Tout ça devient éminemment compliqué. A force d’écouter de l’extrême, on pourrait croire que mes oreilles sont rompues à l’exercice et qu’elles sont capables de faire preuve de discernement, ce qui est globalement le cas. Mais il arrive que les frontières soient si habilement ou involontairement brouillées qu’on ne soit plus en mesure de vraiment savoir ce qu’on écoute.
Je m’explique.
Le premier album du one-man-band CONVULSING est l’exemple que j’ai choisi pour illustrer ce débat. Si les indications trouvées sur la toile partent dans diverses directions, ça n’est pas une question de libre arbitre, mais de sensibilité individuelle. Ainsi, si la plupart de ceux qui ont abordé le cas de cet Errata parlent de BM franchement expérimental et lourd, d’autres au contraire évoquent un Death vraiment grouillant et malsain, tandis que certains se situent en convergence, lâchant même la possibilité d’un spectre Doom pas si hors contexte que ça d’ailleurs…
Alors, en définitive ? Rien, ou tout ça à la fois, ce qui a peu d’importance dans le fond, mais pas mal dans la forme, ne serait-ce que pour ne pas te perdre, toi, Ô cher lecteur, dans un labyrinthe de qualificatifs.
CONVULSING est donc le side-project solo de Brendan Sloan, membre de DUMBSAINT, chantres d’un Post Metal assez mélancolique et triste d’approche. Brendan s’est chargé de tout, de la composition à l’exécution, en passant par l’enregistrement et la production, ce qui est relativement impressionnant au vu du résultat obtenu, et qui confère à Errata un joli parfum de mystère et d’œuvre résolument à part sur la scène extrême mondiale.
L’Australie peut être fière de son rejeton, puisque Brendan est parvenu à démontrer qu’en assumant toutes les responsabilités seul, il est tout à fait possible de parvenir à un résultat innovant et probant, mais aussi d’une indéniable qualité sonore.
On le sait, les side-project ne sont pas toujours indispensables, voire souvent complaisants. Ils atteignent parfois le niveau d’une récréation assez divertissante, mais dans le cas de ce premier effort de biais, Brendan peut se targuer d’avoir signé l’un des albums les plus lourds, les plus poisseux, les plus sombres et compacts de cette fin d’année 2016.
Ce sont d’ailleurs toutes ses expériences personnelles qui ont conduit à l’enregistrement de cet album, et à l’écoute des huit pistes proposées, il semblerait que l’homme n’ait pas connu des mois très paisibles.
Si l’inspiration globale de son travail se situe dans une moyenne de Black/Post Black de très haut niveau, l’homme n’a pas hésité à y intégrer des composantes de Death, de Post Metal et même de Sludge/Doom, tout en parvenant à insérer dans les minces interstices quelques mélodies amères et acides absolument délicieuses.
Si par moments, son dédale d’inspiration évoque le meilleur MORBID ANGEL, le VADER le plus inspiré, ou même le VITAL REMAINS le plus désabusé, l’orientation générale est indéniablement personnelle, et la violence/vitesse du propos ne masque en rien la lourdeur d’ensemble du projet.
Car là est bien la clé du faux problème. Cet album est un des plus Heavy et impénétrables que j’ai pu écouter ces derniers temps, et pourtant une certaine forme de tristesse lumineuse en émane par touches fugaces, notamment dans ces courts espaces positifs qui arrivent à monopoliser quelques secondes d’attention de ci et de là.
L’exemple de « Dis » en est le plus probant, avec cette lourde intro emphatique qui laisse augurer d’un déferlement de brutalité continu, alors même qu’après quelques instants d’intensité appuyée par une double grosse caisse très compressée, le calme s’installe via quelques arpèges électriques et accords un peu malsains.
Des harmonies tangibles, aussitôt détruites par une association guitare/rythmique à la NEUROSIS des jours les plus déprimants, qui dévie sur un BM franchement nihiliste s’exprimant avec force hurlements et autres cassures rythmiques brutales et sans pitié.
