Endless Nights

Jet Jaguar

17/07/2020

Pride And Joy Music

Avant même la sortie de leur premier LP, les mexicains de JET JAGUAR avaient une lourde épée de Damoclès au-dessus de la tête. Ils étaient en effet attendus au tournant, étant le premier groupe hispano-américain à remporter le Wacken Open Air Metal Battle en 2017 en Allemagne, fier du Heavy Metal classique et puissant. Se situant justement en converge du Heavy et du Power Metal, les mexicains étaient venus défier les locaux sur leur propre terrain, et leur victoire attira la poursuite sur eux, ne leur donnant pas le droit à l’erreur. Certes, le groupe était déjà auréolé d’un premier EP et de tournées promotionnelles au Mexique, mais le passage sur Pride & Joy Music et l’attention du public qui exigeait la concrétisation de ce coup d’éclat les condamnait de facto à transformer l’essai et à publier non un simple album, mais un véritable manifeste de talent. Les originaires de Cancun ont abordé cette situation délicate de la façon la plus intelligente qui soit : en ne changeant rien à leur optique, et en conservant leur identité qui leur avait permis de se démarquer durant cette âpre bataille entre groupes méritants. Il n’est donc pas étonnant de constater qu’Endless Nights n’offre rien de plus que Zero Hour, leur premier témoignage moyenne-durée. Pour la faire courte et résumer l’histoire de ces sympathiques musiciens venus du Sud, avouons qu’à l’instar de bon nombre de leurs contemporains, ils s’épanouissent dans un Metal hautement nostalgique des années 80, allant piocher leurs références dans la longue liste des cadors de l’époque, IRON MAIDEN, JUDAS PRIEST, HELLOWEEN, CROSSFIRE, ACCEPT, et autres défenseurs d’un Metal puissant et franc du collier. Mais l’avantage des mexicains sur le reste du cheptel old-school est qu’ils n’hésitent pas à varier les plaisirs, à tel point que ce premier album se pose en best-of des plus grandes années du Hard n’Heavy.

En effet, loin de se contenter d’une seule optique, le quintet habile et malin (Maxx Mendoza - chant, Sergio Güez et Nehuen Pacheco - guitares, Jorge Ramírez -basse et Jimmy Lozano - batterie) sort parfois de sa zone de confort puissante pour proposer des choses plus nuancées et bien balancées, osant même deux morceaux dans sa langue natale, ce qui ne fait qu’épicer quelque peu des débats qu’on augurait très prévisibles. Ne jouons pas le dithyrambe qui n’a pas lieu d’être, Endless Nights n’a qu’une seule chose en plus à offrir par rapport aux dix ou vingt livraisons nostalgiques du mois : le talent de composition, cette façon de coucher sur papier des hymnes qu’on reprend en chœur, en utilisant tous les clichés et les poncifs à disposition pour les transformer en qualités. De fait, ce premier album est une sorte de greatest hits d’un groupe tout à fait conscient de son classicisme, mais aussi de ses qualités, et l’impression de voyage dans le temps est clairement palpable dès les premières minutes. Se reposant sur un duo de guitaristes volubiles en solo et solides en rythmique, JET JAGUAR incarne l’équivalent musical du fauve dont il a emprunté le nom et la noblesse, et se meut avec intelligence avant de porter le coup de griffe fatal. Loin d’agencer sa première attaque comme un bond immédiat et cruel, le quintet aménage des plages plus calmes, presque rassurantes, avant de nous lacérer d’un énorme coup de griffe Power Metal. Et la sensation, loin d’être effrayante est salement agréable, comme un safari non exempt de risques qui finalement se termine sans perte humaine.

