Eradication

Sisters Of Suffocation

25/11/2022

Autoproduction

Après le Cosmic Black/Thrash, le Death par tronçons. Il est en effet très rare de tomber sur un album du cru proposant seize pistes pour une durée globale de quarante-huit minutes, mais les hollandais de SISTERS OF SUFFOCATION n’ont jamais fait les choses comme tout le monde. Preuve en est de ce troisième album qui se devait de passer la cinquième, et qui effectivement, trace sur l’autoroute des nouveautés en doublant quelques valeurs sures et autres moteurs surpuissants.

SISTERS OF SUFFOCATION est un quintet mixte, composé d’une section rythmique masculine (Fons van Dijk - batterie et Tim Schellekens - basse) et d’un trio de tête complètement féminin (Simone van Straten & Emmelie Herwegh - guitares, et Simone van Straten - chant). Fondé en 2014, le combo a eu le temps de publier deux longue-durée, Anthology of Curiosities en 2017 et Humans Are Broken il y a trois ans. Il était donc temps d’asseoir une réputation grandissante en frappant un grand coup, ce qui est chose faite avec ce surprenant mais envoutant Eradication.

Alors, l’éradication certes, mais de quoi ? De l’espèce humaine sans doute, thème très à la mode dans les cours d’école et dans les diverses réunions de chefs d’états, et qui nous donne de sacrées céphalées depuis une vingtaine d’année. Et quoi de plus adéquat qu’un Death hétéroclite pour illustrer ce propos, puisque le quintet avoue piocher dans toutes les époques son inspiration. On le comprend assez rapidement, les morceaux osant des plans parallèles et complémentaires, et on se demande même par moments si le projet ne se range pas de lui-même dans la catégorie bâtarde du Death/Black,  tant les mélodies et la voix pluriforme de Simone van Straten nous aiguillent sur cette voie.

Eradication propose donc un petit quelque chose à tout le monde, et se montre diablement homogène au regard de son timing méchamment étiré. Il est certain qu’un disque du cru osant plus de quinze chapitres est chose peu courante, mais le groupe tient fermement la barre et ne dérive à aucun moment. Inutile donc de s’attendre à des errances ou à une baisse douzaine de qualité, même si quelques chansons semblent assez similaires. Il convient donc de louer la créativité et l’imagination d’un ensemble fort de son identité, et qui refuse de s’intégrer trop facilement au mouvement old-school.

J’ai personnellement craqué pour bien des numéros, dont « Being Prey », méchant à souhait, ou « Cannibal Soulmate » sournois et sombre comme une éclipse totale. Entre ces dissonances à la guitare rudement efficaces, ces cassures répétitives et cette alternance dans les lignes vocales, Eradication navigue entre plusieurs eaux, et place les hollandais en tête de gondole des surprises Death de ce mois de novembre presque achevé.

Comme un concept-album basé sur l’extinction des espèces, Eradication se savoure in extenso, et profite de soli à la PESTILENCE pour agrémenter de quelques fantaisies son cadre unique. Bien évidemment, il est tout à fait possible d’imaginer que ce troisième pamphlet eut été plus percutant en étant expurgé de quelques inserts plus ou moins dispensables. Mais un groupe capable de pondre une tuerie comme « Returning in a Cauldron » mérite la tolérance la plus large, d’autant que ce genre de prouesse est répété à intervalles réguliers.

Entre Speed/Death typique et méchamment agacé (« Hide in Plain Sight »), lourdeurs à la MORBID ANGEL des jeunes années (« Thick Red Meat », qui donne clairement envie de devenir végétarien), et transition jazzy complètement incongrue (« Elevation », mais pourquoi ? Parce que c’est joli), SISTERS OF SUFFOCATION ne se contente pas d’une relecture linéaire des grands ouvrages de violence, et impose sa personnalité sur la table des négociations.    

 

Trouvant toujours un lick bien gluant pour nous accrocher au scotch de leur imagination, les cinq hollandais volants tâtent de l’éthéré romantique (« How They Bleed »), du gothique agressif et du Death direct (« From Downfall ») pour pondre une œuvre unique en son genre, à la technique affinée mais à l’efficacité en acier trempé.

Du coup, les cinquante minutes passent très vite en leur compagnie, d’autant que les exigences ne se démentent pas en fin de parcours. Entre Black en circonvolutions macabres (« Cordon Sanitaire »), et crise de folie incroyable (« The Chosen One »), Eradication ne lasse jamais, et se montre cohérent de bout en bout. Un petit temps d’adaptation est nécessaire pour se faire à cette ambiance étrange, entre brutalité et séduction létale, mais une fois le principe assimilé, le plaisir est décuplé, et compense le manque cruel d’ambition de la scène old-school.

Comme je le dis toujours, je préfère ceux qui osent et se plantent à ceux qui n’osent pas et visent une victoire à la Pyrrhus. Mais ceux qui osent et triomphent ont droit à toute mon estime, et SISTERS OF SUFFOCATION fait assurément partie de cette dernière catégorie.

   

                   

Titres de l’album :

01. Buried in the Crowd

02. Die Anyway

03. Instinct / Extinct

04. Pay My Dues

05. Being Prey

06. Cannibal Soulmate

07. Returning in a Cauldron

08. Hide in Plain Sight

09. Thick Red Meat

10. The Rich Will Never Die

11. Elevation

12. How They Bleed

13. From Downfall

14. Cordon Sanitaire

15. The Chosen One

16. Outerlude


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par mortne2001 le 30/12/2022 à 17:42
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