A contrario, « Severed Hemispheres » se replie sur son hermétisme, et développe une belle atmosphère confinée, inspirée des meilleurs complaintes Death et Doom de MORBID ANGEL et MY DYING BRIDE, que l’auteur prend soin de dynamiser de quelques blasts striés de licks de guitare fulgurants. Et même ce break aux deux tiers du morceau, basé sur un accord grave lâché dans le silence d’une baguette qui heurte une ride ne parvient pas à apporter un peu d’air…Mais vous l’aurez compris, peu importe le moyen pourvu que le but soit atteint.
A savoir, inspirer un sentiment de claustrophobie et de menace de l’ombre, ce que chaque segment suggère d’une manière ou d’une autre.
Ce confinement est une fois de plus concrétisé habilement sur le terrifiant « Invocat », qui en cinq minutes et trente-huit secondes, parvient à juxtaposer les enfers intérieurs du MAYHEM le plus historique et du TERRA TENEBROSA le moins lubrique, en opposant de lourdes lamentations Death à des envolées BM abrasives, tout en lacérant la collision de soli lumineux, alors même que la voix de Brendan parvient presque à atteindre les sommets d’introspection du séminal Transcendence Into The Peripheral de diSEMBOWELMENT. Mais une fois de plus, la progression semblant inéluctable est brisée en pleine ascension par une chute vertigineuse des hauteurs d’un Post Metal froid et rigide, avant qu’une ultime accélération ne vous écrase au sol comme un pantin désarticulé.
Violence, pesanteur, lourdeur, vitesse, agressivité. Le tout est assimilé, amalgamé, mais quelle que soit la combinaison de vecteurs choisis, c’est bien cette froideur que j’évoquais plus en amont qui caractérise ce premier effort solo, et ce, sur n‘importe lequel de ses chapitres.
Mais la froideur n’occulte pas la beauté, ce que Brendan prouve en s’accaparant le « The Sky Moves Sideways » de Steven Wilson et ses PORCUPINE TREE, qu’il parvient à respecter tout en y apposant son sceau personnel. Si les harmonies sont retranscrites avec dévotion, CONVULSING transforme ce morceau progressif en une longue complainte de fond, peu rassurante en l’état, mais presque cathartique. Suggérant une fois de plus une alliance délétère entre NEUROSIS et SLEEP, l’homme change de cap à mi morceau pour nous enterrer d’une oppression maladive, qui traine son spleen dramatique comme un Baudelaire de l’extrême. Bluffant, magnifique, mais terriblement éprouvant.
Brendan a gardé pour la fin son essai le plus étiré, «Dragged », qui sans trahir, parvient encore à surprendre. En changeant d’accroche rythmique, et en étouffant ses staccato, l’homme reste dans ses profondeurs abyssales, mais parvient à creuser encore un peu plus son trou en faisant suffoquer les fréquences qu’il compresse jusqu’à la torture, privant son morceau du peu d’oxygène qui lui restait…A ce moment-là, les qualificatifs deviennent inutiles, et on se prend presque à rêver d’associations malheureuses, comme du Death Doom Sludgecore, ou du Post BM Death Progressif, avant de reprendre nos esprits lors du dernier baroud final pour aboutir à la seule conclusion valable…
…une musique extrême pour amateurs d’extrême.
Brendan Sloan est décidemment un musicien très surprenant, et parvient à s’extirper de son contexte de groupe sans trahir ses convictions. Mais son Errata est l’un des albums les plus froids, les plus puissants, les plus lourds et violents de ce mois de décembre 2016, et agit comme un hiver sans fin qui pourtant ne vient jamais vraiment. Et on se prend à considérer ce projet comme homologue musical du monolithe de Kubrick, vers lequel convergent des espoirs d’humanité qui finalement, ont déjà été tués dans l’œuf.
Titres de l'album:
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