Produit de main de maître par un spécialiste des voyages temporels, Endless Nights est en effet une nuit sans fin passée à réécouter les classiques de notre jeunesse, les classiques enregistrés par JUDAS PRIEST, HELLOWEEN, IRON MAIDEN, mais aussi DOKKEN, MÖTLEY CRÜE, et même SURVIVOR et BONFIRE pourquoi pas, quand l’ambiance se tamise et que les sentiments effleurent la lune (« Tormenta »). Loin d’être des concessions, ces morceaux plus intimes permettent d’apprécier le reste d’un répertoire plus musclé, qui toutefois ne tombe pas dans les travers du recyclage un peu trop fidèle. L’identité du groupe, contrairement à ce que certains webzines ont affirmé est bien réelle, et repose sur une osmose parfaite entre les musiciens qui connaissent leurs classiques et les jouent à leur façon. On est ainsi pris immédiatement à la gorge par le surpuissant « Jet Ranger », qui après une longue intro spatiale montre les crocs et mord à pleines dents dans la gorge du patrimoine Heavy classique, avec sa rythmique à la Harris/McBrain et ses riffs dignes de la paire Tipton/Downing. Les chœurs en arrière-plan suggèrent que la nouvelle génération a tout compris au sens de la séduction populaire, et le tourbillon proposé par les mexicains nous emporte dans les hautfonds, à la recherche de notre adolescence perdue. La voix haut perchée et légèrement nasillarde de Maxx Mendoza permet de s’éloigner des références que sont Rob Halford, Bruce Dickinson et Midnight, et colore la véhémence d’une petite touche Sleaze assez légère pour aérer la puissance globale. Et comme pour montrer l’étendue de ses capacités, le groupe enchaîne sur un Hard traditionnel, jouant le boogie pour mieux brouiller les pistes, et surtout prouver qu’il n’est pas unidimensionnel.

Recyclant d’anciens morceaux pour les mettre sous la lumière de 2020, le groupe singe ACCEPT dans ses grandes œuvres (« Blinding Lights »), et en profite pour proposer une fois encore son hit le plus connu (« R.O.D. (Race or Die) ») qui cavale bon train pour nous rappeler le meilleur d’HELLOWEEN et STRATOVARIUS. Sur les dix titres de l’album, trois sont donc des adaptations d’anciens morceaux, mais les nouveaux n’ont pas grand-chose à leur envier, et lorsque l’ambiance se tamise et que l’humeur se veut plus posée, le groupe n’en perd pas pour autant sa pertinence, et lâche des tubes que la Californie des mid eighties aurait adoptés (« No Surrender »). Conscient de ne rien révolutionner dans le petit monde du flashback respectueux, JET JAGUAR joue crânement la carte de l’admiration, mais la joue sans nous flouer en composant des morceaux vraiment remarquables, qu’on chantonne en chœur et qu’on retient bien après les avoir écoutés. Oscillant constamment entre vitesse conséquente et maîtrise raisonnable, le quintet lâche parfois la vapeur pour se rapprocher d’un VICIOUS RUMORS carburant à la nitro (« Final Prayers »), avant de freiner d’un Hard Rock plus modéré, mais pas moins accrocheur (« Nunca Mas »). Terminant sa folle équipée par son cheval de bataille, « 10,000 Voices », le combo montre qu’il est capable de grands achèvements et de constructions plus évolutives, ce qui est plutôt de bonne augure pour son avenir. Et après vérification en longue-durée, on comprend parfaitement comment le groupe a levé son épée en signe de triomphe à la fin du Wacken Open Air Metal Battle. Ils incarnent en effet des guerriers modernes, usant d’armes traditionnelles, avec une foi sans bornes en leur propre quête.    

   

Titres de l’album:

01. Jet Ranger

02. Mr. Lee

03. Blinding Lights

04. R.O.D. (Race or Die)

05. Tormenta

06. Up to the Top

07. No Surrender

08. Final Prayers

09. Nunca Mas

10. 10,000 Voices


Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 19/03/2021 à 18:23
85 %    595
Derniers articles

Dr. Feelgood

mortne2001 29/03/2025

Live Report

1000Mods + Frenzee

RBD 24/03/2025

Live Report

Datcha Mandala

mortne2001 22/03/2025

Live Report

Wishbone Ash

mortne2001 18/03/2025

Live Report

Peter Hook and the Light

RBD 14/03/2025

Live Report

Fanzinat - Projection du Documentaire

mortne2001 23/02/2025

Live Report

Voyage au centre de la scène : HOLY RECORDS

Jus de cadavre 23/02/2025

Vidéos

Obscura + Gorod + Skeletal Remains

RBD 17/02/2025

Live Report

Doom, Rock'n'Roll & Vin rouge

Simony 10/02/2025

Interview
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Cradle of Filth France

Excellente chronique que je me suis empressé de partager. Je te conseille tout de même de te plonger dans les albums sortis depuis 2015 (en débutant donc par Hammer of The Witches). Tu remarqueras certainement que le groupe est véritablement sur une tr&egrav(...)

