans respecter la chaîne du froid. Depuis le séminal Slowly We Rot et l’invasion de la vague suédoise des studios Sunlight, je préfère déguster mon Death tartare et embaumé, dégoulinant de pus et déballé des mois avant dégustation. Cette saveur qui pique la langue, qui provoque des haut-le-cœur sont à moi-même ce que les épinards et Olive sont à Popeye, et le nouvel album des allemands de CARNAL TOMB vient à point nommé me rassasier en cet automne devenu hiver.
C’est déjà l’heure du troisième album pour les berlinois, qu’on attendait de pieds paquets fermes depuis quatre ans. 2019, Abhorrent Veneration se substituait à Rotten Remains en tant que nouveauté d’un catalogue estimé, et proposait déjà une musique forte en décibels, un peu coulante pour le non-initié, mais délicieuse pour l’amateur de cadavres sur le bord de la route. Rois de la procession vers un cimetière abandonné par les hommes et par le temps, les allemands nous avaient alors prouvé leur valeur ajoutée sur le marché, en prônant des principes de digestion lente et de sucs acides.
Aujourd’hui, 2023, novembre, la bande revient (Marc Strobel – guitares/chant, Toni Thomas – guitares, Daniel Sturm – batterie et Mustafa Kaya – basse), toujours aussi chafouin, et nous crache en pleine tronche cet Embalmed in Decay, à faire passer la discographie de SUFFOCATION pour un recueil de poèmes pour enfants hypersensibles. Entre le cryptique underground et le salé de légende, Embalmed in Decay sent vraiment mauvais, et va repêcher dans les marais de Floride et dans les marigots de Stockholm de quoi nous enivrer, avec toujours en exergue cette odeur pestilentielle qui fait les meilleurs produits sans date limite de consommation.
Enregistré et mixé par Tobias Engl à l’Englsound studio de Berlin, masterisé par Sverker Widgren aux Wing Studios de Stockholm, Embalmed in Decay bénéficie donc d’un traitement entre-deux, en jonction de l’Allemagne et de la Suède, combinant pour l’occasion la rudesse germaine et la rigidité cadavérique scandinave, pour le plus grand bonheur des plus grands nez de ce siècle.
La recette est connue, traditionnelle, mais fonctionne grâce à une passion totale, et un investissement l’étant tout autant. Les son, énorme, les riffs putrides, le chant, d’outre-tombe, contribuent à transformer ce troisième longue-durée en épiphanie pour nécrophiles en chaleur, creusant le sol d’une tombe vieille de quelques semaines histoire d’y humer le parfum de la mort. Mais les allemands ne sont pas que des profanateurs sans foi ni loi, puisqu’ils savent élaborer leurs exactions avec une science exacte, comme le démontre le monstrueux (dans tous les sens du terme) « Draped in Disgust », petit précis à l’usage des renifleurs de linceul qui ne crachent pas sur un brin de fantaisie rythmique.
Dur, compact, macabre, le Death de CARNAL TOMB est sans conteste l’un des plus épais et savoureux du marché. Avec quelques tendances techniques qui se cristallisent autour d’une basse proéminente et active même au petit-déjeuner, le quatuor peut donc s’appuyer sur un métissage certes juste entre-ouvert, mais bien réel pour qui a la patience de décortiquer le dossier.
Aussi grandiloquent qu’il n’est pragmatique, Embalmed in Decay nous laisse nous approcher de la table d’autopsie, pour peser les organes et les déposer dans des sacs à malice. L’odeur est certes très forte, la décomposition plus qu’avancée, mais la méthode est savante et les conclusions rapides. La mort, c’est inévitable, c’est laid, et autant l’accepter comme conclusion unique d’une vie d’ennui et de pensées morbides.
Mais avec quelques finesses et une poignée de sel en riffs accrocheurs (« Cerebral Ingestion »), CARNAL TOMB se démarque habilement de la vague underground de bestiaux obsédés par le Noise et le cryptique (au point parfois de signer des œuvres tenant plus du barbouillage que du dessin obscène), tout en empruntant une sauvagerie mécanique et froide qui donne des frissons dans l’échine. Difficile en effet de résister à des bombes à neutrons comme « Morgue Usurper », qui déboule comme un zombie sous acides, et impossible de ne pas fondre pour cette déclaration d‘amour aux ambiances les plus fétides.
Lenteur éprouvée, accélérations impromptues et brise-nuque, le catalogue des figures est suivi à la croche près, et le résultat est sans appel : ce troisième album assume son statut d’œuvre phare, et domine la production des allemands de quelques têtes. Fraichement coupées.
Jusqu’au bout, Embalmed in Decay maintient la torture à un niveau enviable, et nous agresse même d’un terminal et évolutif « Eyes of the Chasm », qui achève de nous triturer les plaies. Ambitieux mais concret, pragmatique mais inventif, ce nouvel album de CARNAL TOMB est la preuve - s’il en fallait une - que le Death le plus dégueulasse et poisseux reste la Juvamine des tarés de tout poil, et des maniaques de l’atmosphère de chambre funéraire.
Plus c’est pourri, plus je souris. Que voulez-vous, le stérilisé et le pasteurisé n’ont aucun goût après tout.
Titres de l’album:
01. Intro
02. The Putridarium
03. Cataclysmic Maze
04. Defiled Flesh
05. Draped in Disgust
06. Cerebral Ingestion
07. Morgue Usurper
08. Embalmed in Decay
09. Eyes of the Chasm
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