07/04/2025, 22:35

Gargan

Juste regardé la dernière, il s'agit de la fameuse grotte aux cristaux géants (qui ne peut hélas être visitée..).

07/04/2025, 13:00

Sheb

haha, je me doutais que quelqu'un allait décrypter les coordonnées :-)

07/04/2025, 12:23

Jus de cadavre

1 - Géorgie (le pays, pas l'état US)2 - Lozère3 - Kentucky4 - Belize5 - Belize6 - Mexique (état de Chihuahua)Voila voila. Une chasse au trésor ?

07/04/2025, 09:53

Gargan

Comment ne pas succomber à une telle intro ?

07/04/2025, 09:33

grinder92

Geographical Black Metal \m/

07/04/2025, 08:06

DPD

Et évidemment que les élections sont suspendues en temps de guerre, ça me semble logique.Genre il va organiser des élections avec une partie du territoire sous occupations lol, il y a plus urgent.

06/04/2025, 23:07

DPD

Mouais défendre l'impérialisme russe, aucun pays qui en était occupé ne regrette ce temps.et les arguments types les accords des minsk LOL, genre la Russie en a quelque chose à foutre de ces traités.Je sais pas ça fait vraiment r&ec(...)

06/04/2025, 23:02

Satanic ta mère

@satan : tu veux dire comme ton Zelensky qui fait arrêter nombre de personnalités, interdire des partis et des médias par qu’il le considérait trop proche de la Russie? Ou parce qu'il profite de la loi martiale en vigueur en Ukraine piur ne pas organiser de n(...)

06/04/2025, 18:21

Tiens Ta Femme

Je ne savais pas mais je suis pas surpris le moins du monde, j'ai l'impression que ces notions censées être précises se sont perdues, oui une femme peut vivre une relation abusive et être complaisante, être consentante et l'aimer sur le coup pour div(...)

06/04/2025, 11:29

totoro

Si je ne m'abuse, il a été blanchi des accusations qui pesaient contre lui. Et son dernier album est excellent !

05/04/2025, 13:57

Satan

@ Zgueg : Pour le coup ton pseudo est bien cohérent avec ton raisonnement, assez pitoyable je dois dire.Ton raisonnement est une sorte de gruyère déformé : tu oublies énormément d'éléments factuels et tu en déformes all&egrav(...)

04/04/2025, 20:08

Moshimosher

@Warzull Pour le coup, dans cette news, c'est bien de politique dont il est question...

04/04/2025, 18:24

DPD

Personnellement cette scène post-black-mon-cul de bourgeois ouverts, particulièrement ouverts si je puis dire, m'emmerde tellement par son existence que je cherche systématiquement mon shirt le plus NS possible, essaye de m'empêcher d'entrer tu va devoir (...)

04/04/2025, 17:44

DPD

Chouette cher Simony on va se retrouver comme aux US ou la sécu scrute les patchs pour voir si rien est trop dérangeant. Je sais pas si je suis un sale vieux mais cette idée d'une scène safe ou rien est trop fashy ou radical j'en dégueule du matin au s(...)

04/04/2025, 17:38

Simony

Sortez les pop-corns, le message du patron du Motoc' sur la condamnation de la fachosphère du RN promet d'alimenter les longues soirées d'été

04/04/2025, 17:00

Ivan Grozny

On en avait un "grand" festival de metal extrême, c'était le Fall of Summer et il a coulé, et pas à cause du Covid. Alors couillons, je ne me permettrais pas (et d'ailleurs je vais par ex voir Maiden en juillet comme un couillon

04/04/2025, 14:29

DPD

Je suis un grand fan d'Envy (bien qu'ils aient sortit leur pire album) et Cult of Luna, mais ce devrait être la limite. Rien à foutre de l'ouverture d'esprit.

04/04/2025, 11:34

DPD

Non honnêtement j'ai été trop gentil c'est une affiche de merde qui cherche à contenter tout le monde, est-ce qu'on peut avoir un grand festival de metal extrême ou c'est trop demander?

04/04/2025, 11:28

DPD

Mouais mais en même temps c'est un problème de la scène actuelle, tu as encore des couillons pour aller voir Iron Maiden ou Metallica, Alors ouais il y a du bon, mais tu payes majoritairement pour Trivium Dimmu Kerry King et ce genre de merdes. Il y a un temps ou sur ce t(...)

04/04/2025, 11:25